La réaction de Cassia, marquée par une adorable gêne et un amusement contagieux, m'extirpe un sourire, malgré la situation légèrement inconfortable dans laquelle nous nous trouvons. Sa manière d'esquiver mon regard, ponctuée de petites excuses murmurées, souligne combien ces instants imprévus contribuent à tisser des liens uniques et inoubliables entre nous. « Elle est posée sur la chaise, dans la chambre » je lui lance, ma voix se mêlant à la cascade d'eau, laissant transparaître un amusement certain, tentant de percer le murmure de l'eau pour atteindre ses oreilles.

Lorsqu'elle s'éclipse pour récupérer ma trousse, une vague de soulagement me traverse, tempérée par une pointe de déception face à son départ précipité. Son retour, trousse en main, évitant soigneusement mon regard direct, fait battre mon cœur plus fort – non pas à cause de l'onde froide qui parcourt mon corps sous la douche, mais bien par l'effet envoûtant de sa présence. « Merci, Cassia » je souffle, ma gratitude se mêlant à la brume chaude qui nous enveloppe, donnant à ma voix une intimité particulière.

Ce moment de complicité maladroite, loin de toute convention, nous rapproche d'une manière que je n'aurais jamais pu anticiper. La simplicité de cet échange, où un simple objet oublié devient prétexte à un rapprochement, me remplit d'une chaleur intérieure qui n'a rien à envier à l'eau chaude qui déferle sur moi. Cet instant suspendu, où le monde extérieur s'efface, ne laissant place qu'à Cassia et moi, me fait prendre conscience de la profondeur de nos liens. « Merci, Cassia, pour ce moment d'authenticité, pour ta gentillesse spontanée, et surtout, pour être la lumière dans les moments d'ombre »

Lorsque Cassia réapparaît après sa douche, vêtue de sa tenue de nuit, une vague d'admiration me submerge. Sa silhouette, enveloppée dans le tissu délicat de son pyjama, évoque une grâce et une beauté simples, mais profondément touchantes. La sérénité qui émane d'elle dans ce moment d'intimité partagée me captive, renforçant le lien invisible qui nous unit. Sa proposition humoristique de laisser quelques affaires chez elle pour prévenir de futurs oublis me tire un rire doux, chargé d'affection. « Tu sais, cela pourrait effectivement s'avérer judicieux » je lui réponds, adoptant un ton faussement sérieux, tout en laissant transparaître dans mon regard tout le sérieux que je porte réellement à cette suggestion.

L'atmosphère se charge d'une complicité douce, nos rires et nos regards partagés tissant autour de nous une bulle de confort et de sécurité. « Peut-être devrais-je considérer cela comme une invitation officielle à m'incruster plus souvent ? » j'ajoute, un sourire en coin, laissant la porte ouverte à toutes les possibilités que notre avenir commun pourrait nous réserver. La simplicité de ce moment, loin des tumultes de nos vies, devient un refuge précieux, un havre de paix où seuls comptent notre connexion et le bonheur partagé de ces instants volés à la routine.

Le jeu de mots de Cassia concernant l'effet qu'elle a sur moi provoque une chaleur inattendue sur mes joues, que je tente de dissimuler derrière un sourire assuré et joueur. « Il semble, en effet, que je ne puisse nier l'évidence de ton charme » je riposte, plongeant dans la légèreté de son humour avec délice. L'évocation du proverbe et sa malicieuse interrogation sur notre futur incident me poussent à un rire franc et joyeux. « L'avenir nous le dira » je concède avec un clin d'œil complice. « Le moment pourrait bien se présenter à nouveau, plus tôt que tu ne le penses » glissais-je, la voix teintée d'une promesse alléchante, mon regard pétillant de malice s'accrochant au sien. « Qui sait ce que la nuit nous réserve ? » ajoutais-je, flirtant ouvertement, laissant l'anticipation et le désir électriser l'air entre nous.

Mon regard se pose sur elle, empli de gratitude pour cette soirée singulière et merveilleusement intime. Je contemple l'avenir avec une curiosité teintée d'espoir, sachant que, quoi qu'il advienne, la présence de Cassia dans ma vie est un cadeau irremplaçable. « Merci, Cassia. Pour cette soirée, pour ton accueil chaleureux, et surtout, pour être simplement toi » je lui murmure, la voix empreinte d'une tendresse sincère, mes yeux exprimant tout l'amour et l'admiration que je ressens pour elle.

