We're lost and apathetic as we stare into the world unknown

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« Je... J'peux pas. J'dois... faut que j'y aille. » avais-je bredouillé avant de prendre la fuite comme un lapin devant les phares d'une voiture. J'avais pris tellement peur tout à coup, tant à cause du bruit de porte près de nous, que pour ce que je ressentais en embrassant Raylee. C'était indescriptible, tellement génial et moi, j'avais tout foutu en l'air en une putain de phrase à la con ! Que je n'avais même pas été capable d'assumer et de prononcer correctement...

J'avais soulé Amelia et Hiroki toute la semaine, depuis mon agression, la tatoueuse était ma seule lumière au bout du tunnel, celle qui me faisait sourire par ses messages, empêchait mes cauchemars de prendre trop de place en déboulant toujours dans mes songes pour contrer le malin, telle la petite fée vengeresse qu'elle était. Sans parler des quelques petits plaisirs solitaires auxquels je m'étais adonné, son visage entrant dans mon esprit avec surprise. Je revoyais sa poitrine, me souvenais de son corps collé au mien et ça me donnait chaud, ça m'excitait vraiment ! Je n'ai jamais joui aussi vite qu'en pensant à elle, c'est dingue ! Amelia trouvait ça normal et même super, parce que ça voulait dire que j'avais débloqué un truc dans mon esprit, dans mon corps, mais moi, j'étais terrorisée.

J'avais peur d'être gauche, comme une gamine qui découvre la vie, de mal faire, de faire de travers les choses, de reculer et de la blesser. Par mes Dieux ! Je venais de la blesser plus que de raison ! Oh non... Je grimpais les marches quatre à quatre, m'autorisant à respirer seulement une fois que j'avais refermé la porte de l'appartement. Et c'est à cet instant que je réalisais ce que je venais de faire. « AMEEE ! » m'écriais-je en sentant des larmes rouler sur mes joues, mon corps glissant contre la porte jusqu'à me retrouver assise par terre, la tête dans les mains, contre mes genoux, recroquevillée comme une enfant faible. J'étais faible, je me détestais d'avoir fait un aussi gros pas en avant pour ensuite m'enfuir. Raylee allait me détester.

Amelia se précipite sur moi quand elle comprends que je pleure, grognant déjà contre Raylee, désirant savoir ce qu'elle avait fait, si elle devait la tuer sur le champ ou pas. Elle passe ses bras autour de mes épaules et on est là, par terre, ridicule. « C'est pas elle... c'est.. moi. » balbutiais-je, secouer par mes sanglots. Ma brune mon amie, ma fée... JE n'arrivais pas à penser à autre chose que son expression choqué lorsque je me suis détachée d'elle, me cognant même la tête contre la porte, horrifiée. Elle devait se sentir perdue, en colère peut-être... Je le serais si j'avais voulu embrasser quelqu'un qui m'avait rejet aussi violemment ! « J'ai déconné, Amé... Je suis vraiment trop conne... Tout était génial et il a fallu que je m'enfuis... » dis-je en passant mes bras autour de sa nuque, pour la serrer fort contre moi, pleurant toujours à chaudes larmes. Raylee, je suis désolée de t'avoir brisé le cœur...

We're lost and apathetic as we stare into the world unknown

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La voix d'Amelia me parvient avec force, elle est décontenancée elle aussi par mon comportement, alors que tout aurait dû bien se passer. Je parviens malgré tout à dire que Raylee n'est pas la cause de mon mal-être, c'est bel et bien moi. Moi qui ne suis pas capable d'assumer mon attirance pour elle, d'apprécier un baiser chaste à sa juste valeur, après en avoir rêvé pendant des jours, que dis-je, des semaines ! J'ai envie de me maudire rien que d'imaginer ma fée avec le cœur brisé. Je ne brise pas de cœur, moi. Le mien se fait malmené dans tous les sens d'habitude, par mes parents, mes camarades de classe, mes ex-copains, mais je ne sais pas être cruelle, j'ai appris à ne jamais l'être, même sous la colère passagère.

Ma meilleure amie me ramasse, me forçant à me lever et je la suis volontiers, les larmes coulant toujours, mon corps tremblant comme si j'étais glacé. Le canapé est en vue et alors que je me laisse tomber dessus, Amelia m'enroule tel un burrito dans mon plaid favori, celui qu'elle m'a offert. La chaleur qui m'enveloppe m'aide à m'apaiser et je tente de sécher mes larmes dans le tissu, dans mes doigts. Ma jolie sorcière verte part en trombe à la cuisine pour me rapporter un breuvage qui sent divinement bon. Je reconnais quelques ingrédients rien qu'à l'odeur, surtout la camomille, très puissante, et je comprends vite à quoi me servira cette tisane. Le calme, l'apaisement, j'en ai besoin...

