Par le passé, j'ai traversé des jardins de plaisirs fugaces, rencontré des visages dont les noms se sont estompés comme des ombres au lever du jour. Ma vie, jusqu'à présent, a été parsemée de rencontres éphémères, des instants brillants mais rapidement évanescents, ne laissant derrière eux aucune trace durable, aucun désir de plus. Mais là, dans l'humidité chaude de la douche, alors que je tiens le visage de Cassia entre mes mains, je réalise que rien de ce que j'ai vécu auparavant ne se compare à l'intensité de ce que je ressens pour elle. Mon regard, porteur d'une passion et d'une profondeur que je ne me connaissais pas, se pose sur Cassia, son dos pressé contre le froid du carrelage, offrant un contraste saisissant avec la chaleur de notre étreinte. Ses mains, enlacées autour de ma nuque, tirent doucement, me rapprochant encore plus d'elle, dans un geste qui parle plus que des mots. Le murmure qu'elle partage, si bas que seul le battement de nos cœurs en est témoin s’apparente à un secret murmuré entre les gouttes d'eau qui perlent dans ses cheveux bruns, les faisant briller d'un éclat presque surnaturel.

L'eau qui s'écoule en cascade sur nous semble vouloir laver le monde extérieur, ne laissant que la pureté de notre relation, mettant en lumière une beauté chez Cassia que je savais existante mais qui, dans cet instant, me semble transcendée.  « Je suis amoureux... très amoureux », les mots s'échappent de mes lèvres presque malgré moi, un souffle mêlé d'admiration et de dévotion, alors que je me perds dans l'océan de ses yeux. Il n'y a pas de retour en arrière possible, pas d'envie de fuir ou de chercher ailleurs.

La ferveur de notre étreinte sous l'onde purifiante de la douche transcende le simple désir charnel. La fonction première de la douche, celle de simplement nous laver, devient un arrière-plan flou, presque insignifiant. Chaque baiser, qu'il soit déposé sur ses lèvres ou sa poitrine, est une déclaration, une affirmation de mon envie incessante d'elle. La vue de la mousse glissant sur son corps, accentuant chaque courbe, chaque ligne de sa silhouette dénudée, réveille en moi une faim insatiable, un désir renouvelé de mêler à nouveau nos corps. Nos baisers retrouvés tempèrent le feu de mes ardeurs avec la douceur de l'affection que nous partageons. « J’ai tout le temps envie de toi… » Ces mots, confiés dans un souffle contre sa peau, portent en eux une vérité brute et incontestable. Mon attirance pour Cassia dépasse largement les frontières du désir physique. Elle englobe tout ce qu'elle est, dans les moindres détails de son existence. Le plaisir que je trouve dans sa simple présence, dans l'observation de ses activités quotidiennes – qu'elle soit plongée dans la lecture, perdue dans le sommeil, en pleine création culinaire, ou même lançant un regard chargé de reproches pour mes paroles déplacées – est une source inépuisable de joie.

Alors que nous quittons l'intimité de la douche, nos corps encore échos de la chaleur partagée, nous nous avançons vers une routine post-douche teintée d'une complicité renouvelée. Le miroir embué de la salle de bain capture notre reflet, un tableau vivant de l'intimité et de l'amour. Dans cet instant, mon regard, captif de l'image de Cassia, reflète une admiration sans borne. Je m'approche discrètement, l'entourant de mes bras avec une douceur protectrice, ma tête trouvant sa place contre son épaule dans un geste d'affection naturelle. « Nous devrions inviter plus souvent quelqu’un… » Les mots s'échappent dans un murmure, porteurs d'une nuance ludique et d'un soupçon de malice, évoquant la présence de Lou qui, par son intrusion involontaire, a insufflé une intensité inattendue à notre intimité. « Je vais avoir du mal à être sage et calme maintenant… » Cette confession, teintée d'un désir inextinguible pour Cassia, révèle la profondeur de mon envie, une faim qui va bien au-delà de la satiété physique, touchant à l'essence même de notre relation.