Malgré ce petit moment de gêne dans la salle de bain, la soirée continuait de se dérouler merveilleusement bien. Après être passés tous les deux à la salle de bain, nous étions à présent dans le salon. Je venais tout juste d’y rejoindre Milo. Et je n’avais pas pu m’empêcher de le taquiner un peu sur ce qu’il s’était passé dans la salle de bain un instant plus tôt. Après tout il y a un proverbe qui dit : qui aime bien châtie bien. Et ce dicton nous le mettions en œuvre depuis que nous nous connaissions, c’est à dire depuis plus de vingt ans maintenant. Et dans ces taquineries légères j’avais suggérer à Milo de laisser quelques affaires lui appartenant à la salle de bain, afin d’éviter à nouveau ce genre de situation gênante. On plaisantant, mais après tout cela n’était sans doute pas une si mauvaise idée que cela. D’ailleurs, mon meilleur ami suggéra de considérer, peut-être, cela comme une invitation officielle à venir ici plus souvent. « Oui, peut-être... » dis-je un léger sourire aux lèvres afin de laisser planer le suspens. La réponse était évidente, sinon je n’aurai absolument rien proposer.

De merveilleuse humeur malgré la petite gêne de tout à l’heure, j’avais émis une ou deux plaisanterie sur ce qu’il s’était passé à la salle de bain. La réponse de Milo me fait sourire. « Je le savais… que j’étais irrésistible... » dis-je avec un ait faussement sûr de moi. Et quand Milo m’avoue qu’un potentiel futur ‘’incident’’ pourrait arriver en effet et plus tôt que je ne le pensais, mon regard se plonge dans le sien. Étrangement, cette idée ne me gênait plus. Bien au contraire, elle provoquait en moi une légère vague de chaleur, quelques papillonnement dans le bas ventre. « Me voilà prévenue alors... » dis-je dans un léger murmure, mon regard toujours accroché au sien. « Qui sait ce que la nuit nous réserve ? » Un énième sourire apparaît sur mon visage. Un sourire qui voulait en dire long sur ce que je pensais des paroles de mon ami.

Entre nous, cette tension si électrique était de nouveau bien présente. Ce petit jeu du chat et de la souris auquel nous avions cessé de jouer pendant un certain temps était à nouveau en place. Milo me remercie pour cette soirée, pour mon accueil et tout simplement pour être moi. « Tu n’as absolument pas à me remercier Milo. Après toutes les fois où tu m’as accueilli chez toi… c’est plus que normal. Et puis ça me fait vraiment plaisir de t’avoir ici, avec moi. » Mon regard dans le sien « C’est moi qui te remercie pour tout ce que tu as fait pour cette douce soirée... » Le dîner, le bouquet de fleur, ces belles conversations partagées. Tout. Et en posant mon regard sur sa main, je viens prendre délicatement celle-ci dans la mienne. « Comment va ta main ? Tu n’as pas trop mal ? » demandai-je soucieuse de savoir comment cela avait évolué depuis tout à l’heure. Le bout de mes doigt viennent alors caresser délicatement le contour du pansement. Un léger effleurement pour m'assurer que tout était à sa place, que tout allait bien.

La sollicitude et la prévenance de Cassia, qui transparaissent dans chacun de ses gestes, nourrissent profondément mon estime pour elle. Sa préoccupation pour l'état de ma main blessée, manifestée par ses délicates attentions, réchauffe mon cœur. À son effleurement, je feins une grimace de douleur, amplifiant la scène pour attirer son attention. « Il me semble qu'un anesthésiant s'impose… » murmure-je, capturant ses lèvres dans un baiser furtif, qui, bien que bref, est empreint d'une promesse de plus. Ce contact, léger et provocateur, laisse un désir inassouvi flotter entre nous. « Il se pourrait que je doive revenir la semaine prochaine pour continuer le traitement… » lâchais-je, laissant entendre le prétexte parfait pour notre prochaine rencontre. « Crois-tu que mon infirmière favorite sera au rendez-vous ? » je lance, l'air de rien, m'installant confortablement sur le canapé, ma tête trouvant refuge sur ses genoux. Cette proximité, quoique imparfaite pour mon dos, me paraît idéale. La présence de Cassia, sa chaleur, son parfum, tout en elle me comble et me contente pleinement.

