J’ouvre un œil. Il faut quelques secondes à mon esprit pour se rappeler où nous sommes. J’ouvre le second œil en soupirant. Je ne suis pas chez moi. Nous ne sommes pas chez nous. A côté de moi, le corps endormi de Clyde. Le bruit de sa respiration est couverte par le brouhaha qui règne déjà en bas. Ma mère doit être excitée comme une puce et ne plus tenir en place. Vous vous rendez compte ? Son fils se marie aujourd’hui, woah. L’enfant prodige de la famille, celui qui ne déroge pas aux règles dans lesquelles nous avons été élevés. Parfois, je me demande si je n’ai pas été échangée à la naissance pour être aussi différente d’eux. J’aime ma vie, j’aime mon métier et surtout, j’aime Clyde, n’en déplaise à maman. Papa lui, il y a longtemps qu’il a arrêté de me présenter des bons partis ou même de me poser des questions. Il est content quand je reviens, je crois. Je suis sûre qu’il espère secrètement que je ne reparte pas. Il ne dit rien et c’est mieux comme ça. J’entretiens de bonnes relations avec Honoré. Parfois, on s’envoie même des messages.
Il est encore trop tôt pour que je me lève. Toute ma famille est déjà sur le pont mais nous sommes arrivés hier, nous avons pris l’avion le plus tard possible. Je ne voulais pas imposer cela à Clyde plus longtemps que nécessaire. Je sais déjà comment maman va fonctionner. Elle ne va parler qu’en français, me forçant à traduire par moments. Elle fera plein d’allusions sur le fait que nous ne sommes pas mariés, que nous ne projetons pas d’avoir des enfants alors qu’à mon âge, elle était déjà mère deux fois. J’en ai déjà mal à la tête. Je me recouche, je me colle contre mon petit-ami et cache mon visage dans son cou. Je profite de nos derniers moments de calme du week-end.
Des coups sont frappés à la porte. Cette fois, nous n’avons pas le choix. Je ne me suis pas totalement rendormie. J’étais dans un état de somnolence agréable, lovée contre le corps chaud de Clyde. « Tu dors ? » Je picore son épaule de baisers. S’il dormait, il est temps qu’il se lève. Je repousse les couvertures, rabat la couette pour me mettre debout. Nous avons dormi dans mon ancienne chambre, qui n’a pas été redécorée depuis mon départ. Toujours les mêmes posters au mur, mes bibelots sur le bureau et quelques vestiges de mes anciens cours. Je me tourne pour le regarder émerger, hors de question que je descende toute seule. « Il est temps qu’on aille prendre un petit déjeuner et ensuite nous préparer… Il ne faudrait pas que nous soyons en retard. » Oh la non, mes parents ne me pardonneraient pas un tel affront. Déjà que venir nous chercher à l’aéroport de Montréal juste la veille, cela a fait grincer des dents. Je lui tend la main pour l’enjoindre à me suivre et c’est ainsi que nous descendons.
En bas, c’est une vraie ruche. Ils courent tous dans tout les sens comme des poulets sans tête. Je reste plantée en bas des escaliers, échevelée dans mon pyjama, serrant fermement la main de Clyde dans la mienne. « Ah bah enfin, vous voilà ! Dépêchez vous bon sang ! » Je me crispe mais un sourire étire mes lèvres. « Bonjour à toi aussi, m’man. » Puis elle s’éloigne, baragouinant en français un truc sur le manque de ponctualité des américains. D’un signe de tête, je désigne l’emplacement de la cuisine. Clyde n’est pas venu si souvent ici. D’habitude, lors de ma visite diplomatique annuelle, je viens seule. Tous les ans, il y a un moment où je regrette qu’il ne soit pas là. Et là, en une seule phrase, je me rappelle pourquoi je n’insiste pas pour qu’il le fasse. Nous sommes dans la cuisine quand mon frère apparaît sur le pas de la porte. A son sourire, je sais qu’il est vraiment content que nous soyons là. Il s’approche pour tendre la main à Clyde. « Bonjour. Vous avez bien dormi ? » Puis il se tourne vers moi, embrassant mes cheveux. « Ne sois pas trop sévère avec maman, elle est stressée tu sais… » Je crois qu’être stressée est son état naturel, je n’ai jamais vu ma mère calme. Mon père, lui, doit se cacher quelque part et attendre l’heure du départ. Nous restons dans la cuisine le temps de déjeuner puis nous remontons à l’étage pour nous changer.