Dans un geste tendre, je drape Cassia d'un peignoir, veillant à envelopper sa peau encore humide d'une chaleur rassurante, avant de m'envelopper à mon tour. Chaque geste, chaque regard échangé dans le miroir est chargé d'une promesse silencieuse, celle d'une nuit encore pleine de découvertes, d'exploration mutuelle où la passion ne connaît aucune limite. Je m'occupe ensuite de nos vêtements délaissés, les disposant soigneusement pour qu'ils sèchent, un retour à la réalité teinté d'un soin méticuleux pour ces détails qui composent notre quotidien. Nous quittons la salle de bain, laissant derrière nous l'humidité et la chaleur pour rejoindre le monde extérieur, armés d'un secret, d'un souvenir partagé qui renforce notre complicité.

En découvrant Lou plongée dans les bras de Morphée, la scène inspire une tendresse spontanée. La lueur de l'écran de son ordinateur allumé vient bercer la pièce d'une douce luminescence, contrastant avec le calme ambiant. Dans un mouvement plein de soin, je m'approche pour fermer délicatement l'appareil, une interruption mineure qui me plonge brièvement dans l'univers qu'elle explorait avant de s'endormir. La série, axée sur les mystères et les tragédies aériennes, capturait visiblement son intérêt, laissant son épisode en suspens à la moitié du troisième épisode. Cette réalisation me tire un sourire amusé, révélant l'étendue du temps que Cassia et moi avons laissé filer. Le constat que nous avons été absorbés bien plus longtemps que perçu initialement me remplit d'une joie légère, un amusement face à notre capacité à nous perdre l'un dans l'autre, oubliant temporairement le monde extérieur. Avec délicatesse, je retire le casque des oreilles de Lou, un geste doux pour ne pas troubler sa tranquillité. Puis je pose sur ses épaules une couverture afin qu’elle n’attrape pas froid.

Dans la tranquillité de la nuit, je me faufile vers la cuisine, animé par le désir de prendre soin de Cassia de la manière la plus douce qui soit. La préparation de sa tasse de thé devient presque un rituel sacré, chaque geste chargé d'affection et de tendresse. Je m'assure d'ajouter une pointe de miel, connaissant son goût pour la douceur subtile qu'il apporte. Imaginant déjà le sourire qui illuminera son visage fatigué mais radieux, je me hâte de la rejoindre dans notre chambre, avec une promesse chaude entre mes mains. « C'est brûlant ! » Mon avertissement se veut protecteur alors que je referme doucement la porte derrière moi, veillant à nous envelopper dans notre intimité en verrouillant délicatement la porte. Ce soir, chaque détail compte, chaque geste est imprégné d'une signification plus profonde, soulignant le désir de préserver et de chérir ce que nous avons.

L'air de la chambre, empli de la familiarité rassurante de notre espace partagé, m'invite à laisser de côté les conventions, y compris l'idée de m'encombrer d'un quelconque vêtement. Instinctivement, je sens que la proximité de nos corps sous la couette est imminente, une autre danse de désir et de passion nous appelant malgré la fatigue douce qui enveloppe Cassia. En me glissant sous la couette, je rejoins Cassia dans notre lit, un espace qui est devenu au fil du temps bien plus qu'un lieu de repos. Mes doigts trouvent naturellement le livre posé sur sa table de chevet, un compagnon constant de nos soirs. Tourner les pages du livre qu'elle lit actuellement est un de ces petits rituels que je chéris, un moyen de me lier à ses pensées, à ses rêves, même en silence. C'est une pratique que je ne saurais abandonner, une manière de dire sans mots que je suis là, avec elle, pleinement.