L'aveu que je fais à Cassia, concernant le thérapeute à New-York, révèle plus qu'une simple anecdotique mésaventure. C'est une confession de ma volonté réelle de transformation. « Je me suis rendu compte que ce n'était pas le bon chemin, continuer à le voir aurait été contre-productif. » Mon silence, qui suit, est lourd de réflexion et d'introspection. Puis, cherchant à alléger l'atmosphère, j'ajoute en riant légèrement « Apparemment, je ne laisse personne indifférent ! » Mais derrière cette plaisanterie se cache une vérité plus profonde, un désir sincère de changement.

« Cassia, il y a quelque chose d'important que je dois te dire… » Ma voix se fait plus sérieuse, marquant l'importance de mes prochains mots. « J'ai réalisé à quel point je veux changer. Pas seulement pour moi, mais pour toi, pour nous. Je veux construire quelque chose de solide, quelque chose qui puisse te rendre heureuse, loin de toute souffrance. » Le spectre d'Andrew plane un instant dans ma pensée, mais je le chasse aussitôt. Je refuse d'être cet homme qui apporte le malheur, qui agit par égoïsme ou par caprice. Ma déclaration d'hier soir, loin d'être un simple élan du cœur, était une promesse, un engagement. « Quand je t'ai dit de le quitter, de le quitter pour que je puisse t'appartenir pleinement, je le pensais de tout mon cœur. » Ces mots, prononcés avec une sincérité vibrante, se veulent être le socle sur lequel construire notre avenir. Un avenir où mon changement ne serait pas seulement un souhait, mais une réalité tangible, pour elle, pour nous.

En voyant sa main blessée, j’avais demandé à Milo comment allait cette dernière et si il n’avait pas trop mal. Toujours soucieuse de son bien-être. Le pilote de ligne me répond qu’un anesthésiant s’imposait avant de capturer mes lèvres pour un furtif baiser. Ces remarques me font rire de bon cœur. « Je pense qu’elle sera au rendez-vous... » Je reprends mon sérieux avant d’ajouter « Plus sérieusement, fais attention les prochains jours.. Et il faudra retirer les fils dès le week-end prochain. Je pourrai m’en charger... ». Je laisse Milo s’installer sur le canapé, sa tête sur mes genoux.

La conversation glisse ensuite sur sa volonté profonde de changer son comportement vis à vis de la gente féminine. Apparemment l’idée du thérapeute n’était pas une si bonne idée que cela. Milo m’avoue avoir vite cesser de voir le spécialiste. Je l’écoute alors, ma main caressant délicatement ses cheveux. Et un rire franc émane de ma bouche quand Milo plaisante sur le fait qu’il ne laissait personne indifférent. « Décidément… ton charme n’a donc aucune limite... » dis-je amusé par sa plaisanterie.

Milo m’annonce ensuite avoir quelque chose d’important à me dire. Son ton est plus que sérieux. Je ne sais pas si cela est bon signe ou non. « Je t’écoute... » dis-je avec une voix peu rassurée. Mon meilleur ami m’avoue qu’il avait réalisé à quel point il souhaitait changer, pour lui, pour moi et surtout pour nous. Ses paroles me touchent au plus haut point. Milo évoque notre conversation furtive de l’autre soir, le moment où il m’avait demandé de quitter Andrew. Milo avait apparemment à cœur que je sache que ses paroles n’étaient pas anodines. Elles étaient réellement pensées et souhaités par le jeune homme. Ses mots me font également réfléchir de mon côté. Il est vrai que depuis que j’avais donné une énième chance à Andrew les changements avaient été visibles surtout les premiers temps. Andrew était déjà reparti dans ses vieux travers. « Je le sais Milo… Et, quand ce jour arrivera, quand tu me diras être prêt... Alors je le quitterai... » Mes paroles étaient également des plus sincères. « J'ai un aveu à te faire, je me sens extrêmement rassurée de voir à quel point tu souhaites changer. Et j'ai toute confiance en toi... » Oui peut-être que Milo ne croyait pas en lui, en tout cas moi j'étais certaine que ce changement il en était capable.