Je soupire réellement une fois la porte de la chambre fermée, nous coupant du reste de la famille. Ca va, ce n’était pas si terrible. « Plus la journée va avancer, moins ils feront attention à nous. » Je ne sais pas si cela est un constat ou un réel souhait. Je m’avance et extirpe de ma valise une robe verte bouteille, qui m’arrive à la mi-cuisse, échancrée dans le dos et qui se ferme par une fermeture. J’aurais besoin de Clyde pour cela. « Tu veux aller à la douche en premier ? Quoi que, tu sais, elle est suffisamment grande pour deux. » Je m’approche et je passe mes bras autour de son cou pour aller l’embrasser. Je sais qu’il sera superbe dans son costard.
panic!attack
Clyde Creekman
- Shade of winter -
▎ Messages postés : 53
▎ Pseudo : Pow
▎ Faceclaim : Brock O'Hurn
▎ Crédits : Rainbowsmile (avatar) moi (cs) et google (gif)
Je sens Iris bouger légèrement à côté de moi. Je suis réveillé depuis un moment déjà, à écouter les divers bruits de la maison qui se prépare pour l’évènement. C’est un des premiers mariages ou je me rend étant adulte. Je suis plus habitué aux enterrements de vie de jeune fille qu’à ces derniers. Je ne pense pas que la mariée ai eu un stripteaseur pour le sien, ce n’est pas vraiment le genre de la maison, et c’est probablement la même chose s’agissant du frère de ma petite-amie. Je n’ai rien contre eux, mais à l’instar de ma propre famille, celle d’Iris est on ne peut plus fraiche quant à l’existence de notre couple et à notre métier commun. Surtout sa mère, et elle me le fait comprendre à chaque fois. J’ai bien conscience que ce qui fait notre vie n’est pas commun, et que beaucoup de monde juge les personnes que l’on paie pour se déshabiller, surtout parce qu’ils ont une vision biaisée de ce qu’est le monde du strip-tease. Nous ne sommes pas des prostitués, nous assurons uniquement un spectacle graphique et sensuel, nous ne couchons pas avec n’importe qui et encore moins dans des conditions sordides. Quant à notre style de vie amoureux, je suis bien content que la plupart ne soient pas au courant. De source sûre, je suis le seul qu’Iris ai déjà présenté. Après tout, les autres ne comptent pas.
Malgré toutes les réticences, nous avons été invités au mariage de Hyacinthe. Pas uniquement elle, elle et moi. Ensemble. Comme nous sommes arrivés tard, nous n’avons pas encore eu le droit à des remarques acerbes, mais vu la patience de la personne qui est venue toquer à la porte de la chambre, je pense qu’il vaut mieux ne pas tendre le bâton pour se faire battre. Je tourne la tête vers ma petite-amie pour lui montrer que non, je ne dors plus depuis longtemps, et qu’il est temps de faire l’honneur de notre présence à ses parents. Depuis le temps que je sors avec Iris, j’ai appris quelques phrases dans sa langue natale, quelque chose de basique pour lui montrer que je fais un effort pour m’intégrer dans son univers, même si sa mère risque de me regarder d’un drôle d’air en faisant une remarque sur mon accent américain pure souche, chose que je m’efforcerai de ne pas relever. La remarque de ma compagne me fait doucement sourire. Elle est bien lucide sur la situation mais cela ne semble pas l’attrister plus que cela. Nous sommes là parce que c’est le mariage de son frère, mais si elle avait pu s’en passer, il est probable que nous ayons pu être en train de préparer le prochain spectacle à l’heure qu’il est. “En effet, autant éviter de faire le moindre faux-pas” dis-je sur le même ton en basculant à mon tour les jambes du lit. Après tout, je ne peux que comprendre le stress d’une journée de mariage. Je n’ai pas non plus envie que nous devenions des parias. J’enfile mon pantalon de costume histoire de ne pas paraitre dans la cuisine en caleçon, mais garde mon t-shirt pour le moment et descend les escaliers accompagné de la jeune femme.
