En se levant ce jour-là, Carley savait qu'elle devait faire les courses, mais la motivation pour y aller manquait. Pourtant le réfrigérateur était complètement vide et le congélateur n'avait pas vraiment meilleure allure. Il fallait qu'elle fasse quelque chose, il fallait qu'elle fasse le ravitaillement, coûte que coûte. Pourtant, après s'être levé, alors qu'elle prend son petit-déjeuner, elle repousse le moment de partir, le repousse encore au milieu de la matinée, lézardant un peu dans son canapé. Ce n'était pas vraiment dans ses habitudes, elle ne se l'autorisait pas souvent, mais aujourd'hui… Sur le coup des onze heures, en jetant un regard à sa montre, elle se crispe. Il est tard, la faim commence à se faire sentir et elle n'a vraiment rien à cuisiner alors que le placard fait grise mine, la forçant à se nourrir d'un yaourt et d'une compote, le strict nécessaire pour ne pas tomber dans les pommes avant de se décider à mettre le nez dehors.

Évidemment aujourd'hui, le centre commercial est noir de monde et dans les allées du supermarché les articles ne sont pas aussi bien fournis ninaussi bien rangés qu'ils le sont d'ordinaire. Un bordel sans nom, manifestant l'irrespect humain qui n'est malheureusement plus vraiment à démontrer. Et en attrapant un sachet de salade déjà ouvert, elle adresse un regard consterné à l'employé dont elle croise le regard à ce moment-là. L'irrespect, disions-nous.

Des cris soudainement se font entendre. Des coups de feu. Son cœur bat à cent à l'heure. Peut-être bien qu'elle aurait finalement dû faire ses courses ce matin, peut-être bien qu'elle aurait dû ne pas repousser à plus tard ce qui pouvait être fait tout de suite. Une bonne leçon à retenir contre la procrastination. Si elle était partie aux courses à 10h comme prévu, voire même avant, elle n'en serait pas là. Elle ne sentirait pas ainsi son estomac se contracter et ses oreilles vrombir sous les cris de la foule. Elle ne sentirait pas son rythme cardiaque s'accélérer de la sorte. Elle ne sentirait pas son poul dans ses oreilles ni cette inquiétude qui vient se manifester dans son ventre et lui retourner l'estomac. Bordel c'était quoi ça ? Est-ce qu'elle venait vraiment d'entendre qu'ils allaient abattre des gens toutes les cinq minutes ? Oui. Elle avait parfaitement entendu ça. Et l'angoisse la paralyse alors qu'elle se planque sous les étalages du maraîcher.

« Mais oui moi aussi ! Fais leur encore un bisou de ma part, ouais, ça roule, mais oui promis, toi aussi hein ! Bise, ouaip, allez, mais oui on se rappelle, bisou, tchao, bye, bye bye bye ! » Impossible de raccrocher simplement quand j’ai mon frère au téléphone. Des deux, on croit souvent que c’est moi la grande sœur ! C’est pas péjoratif du tout ! C’est juste… des styles différents ? Une fois raccroché j’ai pu finir d’écrire le message que j’avais commencé pour Uriah, interrompue par James. Pincement de lèvre incontrôlé en relisant le contenu du message, et ça fini avec un sourire lèvres pincées. J’écrivais tout ça en levant la tête juste suffisamment pour ne heurter personne. Jusqu’à ce qu’on se fige tous en même temps.

Même si le bruit ne semblait pas provenir de la boutique d’à côté, ce n’était quand même pas bien rassurant. Je me mords une lèvre en évitant de jurer à voix haute. Un peu déçu de ne pas pouvoir aller au bout de mes achats… Mais surtout embêtée à l’idée que ce coup de feu ait pu blesser quelqu’un. Les agents de sécurité à proximité donnaient des indications qui consistaient à éviter la panique, maintenir le calme autant que possible. Mais peu de succès… Je regardais à droite à gauche, pour être sûre de n’avoir rien oublier, ou de ne croiser personne avec qui je pourrai m’enfuir. Pas le temps de rebrousser davantage le chemin que les agents du sécurité les plus proches nous imposent l’issue de sortie qu’ils indiquent. On passe d’un étage à l’autre. Notre progression se ralentie bien vite pour ne pas être aperçu du groupe armé. Comme je ne suis pas bien grande, c’était assez facile de suivre le mouvement de manière discrète auprès des différentes personnes embarquées avec moi dans cette situation.

