Je me suis toujours dit que chaque personne en ce bas monde en apprendrait toujours plus sur elle-même à mesure que le temps passe. Les rencontres, les expériences, les histoires. Tous ces facteurs qui nous permettent de nous construire et de devenir la personne que nous sommes aujourd'hui. J'ai toujours pensé de cette manière. C'est d'ailleurs pour cela également que je ne me suis jamais collé d'étiquette. Mon père pensait également de la même manière. Il a toujours fait de son mieux pour me faire comprendre que la première personne qui devait me plaire et que je devais aimer plus que n'importe qui ... C'était moi-même. Mes parents ont toujours été d'un grand soutien pour moi et je n'ai jamais manqué de rien. Nous ressemblions à une famille hippie, toujours en quête de nouvelles aventures. Grâce à eux, j'ai beaucoup voyagé dès mon plus jeune âge. Grâce à eux, j'ai appris à être tolérante, patiente et ouverte d'esprit. J'ai appris que la différence était sûrement l'une des plus belles choses sur cette Terre. Ils m'ont permis de vivre dans un monde illusoire où tout le monde s'acceptait et s'aidait. Un peu utopique, je vous l'accorde, mais avec cette vision des choses et de la vie, j'ai eu une enfance féerique.

C'est également avec cette conception de la vie que j'ai continué à grandir. Malheureusement, on apprend avec le temps que finalement, le monde est loin d'être aussi bienveillant. J'ai pu découvrir de mes propres yeux l'égoïsme, la jalousie, les mensonges et la manipulation. J'ai vu la tristesse dans les yeux de ceux qui se faisaient rabaisser et humiliés parce qu'ils n'étaient pas comme les autres. J'ai tenu des mains si fragiles que j'avais peur qu'elles ne se brisent si je les pressais un peu trop fort. J'étais sûrement la fille la plus naïve de mon lycée, mais cela m'importait peu. J'étais totalement en accord avec moi-même et je voulais que les autres sachent également ce que cela faisait. J'ai été beaucoup critiquée et moquée parce que j'avais cette attitude qui dérangeait. Mais une fois encore, j'ai appris à m'aimer telle que j'étais, alors les remarques d'autrui n'avaient aucune incidence sur moi. Au fil du temps, j'ai aussi appris qu'en grandissant, on gagnait en maturité et responsabilité. Les moqueries et mauvais regards se changeaient en compassion et rigolades. Après la majorité, la vie devenait de plus en plus simple. Se démarquer était ce qui pouvait arriver de mieux. Ne pas être un mouton, s'affirmer, avoir de la personnalité étaient ce que tout le monde cherchait. Le monde évolue d'une manière tellement illogique qu'il est parfois difficile de s'y retrouver. Je me suis dit plus d'une fois que si tout le monde avait été élevé comme je l'avais été, peut être que le monde se porterait bien mieux aujourd'hui.

C'est en pensant de cette manière que je me suis découverte une passion pour les enfants. Je voulais travailler à leur côté, faire de leur quotidien une aventure où ils apprendraient de nouvelles choses. Ils étaient notre futur après tout. Je tenais à leur montrer qu'il était possible de vivre en communauté et harmonie à la fois. Cette passion pour l'autre et l'humain m'a fait découvrir l'amour, le vrai. Ce poste en colonie de vacances anodin auquel j'avais postulé avec toute mon âme. J'allais découvrir ce que ça allait être de vivre avec des enfants à mes côtés tous les jours. J'étais excitée comme jamais, prête à vivre cette nouvelle expérience qui allait en dire long sur mon avenir. Après l'entretien, j'étais persuadée que je n'allais pas être prise. Je débordais tellement d'énergie que j'avais eu l'impression d'avoir épuisé le directeur en cinq minutes. Et pourtant, c'était ce qui lui avait le plus plu. Le contrat de deux mois signé, j'étais aux anges. Davantage lorsque j'avais croisé son regard. Il m'avait électrisé sur place. Je ne saurais pas vous décrire cet instant tellement il avait été unique et magique. Jamais, de toute mon existence, je n'avais ressenti une telle chose. Était-ce donc de cette étincelle dont me parlait mon père ? Mots doux, regards incessants et flirts à longueur de temps, j'avais l'impression de vivre un rêve éveillé. Il était important que j'aime la personne que j'étais, c'était comme ça que j'avais grandi. Mais jamais je n'aurais imaginé que la sensation d'être aimée par une autre personne était encore plus merveilleuse. Alors je lui ai ouvert mon cœur, mon âme, tout mon être. Nous nous sommes aimés comme jamais nous n'avions aimés quelqu'un durant notre existence. Je pensais que la vie était belle, que c'était beau d'aimer et d'être aimé. Jamais je n'aurais imaginé que c'était également ce qui allait me briser. La fin de la colonie signifiait également la fin de notre relation. Je crois ne jamais réellement avoir compris pourquoi nous devions nous séparer. Je me souviens juste amèrement de ce sentiment d'abandon soudain. Ce sentiment qui ne m'a jamais quitté depuis. Moi qui bouillais d'énergie et de bonne humeur, j'avais commencé à craindre la solitude. J'avais tellement peur de l'abandon, d'être à nouveau mise de côté que je m'accrochais d'autant plus à ceux qui m'entouraient. Tout ce qu'il me restait de lui était son collier qui ne se séparait jamais de mon cou.

J'ai tenté plus d'une fois de me reconstruire, de panser mes blessures et d'avoir à nouveau espoir en l'amour. Mais plus le temps passait, plus le mur autour de mon cœur s'épaississait. Je n'arrivais plus à ressentir ce que j'avais pu éprouver avec Noan. Ce n'était pas faute d'avoir essayé, de m'être ouverte, mais il était impossible pour moi de le faire sans craindre qu'on ne me lâche la main par la suite. C'est aussi à ce moment-là que Miles a croisé ma route. Peut-être que ma douleur était si visible qu'il avait eu envie de s'occuper de moi. Je ne savais pas ce qui l'avait poussé à posé son regard sur moi, mais une chose était sûre, lorsqu'il était là, j'avais moins mal. Il m'apaisait d'une manière que je n'arrivais pas à expliquer, alors je me suis accrochée toujours plus à lui au fil du temps. Je savais pertinemment qu'il était fou amoureux de moi, mais je n'arrivais pas à faire ressentir la même chose de mon côté. Mais il avait su être patient et compréhensible parce que je lui avais vaguement parlé de ce qui me bloquait. Si notre relation avait débuté sur une tolérance et un respect mutuel, elle semblait s'éteindre à mesure que les jours passaient. Nous étions ensemble davantage parce que nous en avions l'habitude... Mais aussi parce que Miles ne supporte pas de perdre. Persuadé que j'étais celle qui lui fallait, il ne voulait pas comprendre mes mots lorsque je tentais de mettre fin à notre relation. Sachant ce que cela faisait d'être abandonné, je ne voulais pas lui faire vivre une telle chose, alors je suis restée à ses côtés comme si de rien n'était. J'avais pris cette décision en même temps que ma prise de poste en tant que responsable animation dans l'hôtel de luxe près de la ville. Je pouvais enfin avoir le boulot de mes rêves, alors j'ai préféré me focaliser là-dessus, laissant les choses telles qu'elles, même si plus rien ne nous retenait l'un à l'autre.