La sincérité dans la voix de Cassia, lorsqu'elle parle de me laisser retirer les fils et de prendre soin de ma main blessée, renforce ce lien unique que nous partageons. Son rire, léger et joyeux, en réponse à mes plaisanteries, éclaire mon cœur d'une chaleur réconfortante. « Ah, si seulement mon charme pouvait résoudre tous nos problèmes » je réplique, un sourire en coin, appréciant son rire comme une douce mélodie.

Lorsque Cassia m'écoute annoncer mon désir de changement, je sens toute l'importance de cet instant. Son attention, sa main dans mes cheveux, tout contribue à me faire ressentir une proximité émotionnelle profonde. Sa réaction à mon aveu, mêlée d'amusement et de soutien, me rassure et me motive. « Je n'ai peut-être pas de limite à mon charme, mais je veux que mon cœur n'en ait que pour toi » je lui confesse, cherchant son regard pour y lire sa réaction.

La gravité de son écoute, lorsqu'elle accepte l'idée de quitter Andrew le jour où je me sentirai prêt, me bouleverse. Sa confiance en ma capacité de changement, en nos futurs possibles, m'encourage et me fait prendre conscience de l'ampleur de mes sentiments pour elle. « Je te promets, Cassia, que ce jour arrivera. Tu seras la première informée ! » je lui assure, ma voix empreinte d'une détermination renouvelée.

Son aveu, quant à sa confiance en moi et en mon désir de changer, me touche profondément. « Ta confiance en moi est le plus beau des cadeaux, Cassia. Elle me donne la force de devenir l'homme que tu mérites » je lui réponds, mes yeux plongés dans les siens, cherchant à lui transmettre toute la sincérité et l'amour que je ressens.

Le confort de sa présence, sa tête reposant sur mes genoux, crée un moment de paix et de connexion rare. « Et je suis sérieux pour les soins... Je veux que tu sois celle qui prend soin de moi, dans tous les sens du terme » je poursuis, moitié en plaisantant, moitié sérieux, désireux de partager avec elle chaque instant de ma vie, chaque étape de mon évolution. « Embrasse-moi... » lui demandai-je tendrement. « Tes lèvres m'ont manqué toute la semaine, Cassia... » Cet aveu, si sincère, révèle la force de mes sentiments pour elle. Chacun a ses faiblesses, et les miennes portent son nom.

Ma question semble suspendre le temps, un instant de curiosité teinté d'une innocence feinte. « Cassia, si jamais, dans un avenir où tout est possible, tu envisageais de te fiancer, as-tu déjà songé au cadre idéal pour une telle demande ? » Mes mots flottent dans l'air, chargés d'une légèreté apparente, masquant à peine l'intérêt profond que je porte à sa réponse. Mon regard, captif du sien, cherche à déceler dans ses yeux une lueur, une étincelle qui trahirait ses rêves les plus secrets. « Imagine un lieu qui te ressemble, qui résonne avec l'essence de qui tu es. Où te verrais-tu, dans les bras de quelqu'un qui te chérit, entendre ces mots qui promettent un avenir à deux ? » Je m'approche doucement, réduisant l'espace entre nous, chaque mot prononcé est une tentative délicate de naviguer dans les méandres de son cœur, espérant secrètement qu'elle puisse y voir un avenir où nous pourrions être les protagonistes principaux de cette scène tant convoitée.

Milo venait de me faire part de sa volonté profonde de changer. Pour nous. Même si lui doutait peut-être de ses capacité à le faire, moi pas. J’avais toute confiance en lui. Et dans ces douces confidences, je lui avoue que le jour où il sera prêt, je quitterai bien entendu Andrew. Il n’était pas question que les efforts de Milo soient vains. Les paroles de Milo sont douces et pleines de promesses. Alors quand ce dernier me promet que le jour où il aura changer, et que ce jour arrivera, je serais la première informée, un tendre sourire prend possession de mes lèvres. « J’ai hâte que ce jour arrive... » avouai-je dans un léger murmure, rêveuse et envieuse.