Nous nous faisons immédiatement remarquer par la mère de famille. J’ignore à peu près quelle heure il est, en tout cas, les préparatifs vont bon train et tout le monde a les mains prises par quelque chose, que je suis étonné qu’on ne nous ai pas donné déjà quelque chose à faire. Je n’ai pas le temps de dire bonjour mais Iris le fait à notre place, sans réponse de sa mère. Heureusement, le marié est plus poli, il semble moins stressé que ses parents. Je lui rend sa poignée de main avec plaisir. “C’est plutôt à toi qu’il faut poser la question” je réponds avec un sourire avant de le laisser s’adresser à sa soeur et que nous prenions des forces pour le reste de la journée. A plusieurs reprises, Mrs Renoir passe dans notre dos en émettant des commentaires entre ses dents, et je préfère écourter le moment en lançant un regard insistant à Iris pour que l’on puisse remonter et achever de se préparer. “Je n’en doute pas, bientôt tous les regards seront tournés ailleurs. Ca va bien se passer ne t’en fais pas”. Je profite de ce petit moment les yeux dans les yeux pour un calin de couple. “Cette proposition est très tentante, je ne pense pas que je serai très à l’aise de faire des bêtises avec tout le monde à coté”. Je lui vole un baiser rapide en posant une main sur sa taille sans aller plus loin. “Va s’y d'abord”. Je lui suggère, parce que je pense qu’elle va mettre plus de temps à se pomponner que moi à me préparer.
Je la suis tout de même dans la salle de bain pour m’occuper de ma chevelure qui a pris cher avec l’avion. Je dois également m’occuper de ma barbe pour me rafraichir le visage. Tout cela va me prendre le temps qu’elle passe dans la douche et lorsqu’elle a fini j’enchaine. “Tu peux me passer mes affaires, steup ?” je demande lorsque j’ai fini à mon tour cette dernière. Le peu de temps qu’elle a eu pour se préparer ne rend Iris pas moins sublime que d’habitude, j’ai des étoiles dans les yeux lorsque je la regarde, et je sais que sa robe lui rendra justice, sans pour autant éclipser la mariée, ce qui serait sûrement un sacrilège ! Je m’habille et me porte volontaire pour lui attacher sa tenue dans le dos. “On t’a déjà dit un mot sur le programme ?” je m’enquiert alors que mes gros doigts s’attaquent à la fermeture. Je suis définitivement plus doué pour le déshabillage.
En toute honnêteté, je ne pensais pas être invitée au mariage de mon propre frère. Mes parents, ma mère surtout, désapprouve complètement mon mode de vie et surtout le couple que nous formons avec Clyde. Pour un évènement de cette ampleur, il était hors de question que je vienne sans lui. Il est mon compagnon, celui qui partage mon quotidien, les autres je ne leur octroie qu’un bout de nuit. Et encore, parfois pas toujours. Je sais que maman aimerait que je sois plus comme mon frère, que j’ai un boulot plus convenable, un mode de vie plus conventionnel. Mais ce n’est absolument pas le cas. Je suis moi et j’aime être moi. J’assume parfaitement qui je suis et surtout, ce que je suis. Et tant pis pour les autres. Pour autant, ce n’est pas une raison pour fâcher maman plus que de raison. Alors nous quittons le lit moelleux et le calme de la chambre pour l’effervescence de la cuisine. Nous descendons les marches les unes derrière les autres, j’essaie de faire abstraction des commentaires désobligeants.