« Merci ma chérie. » couinais-je en attrapant la tasse brûlante, me laissant faire par ses gestes quand elle chasse l'eau de mon visage, la main sur ma joue. Mes lèvres tremblent à nouveau parce que, quelques minutes plus tôt, c'était celle de Raylee qui était posée là. Amelia me demande de lui raconter ce qu'il s'est passé et ce n'est pas vraiment le genre de débrief que l'on attendait ce soir... « Je suis nulle... Nan, si, me regarde pas avec ces yeux-là, je suis nulleuh ! » me lamentais-je en faisant la moue, reniflant la tisane. « Je... Je sais même pas par où commencer... Tout était vraiment génial au restaurant. On parlait, on riait, je lui ai même pris la main. Je me disais que t'avais raison, c'était comme avant de lui proposer un vrai rencard, toujours amies. Mais... quand on est rentré... Je sais même pas, c'est arrivé trop vite... » balbutiais-je en tentant de remettre dans le bon ordre les images, ne voyant que les lèvres de ma fée, puis son visage meurtri. « On se tenait la main, mais genre vraiment, comme... comme un couple. Et... Elle m'a embrassé. »
Il me faut une seconde ou deux pour me reprendre, car je sens déjà les larmes revenir en force. J'attrape la main de ma soeurcière, serrant ses doigts pour ne pas flancher. « Je crois que j'ai paniqué... Je ne comprends pas trop, c'était... magique ! Tellement incroyable ! Je sais que je l'ai appelé, je n'attendais que ça, mon corps criait qu'elle le fasse et pis... Je sais pas, j'ai eu super peur d'un coup ! Et je suis partis comme une voleuse. »

Ma phrase se termina par une nouvelle vague de larmes et je me laissais tomber contre l'épaule de ma meilleure amie, la tasse tout contre moi pour me réchauffer. « Je suis un monstre... Elle va croire que je me suis fichu d'elle... Je pourrais plus jamais la regarder en face... » sanglotais-je encore et encore.

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Je me sens complètement perdue, je n'arrive plus à comprendre la situation, comment on peut passer d'une soirée merveilleuse, avec plein de sourires, de flirt et de joie, à un tel torrent de larmes, mêlée à de la peur et du dégoût. Dégoût de moi-même, jamais je ne pourrais ressentir ça pour Raylee, elle est parfaite, si douce, compréhensive, drôle et vraiment, mais alors vraiment trop sexy ! Plus j'y pense et revis cette scène qui a suivi notre baiser, plus je me dis que j'ai fait une connerie monumentale... Je tente d'expliquer à ma meilleure amie ce qui s'est passé, lui narrant toute l'atmosphère de notre dîner, les moments de complicité, ma main dans celle de la tatoueuse, notre virée à moto. J'aime de plus en plus cet engin, alors que j'ai toujours eu peur de monter dessus. Quand je voyais comment les gens de mon quartier roulaient, à Sacramento, ça me donnait envie de rester loin de tout ça, mais c'est plutôt grisant en vérité.

J'en arrive à la partie du baiser et Amelia bouillonne, hurlant à la mort en faisant sursauter Mabon qui devait être caché je ne sais où sous un meuble. J'acquiesce à la question rhétorique de ma compagne et mon visage se déforme à nouveau de chagrin alors que je dis avoir flippé, m'être sauvé en courant comme si j'avais peur d'être poursuivi par des animaux sauvages. Alors que... Bah non en fait, c'était simplement une femme merveilleuse, qui ne voulait que mon bonheur, que j'avais supplier silencieusement de m'embrasser en plus ! Mais quelle abrutie ! Mes  larmes coulent en revoyant  le visage de Raylee quand je l'ai repoussé, dernier souvenir que je gardais en mémoire... Son incompréhension, sa surprise, elle non plus ne savait pas ce qu'il m'avait pris !
Quel enfer ! Me voilà à pleurer comme une madeleine dans les bras de ma colocataire, comme on a si souvent dû le faire par le passé, trop expansives dans nos émotions, pour notre bien à toutes les deux. On partage toujours tout avec Amelia, je l'ai vue au plus mal, tout comme elle m'a ramassé de nombreuses fois. Mes joies sont les siennes, je prends tout et je lui offre tout, parce qu'elle est ma meilleure amie, mon double, ma vie. Sœurs unies par l'amour, la sorcellerie, nos pactes sont des serments inviolables.

Ma sorcière me caresse le dos, me serre contre elle et je me calme un peu, assez pour qu'elle ose ouvrir la bouche à nouveau. Elle est fière de moi... Elle est bien la seule en ce moment... Je hoche la tête en restant lové contre elle, m'écartant vivement en l'entendant dire que Raylee a fait voler la poubelle des voisins. « Quoi ? Elle... Vraiment ? Oh non... » Je ne m'en faisais pas pour nos voisins, ils avaient l'habitude qu'il se passe des trucs bizarres dans le coin, mais retrouver leur poubelle étalée partout sur la route ne ferait pas rire les employés municipaux... Raylee devait être sacrément en colère pour avoir un tel geste, je ne sais pas si je dois m'inquiéter d'être celle qu'elle imaginait en frappant ce pauvre objet...