Le pilote de ligne m’affirme être sérieux concernant ses soins. J’esquisse un léger sourire « Cela est parfait, car je veux justement être cette femme là... » Oui celle qui prendra soin de lui peu importe le lieu ou le moment. Milo me demande alors de l’embrasser en m’avouant que mes lèvres lui avaient manqué toute la semaine. Je penche alors délicatement mon visage pour déposer un tendre baiser sur ses lèvres. Mais où donc sont passées les limites ? On se le demande.


Puis Milo redevient davantage sérieux, évoquant un sujet pour le moins inattendu. Surprise par sa question je trouve difficilement quoi répondre dans un premier temps. « Tu connais mon côté fleur bleue… Oui j’y ai déjà songé... » Peut-être d’ailleurs est-ce que chaque femme un jour y a déjà songé ? C’est fort probable. « H’m… dans mes rêves les plus fous, je me dis que rien ne serait plus romantique qu’une demande lors d’un beau voyage…Lors d’une belle escapade en tête à tête dans un lieu atypique... Lors d'un magnifique couché de soleil. Tu sais ceux qui donne une légère teinte rosé ou orangé à tout l'horizon... » Une idée me vient en tête « Pourquoi pas lors d’un séjour en Italie… Après tout on dit que c’est le pays du romantisme... » dis-je un léger sourire aux lèvres. Mais finalement le plus important ce n’était peut-être pas le cadre. « Mais tu sais, je ne sais pas si c’est le cadre qui rendra la demande plus belle ou inoubliable. Le plus important c’est sans doute la personne qui fait la demande... » Et si cette personne est celle avec qui on souhaite passer ce cap.

Cassia, fleur bleue ? Non à peine. Il faudrait être sourd et amnésique pour ne pas s’en rendre compte et l’oublier. De toutes les personnes que je connaisse, Cassia demeure la personne la plus fleur bleue, la plus romantique. Je sais que de simple petite attention lui font plaisir, comme ce dîner. Malgré mon absence et la distance qui s’opère désormais entre nous, je tiens à ce que toutes nos retrouvailles se déroulent sans encombre. C’est-à-dire : sans Erin et surtout sans Andrew. Certes le début de ce weekend demeure houleux, mais j’ai l’impression qu’il se termine plutôt bien. En écoutant la réponse de Cassia, j’acquiesce dans le plus grand des silences afin de la laisser s’exprimer. Je n’ai pas envie de la couper, de réduire ses envies au silence. Une demande en mariage lors d’un coucher de soleil dans un endroit atypique… Suis-je réellement étonné ? Absolument pas. Cassia précise également qu’un séjour en Italie serait idéal. Intérieurement je commence déjà à élaborer des plans dans tous les sens avant de reprendre mes esprits. « Hmm… Je prends bonnes notes de tout ce que vous me dites Madame Davis ! » ajoutais-je en pinçant mes lèvres contre elles-mêmes. Heureusement que nous n’en sommes pas, encore, à ce point dans notre relation. Etrangement cette projection de l’avenir m’inquiète. Je ne suis déjà pas prêt à me poser durablement avec quelqu’un alors un mariage…

La douceur de cette soirée enveloppe la pièce, créant un cocon de tranquillité autour de nous. Allongé dans le lit de Cassia, à l'endroit même qui me semble désormais naturellement attribué, je me sens incroyablement proche d'elle, malgré le silence confortable qui nous entoure. Elle est plongée dans son livre, absorbée par les mots qui dansent sous ses yeux, tandis que je lutte contre le temps qui semble s'accélérer, voulant étirer chaque instant passé à ses côtés. Je grogne légèrement en consultant mon téléphone, mécontent que l'heure avance si vite. La réalité de mon départ imminent pèse lourdement sur mon cœur. Je dépose un baiser tendre sur sa joue, frôlant délicatement le coin de ses lèvres, cherchant à capturer l'essence de ce moment parfait. C'est une promesse silencieuse que je lui fais, celle de revenir, de recréer ces instants précieux encore et encore. Je me résigne à ne pas la déranger davantage dans sa lecture, reconnaissant qu'elle mérite ce moment de paix, cette évasion dans les pages de son livre. Le son des pages qui se tournent se mêle à la quiétude de la nuit, berçant mes pensées vers un sommeil inévitable. Je m'endors paisiblement, emporté par le rythme apaisant de son monde littéraire, avec l'espoir secret de reprendre là où nous nous sommes arrêtés, de continuer à tisser ces liens indéfectibles qui nous unissent.