Mon frère lui semble être heureux de nous avoir ici. Il prends même la peine de serrer la main de Clyde, c’est son beau-frère après tout, même si rien d’officiel nous lie. Nous n’avons jamais évoqué le mariage, ni le fait de fonder une famille. Nous aimons notre vie telle qu’elle est. Honoré n’a aucun mot vexant, ni aucun commentaire sur le fait que nous soyons arrivés tard. J’ai pris le dernier avion nous permettant d’arriver à l’heure pour le mariage. Je ne voulais pas nous infliger cela plus de temps que nécessaire. Pendant le petit déjeuner, nous échangeons quelques mots avec Honoré puis nous remontons nous préparer. Il faut que nous soyons sur notre trente et un. J’ai choisi une robe qui me met en valeur sans pour autant être trop courte, ni trop décolletée. A la première occasion, je cède au regard insistant de Clyde et nous remontons dans la chambre. « J’espère que tu as raison. » Je souffle mais je sais déjà ce qui m’attend. Une fois qu’elle aura un coup dans le nez, elle va me demander pourquoi je ne suis pas mariée. Pourquoi je n’ai pas encore d’enfant. Pourquoi je n’ai pas encore un crédit immobilier sur le dos. Toutes ces choses si importantes pour elle mais secondaires pour moi.
Il réponds à mon étreinte et je me blottis dans ses bras, le nez dans son cou. Je suis un peu sur la pointe des pieds parce qu’il est bien plus grand que moi. J’aimerais que nous allions un peu plus loin mais il a raison. Moi non plus je ne serai pas super à l’aise sachant que ma famille est de l’autre côté de la cloison. « Tu as raison. » Je l’embrasse et je me recule. Si je le fais pas maintenant, je ne le ferai jamais. Mon pyjama tombe à mes pieds, je suis nue quand je fouille dans ma valise à la recherche de ma robe avant de me rappeler que je l’ai suspendue à un cintre avant d’aller me doucher. J’entends mon petit ami de l’autre côté de la paroi de la douche. Je souris parce que je suis sûre qu’il est en train de tailler sa barbe et de brosser ses cheveux contrariés par le voyage. Il va prendre sa douche quand j’en sors. Je me sèche puis m’habille. J’enfile simplement un tanga parce que ma robe est si décolletée dans le dos qu’elle ne permet pas le port d’un soutien-gorge. J’aime la façon dont Clyde me regarde que je lui apporte ses affaires. Je me sens belle dans son regard et je suis sûre que mes joues s’empourprent un peu. Aucun regard ne me fait autant d’effet que le sien.
Je n’ai pas attaché mes cheveux pour le moment alors je les lève un peu pour que Clyde puisse fermer ma robe. Je compte faire une coiffure simple, une natte sur le côté piquée de quelques fleurs. Quelque chose de joli mais pas extravagant. Pareil pour le maquillage, je veux du simple. Le but n’est pas de faire de l’ombre à la vraie star de la journée : la mariée. Je hausse les épaules à la question de mon petit ami. « Je ne sais pas vraiment, je crois que ma belle sœur voulait que cela soit une surprise. On commence par une cérémonie religieuse puis il y a un repas dans un corps de ferme. Un truc un peu champêtre. » Je ne crois pas que le spectacle sera assuré par des strip-teaseurs. « Il y aura probablement de la musique classique et de la nourriture gastronomique. Et ma mère qui finira par me demander pourquoi nous ne sommes pas encore mariés. » Cinq ans, cela ressemble à une éternité pour elle. En cinq ans, maman a eu le temps de faire deux enfants. Je préfère encore cela à ce qu’elle essaie de me caser avec l’un des amis de mon frère. «Nous avons encore un peu de temps devant nous, tu crois qu’on devrait descendre ? » La perspective de faire le pied de grue en bas ne m’enchante guère.