Au fur et à mesure que nous tournons les pages, mon regard demeure bien plus absorbé par Cassia que l’histoire en elle-même. Chaque détail d'elle, de la courbe de sa joue à la douceur de sa peau sous mes lèvres, attire mon regard plus sûrement que l’histoire le plus captivant. Par moment mes lèvres se posent sur sa tempe ou sa joue. Aucun paysage, aussi grandiose soit-il, aucun sommet, même celui de la majestueuse Cordillère des Andes, ne saurait rivaliser avec la simple perfection de ces instants à ses côtés. Ma place est ici, et nulle part ailleurs, chaque geste, chaque regard, chaque silence est empreint d'une signification qui transcende les mots. La fatigue commence lentement à étendre son voile sur nous, une invitation au repos après la richesse des émotions partagées. Dès que Cassia finit sa tasse de thé, je m'empresse de la lui prendre des mains, sécurisant ainsi notre espace contre les accidents nocturnes, et me permettant au passage de lui voler un baiser, un échange doux qui scelle la fin de notre veillée.

Les signes du sommeil deviennent plus évidents chez Cassia, ses paupières luttant contre le poids du sommeil, sa respiration devenant plus régulière, plus profonde. Dans un geste tendre, je repose le livre, marquant la fin de notre rituel nocturne. Sa recherche de chaleur, manifestée par le contact froid de ses pieds contre ma jambe, m'incite à me lever pour augmenter le chauffage, une attention dictée par la connaissance intime de ses besoins, de sa sensibilité au froid. Son enveloppement dans la couette, ce geste si simple et pourtant si chargé d'affection, me fait sourire avec tendresse. Il n'y a rien de plus précieux que ces petits signes de contentement, ces manifestations de bien-être qui parlent d'un confort et d'un sentiment de sécurité puisés dans notre proximité. Je m’allonge de nouveau à ses côtés, mon torse s’accole à son dos dans une étreinte protectrice, ma main cherchant la sienne dans l'obscurité naissante. L'extinction de la lumière marque la transition vers le repos, mes lèvres trouvant une dernière fois sa joue dans un baiser nocturne, un murmure d'amour dans l'obscurité.

Alors que la chambre est plongée dans une tranquillité presque palpable, un calme après la déferlante tempête passionnelle que nous avons vécue, je me retrouve étonnamment éveillé, les yeux grands ouverts. L'image de Cassia, paisible et abandonnée au sommeil, captive entièrement mon attention. Mon esprit vagabonde, revenant sans cesse à la chaleur et à l'intimité de notre étreinte sous l'eau chaude, au désir brûlant que reflétaient ses yeux. Ces souvenirs, si récents et pourtant déjà gravés profondément dans ma mémoire, enrichissent mon esprit d’une une toile de sentiments qui m'empêche de succomber au sommeil. À chaque tentative de bouger, de me détacher ne serait-ce qu'un instant de notre proximité, la réaction de Cassia est immédiate. Sa main, même dans le sommeil, trouve la force de serrer la mienne, un geste inconscient mais ô combien éloquent. Elle semble chercher à travers ce geste une assurance, une promesse silencieuse que je suis là, que je ne la quitterai pas. La question de ses craintes m'effleure l'esprit. Peut-être redoute-t-elle, dans la vulnérabilité de son sommeil, que je m'éloigne, que je trouve refuge ailleurs, loin de notre lit partagé. L'idée même semble absurde alors que mon seul désir est de rester enveloppé dans la chaleur de notre amour, de veiller sur son sommeil. Où pourrais-je bien aller ? Sur le canapé ? Avec Lou ? A travers les méandres de cette réflexion, bercé par les respirations douces de Cassia, le sommeil commence lentement à m'envelopper. La tension de la journée, l'intensité de nos moments partagés s'estompent peu à peu, laissant place à une fatigue douce, un lâcher-prise qui m'autorise enfin à rejoindre Cassia dans le monde des rêves.