Dans cet espace intime et personnel qu'est le lit de Cassia, je trouve un refuge, une promesse d'avenir. C'est ici, dans cette proximité silencieuse, que je comprends la profondeur de mes sentiments pour elle. Et tandis que je glisse dans le sommeil, c'est avec la certitude réconfortante que, peu importe où la vie nous mène, ces moments partagés resteront gravés dans nos cœurs, un rappel constant de l'amour et de la connexion que nous partageons.

Alors que la nuit enveloppe la pièce d'une obscurité rassurante, mon esprit, lui, s'égare dans un labyrinthe de pensées tumultueuses. Tournant et retournant sous les draps, je lutte contre les images cauchemardesques qui m'assaillent. Mon sommeil est peuplé de scènes déroutantes, où les frontières entre le désir et la peur s'estompent. Chuchotant des noms dans la nuit, ceux de Cassia, d'Andrew, et d'Erin se mêlent dans un murmure tourmenté, trahissant l'agitation de mon esprit.

La température semble monter, une chaleur étouffante envahit le lit, accentuant l'impression d'oppression qui m'envahit. Mes rêves se transforment en visions d'un avenir terrifiant : moi, paré de mon plus élégant costume, face à une réalité inimaginable. Erin, dans une robe de mariée, avançant vers moi avec un sourire triomphant, tandis qu'au loin, de l'autre côté de la rue, le spectacle déchirant de Cassia, radieuse mais au bras d'Andrew, sortant de la mairie. Mon cœur rate un battement, l'angoisse me noue l'estomac, les images s'entremêlent dans une danse macabre qui me glace le sang.

Soudain, un sursaut me tire de ce cauchemar, mes yeux s'ouvrent sur la réalité de la chambre plongée dans le calme de la nuit. Un souffle court, je tente de reprendre mes esprits, le soulagement de constater que ce n'était qu'un mauvais rêve tempère à peine la panique qui m'avait emparé. Mon regard se porte instinctivement vers Cassia, cherchant la confirmation de sa présence, un ancrage dans la réalité. Elle dort, un havre de paix dans la tempête de mes émotions.

Avec la plus grande précaution, je m'extrais du lit, conscient du désordre que mon agitation nocturne a causé. Les draps, témoins de ma lutte intérieure, sont en désarroi, comme mon cœur. Silencieusement, je me dirige vers la salle de bain, en quête d'un réconfort dans la fraîcheur de l'eau, espérant laver les résidus de ce cauchemar et retrouver un semblant de paix.

Malgré avoir été plus ou moins prise au dépourvu par la question de Milo, j’y réponds. Et je dois même avouer que petit à petit je prends même un certain plaisir à imaginer ce moment. Mais est-ce que ce moment parfait existe vraiment ? Je ne saurais le dire. Tout ce que je sais c’est que sans doute là dedans, le plus important était la personne qui ferait la demande.

Nos discussions continuent, mais dans la chambre cette fois-ci. Puis je m’octroie un moment de détente en me plongeant dans un bon roman comme j’aimais si souvent le faire. De temps en temps, le temps de lecture est rapidement interrompu par un baiser ou deux. Ce moment est paisible, et cela me fait un bien fou. Quand le sommeil commence à me gagner, je tourne légèrement le visage vers mon meilleur ami. Et ce que je vois m’extirpe un doux sourire. Milo avait déjà rejoint les bras de Morphée. Il était là, endormi et semblait si paisible. Avec tout la délicatesse du monde, j’éteins donc les lampe de chevet et me couche à mon tour afin de commencer ma nuit.