J’essayais de maintenir ma respiration calme et régulière pour ne pas laisser le stress s’emparer de mon petit organisme. Petit mordillement de joue intérieur, mâchoire serrée pour être sûre de maintenir la tranquillité en façade extérieur. Jusqu’à ce que je croise son regard. Un regard comme je n'en connaissais pas d'autre. Celui de @Uriah Newell. Ma bouche s’ouvre comme si j’avais vu un fantôme, mes yeux s’écarquillent, et mon coeur s’emballe. C’était pas possible. Il pouvaient donc arriver que cette fusillade atteigne quelqu’un qui compte pour moi ? Enfin mais est-ce qu’il comptait vraiment pour moi ? Ce n’est pas le moment d’y penser Claire... Je commence à lui parler en insistant pour qu’il lise sur mes lèvres : « Qu’est-ce que tu fous là ?! » mais aucun son ne sortait de ma bouche juste expression faciale et mouvement de lèvres. « Ca va ? Pas blessé ? » Respiration accélérée. Je regarde à droite. A gauche. Hors de question d’aller plus loin avec ce groupe d’inconnus. Grande inspiration, mais avant de me jeter à l’eau et de réduire l'espace qui nous séparait je continue de prendre des informations en langage des signes accompagné d’un nouveau mime des lèvres : « Je-viens-vers-toi ». Dernière inspiration, dernière vérification à droite. A gauche. J'avançais penchée, le plus discrètement possible, en direction du chroniqueur.

C'est d'un pas nonchalant que je me balade dans les rayons du centre commercial. Panier dans une main, l'autre effleurant les différentes denrées alimentaires, je dois avouer que je n'ai aucune idée de ce que dont j'ai besoin et encore moins ce que je veux. Je sais que j'avais promis à Jake que je cuisinerais ce soir pour nous deux, mais je n'ai aucune idée de ce que je pourrais faire. Certes, mon frère n'est plus vraiment un adolescent mais à 20 ans il est loin d'être adulte et il garde encore ses habitudes de quand il avait 15 ans. Son alimentation n'est absolument pas variée, il ne mange aucun fruits et très peu de légumes, si bien que c'est quasiment mission impossible de faire un repas mangeable et équilibré en même temps. Soupirant, je laisse tomber une boîte de raviolis dans mon panier et m'immobilise pour observer son contenue. Et si je tentais quelque chose ? Je peux toujours essayer de faire des fajitas par exemple. Mais Jake déteste le goût et la texture de la tomate donc l'idée est très rapidement avorté. Secouant la tête, je me passe une main sur le visage puis continue mon chemin, me disant que je trouverais de l'inspiration dans le prochain rayon.

Mais, alors que j'allais bifurquer dans le rayons pâtisserie, j'entends un cris perçant puis des hurlements et des coups de feu. Instantanément, je lâche mon panier et porte ma main à ma hanche par reflex, grognant en me maudissant de ne pas avoir mon arme de service avec moi. Ma main n’effleure seulement mon badge montrant mon appartenance à la police, ce qui ne me sera d'aucune aide si ce n'est celle d'être exécuté plus rapidement.

Accroupie, je m'avance doucement et lance un coup d’œil au fond du rayon avant de reprendre ma cachette lorsque je vois une silhouette encapuchonné.  « Fuck...» soufflais-je entre mes dents, observant les alentours. Peut-être que je peux tenter un sprint pour sortir ? Je suis assez bon en course que je pourrais éventuellement réussir à les semer. Mais je ne connais rien d'eux, je ne sais pas comment ils sont armés et encore moins les intentions. Les prises d’otages sont horribles et stressante, mais souvent faire profil bas c'est ce qu'il y a de mieux à faire, non ?

Je décide toutefois de tenter le tout pour le tout et me faufile le plus discrètement possible le long du rayon. Arrivé au bout, je lance un coup d’œil vers la gauche et aperçois de nombreuses personnes prostrée et tremblant de peur. Vu la surface du magasin, je pense qu'il y a au moins 4 voire 5 assaillants. Du coins de l’œil, je perçois un mouvement et, tournant légèrement la tête, je vois une jeune femme rejoindre un autre homme et je soupire doucement lorsqu'elle le rejoint sans qu'un homme masqué ne la remarque. J'observe rapidement le couple, puis me recule et m'adosse contre le rayon pour sortir mon téléphone portable. Sans plus attendre je notifie les collègues de mon unité de ce qui se passe, précisant que je suis à l'intérieur, avant de vérifier une dernière fois que la voie est libre et courir vers le couple.

 «ça va, vous ? » leur demandais-je tout en lançant des coup d’œil à droite et à gauche  «à part les coups de feux vous avez entendu quelque chose ? Vu quelque chose ? » mon regard passe du jeune homme à la jeune femme  «Ou vu quelqu'un ? » je regarde derrière moi  «Je suis persuadé d'avoir vu un gars cagoulé avant... »

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