Le réveil ce matin-là se teinte d'une confusion inattendue. La chaleur familière de Cassia à mes côtés semble s'évanouir dans la fraîcheur de l'aube, me laissant un instant flotter dans un demi-sommeil où réalité et rêves se mêlent. Mon corps, cherchant instinctivement la chaleur, se retourne, et je sens à nouveau une présence se blottir contre moi. Les minutes s'étirent, délicieusement insaisissables, jusqu'à ce qu'un grincement discret rompe le silence, me tirant un peu plus de mes brumes matinales. Alors qu'une voix s'élève, troublant la quiétude de l'instant, je m'accroche encore à l'idée que je suis plongé dans un rêve, un murmure de la nuit qui s'accroche à la lisière du jour. La réalité me paraît lointaine, diffuse, jusqu'à ce que la voix de Cassia, stridente, chargée d'une émotion indiscernable, frappe mes oreilles. Ses mots, un mélange de frustration et d'exaspération, me poussent à émerger de ma torpeur, me laissant grogner, encore captif de l'engourdissement du sommeil. « Qu'est-ce que j'ai encore fait ? » La question m'échappe, trahissant mon incompréhension face à cette situation inédite.

La réplique de Cassia résonne à nouveau, faisant écho à ma propre perplexité. « Qu'est-ce que je fais ? Je dors… Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? » Ma voix, teintée d'irritation, cherche à démêler les fils de cette étrange matinée. Ce n'est pas ainsi que nos matins se déroulent habituellement, pas avec cette tension, cette atmosphère chargée d'un non-dit qui pèse lourd. Puis, un parfum familier, celui de Lou, effleure mes sens, déclenchant un éclair de lucidité qui chasse les derniers voiles du sommeil. Mes yeux s'ouvrent enfin, révélant non Cassia, mais Lou, étreinte non désirée, confusion incarnée. La réalité de la situation me frappe de plein fouet, me faisant reculer avec précipitation, jusqu'à chuter du lit dans un mouvement désordonné. Cassia, figure de l'autorité et de la colère, saisit le bras de Lou, lui intimant de quitter ce qui n'aurait jamais dû être son refuge.

La scène, surréaliste, me laisse au sol, égaré entre l'embarras et la stupeur, observant Cassia prendre les choses en main. Ce réveil abrupt, loin de la douceur de nos matins habituels, marque le début d'une journée qui, je le pressens, sera loin d'être ordinaire. La tension entre Cassia et Lou, cette intrusion inattendue dans l'intimité de notre lit, soulève des questions, des émotions complexes qui demanderont à être adressées. Mais pour l'instant, je reste là, au sol, témoin silencieux de ce moment chaotique, me demandant comment nous en sommes arrivés là. L'instant, empreint d'une étrangeté presque cinématographique, suspend le temps autour de moi. Me retrouver ainsi, après tant d'années, à émerger du sommeil à côté de Lou plonge mon esprit dans une confusion profonde. Les souvenirs lointains, appartenant à une autre vie, se heurtent à la réalité présente, créant un tourbillon d'émotions contradictoires. Comment avons-nous pu nous retrouver dans une telle situation ? La question tourne dans ma tête, cherchant désespérément une réponse qui se dérobe.

La nudité dans laquelle je me trouve ajoute un niveau supplémentaire de complexité à la scène déjà chargée. Le regard de Lou, empli d'une intensité qui mélange le passé et le présent, me frappe avec la force d'un coup de tonnerre. Il y a dans ses yeux quelque chose de presque dévorant, une faim qui ne m'était pas destinée, du moins, plus depuis longtemps. La situation, déjà délicate, se teinte d'un malaise croissant sous le poids de ce regard. Dans un réflexe primal, je saisis un oreiller, le brandissant comme un bouclier improvisé pour cacher ma nudité. Ce geste, aussi futile soit-il, me donne l'illusion d'une barrière, d'un semblant de contrôle dans un moment où tout semble échapper à ma compréhension. L'air entre nous se charge d'un mélange de tension et de non-dits, un espace rempli de questions sans réponses, de sentiments inexprimés qui flottent lourdement dans la lumière matinale filtrant à travers les rideaux.