Je suis tellement obnubilée par cette scène que je n'ai pas vue, seulement entendue sans l'associer à ma fuite, que j'en écoute à peine Amelia qui ne dit que tout ira bien. « Je... » Je ne sais pas trop quoi dire en fait, j'ai peur de ne pas être comprise, d'être une fois de plus jugée et condamnée sans avoir pu m'exprimer. Un peu comme mes ancêtres, accusées à tort pour servir un noir dessein... Et puis, je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche quand ses phrases me reviennent en tête, Amelia est déjà en train de me faire la morale, impliquant Tyler dans le coup. Lui est convaincu des sentiments de Raylee à mon égard et je le crois volontiers, parce qu'il est un homme et qu'il m'a déjà regardé comme le fait notre amie commune... Avant que lui aussi, je l'éconduise d'ailleurs... Je suis vraiment naze pour vivre des histoires d'amour en fait... Erf... L'amour... Était-ce cela ? J'avais déjà trop peur à l'idée de simplement tenir la main d'une femme, alors avoir ce genre de sentiments... Pourtant, je ressentais quelque chose de fort, j'avais envie de plus, d'être sa copine, d'avoir une excuse pour traîner avec elle autre que d'aller me faire tatouer toutes les cinq minutes. J'aurais plus de place à force...

« J'espère que tu dis vrai. Que vous ne vous trompez pas, avec Tyler. J'ai peur d'avoir tout gâché, si tu savais à quel point ça me terrifie... J'ai envie de tout lui dire pour qu'elle me comprenne, mais certains moments de ma vie sont trop douloureux... J'ai peur aussi qu'elle s'énerve contre une autre poubelle ou pire, si je lui parle de mon père... Elle va me prendre pour une nana à problèmes avec un père criminel ! » L'univers des gangs est dangereux, sale, effrayant, je n'ai pas envie d'impliquer Raylee dans tout ça... Quand ma meilleure amie est entrée dans ma vie, j'étais à peine sortie de ce milieu, ma mère s'était enfuie et nous avait trouvé un endroit plus sûr en ville, loin de l'influence du gang pour lequel mon père bossait. Mais Amelia  vu les ravages de cette expérience... Est-ce que ma jolie brune saurait m'accepter avec autant de failles ??

Ma soeurcière essuie une larme de plus sur ma joue et plaque ses deux mains avec fermeté, me faisant la regarder sérieusement dans les yeux. Je déglutis lourdement alors que je sais ce qu'elle va me dire... Et ça ne manque pas... Ses mots me font beaucoup de bien, je lui suis reconnaissante de me considérer comme cette amie si parfaite et je repose ma tasse pour venir enlacer Amelia de toutes mes force. « C'est toi qui es parfaite. Je n'sais pas ce que je ferais sans toi, je t'aime plus que tout. » sanglotais-je dans ses cheveux qui me chatouillent le visage. Je souhaite de tout mon cœur qu'elle ait raison, que tout ira bien, mais je ne sais pas par où commencer...

Ma partenaire à raison, je dois retrouver ma positivité, me poser tranquillement pour souffler, me recentrer, avant de me sentir prête à affronter mes démons, à vaincre ma peur, à tout mettre en œuvre pour me faire pardonner... « D'accord... Hey ! Je suis plus grande que toi, tu te fous de qui !? » m'offusquais-je en lui envoyant le petit coussin en forme de nuage blanc dans la tête. « Mais tu as raison, c'était beaucoup trop pour un seul soir... » Je prends une grande inspiration et expire doucement. « Au moins, je l'ai fait. I kissed a girl and I liked it. » paraphrasais-je les paroles de cette chanson des années 2000. Ça me fait un peu sourire, même si mes lèvres tremblent encore de ne pas être allées jusqu'au bout de leur démarche... J'attrape ma tasse de tisane et bois plusieurs gorgées. « Merci pour l'infusion, j'en avais bien besoin. Je termine et je pense que je vais aller au lit. Tu veux bien dormir avec moi encore ce soir ? » demandais-je presque timidement, alors qu'Amelia ne me refuserait jamais ce privilège, encore moins alors que je m'étais fait agressé il y a moins d'une semaine, pas après mon chagrin d'amour. Et puis tout simplement parce qu'on adore les pyjama parties  j'avais peur de me retrouver seule la nuit, à cause de mes cauchemars, mais aussi des esprits de l'immeuble qui allaient et venaient bruyamment quelques fois. De vraies commères sérieux ! Je n'ai pas la force de mettre toutes les protections nécessaires ce soir, et puis, j'aime bien certains fantômes qui gravitent autour de nous, bien que Madame Landon n'aime pas trop les tenues d'Amelia...