Mes yeux s’ouvrent difficilement. Aucune réveil n’a sonné, la nuit n’était pas pas terminée. Je me tourne et je suis surprise de constater que la place à mes côtés est vide. Je fronce légèrement les sourcils, perplexe par cette absence.  Je me lève alors du lit pour quitter la pièce afin de ma mettre à la recherche de Milo. La lumière provenant de la salle de bain m’indique immédiatement où se trouve mon meilleur ami. Je me dirige donc vers le pas de la porte de cette dernière. « Milo ? » Il était bien là, venant de se rafraîchir un peu. La sensation que quelque chose n’allait pas était présente. Je m’approche du jeune homme et pose délicatement ma main sur son dos « Est-ce que tout va bien ? » demandai-je soucieuse. Je me demandais bien pourquoi il était debout à une heure aussi tardive.

L'eau fraîche sur mon visage agit comme un catalyseur, dissipant les vestiges du cauchemar qui m'avait enveloppé. La fraîcheur revitalisante me ramène doucement à la réalité, loin de l'angoisse qui avait serré mon cœur dans son étau. Alors que je tente de me ressaisir, la soudaine proximité de Cassia me surprend, me faisant légèrement sursauter. Sa présence, si rassurante, si réelle, dissipe instantanément les ombres de mon esprit. Elle est ici, avec moi, et non pas éloignée dans les bras d'un autre.

Malgré le soulagement que m'apporte sa proximité, l'image de Cassia, épanouie et complice avec Andrew, continue de hanter les recoins de mon esprit. Un regard rapide vers sa main gauche confirme l'absence de bague, un soupir de soulagement m'échappe. C'était bien un cauchemar, une peur infondée qui ne se réalisera pas. Je me force à hocher la tête, tentant de minimiser mon trouble, de dissimuler la véritable source de mon agitation. « Oui, oui... Je... Non, rien » je balbutie, me dérobant à ses questions inquisitrices.

Ses yeux scrutateurs cherchent les miens, cherchent la vérité que je réticence à partager. Cassia me connaît trop bien, elle perçoit le non-dit, l'incohérence entre mes mots et l'agitation qui m'anime. « J'ai... J'ai rêvé que je me mariais avec Erin » je me résous à dire, détournant adroitement la conversation de son véritable cauchemar. La demi-vérité s'échappe de mes lèvres, un voile pour protéger Cassia de l'ampleur de mes craintes, de la douleur que l'idée même de la perdre au profit d'un autre m'inspire.

L'espace d'un instant, nos regards s'entrelacent, une conversation silencieuse se tissant entre nous. Dans la chaleur de la salle de bain, avec l'humidité comme témoin de notre intimité, je me sens vulnérable, exposé, mais en sécurité à ses côtés. « C'était juste un cauchemar... Mais je suis là, avec toi, maintenant » je murmure, cherchant dans son regard une lueur de compréhension, un signe de réconfort. La nuit peut être peuplée de monstres, mais tant que Cassia est près de moi, je sais que je peux les affronter.

Dans ses yeux, je perçois une persistance, un savoir implicite qu'elle reconnaît mon hésitation, ma réticence à tout révéler. Tenter de dissimuler la vérité à Cassia est un exercice futile ; elle voit à travers mes demi-vérités avec une aisance déconcertante. Je pourrais facilement forger une explication plus légère, quelque chose pour détourner son attention, mais cela serait injuste. Cassia mérite l'honnêteté, même si elle dévoile mes peurs les plus profondes. « J’ai rêvé que tu te mariais avec Andrew… » je lâche finalement, ma voix portant une vulnérabilité que j'essaie rarement de montrer. « Mais ce n’est qu’un rêve, non ? » Cette question, formulée avec une pointe d'espoir teinté de crainte, cherche dans ses yeux une assurance, une confirmation que cette vision ne deviendra jamais notre réalité. La peur que cet homme, que je ne peux que qualifier de nuisible, puisse un jour briser le bonheur de Cassia, m'angoisse plus que je ne saurais l'admettre. Mon cœur bat rapidement, non pas à cause de l'eau froide qui perle encore sur ma peau, mais face à l'incertitude de sa réponse. Ce moment d'aveu, aussi effrayant soit-il, est crucial. Je cherche dans son regard, non seulement la réassurance que mes craintes sont infondées, mais également la promesse silencieuse que notre lien est plus fort que les intrigues d'un cauchemar. « Tu ne vas pas... » Ma voix s'effiloche, incapable de terminer la question. L'idée même de la perdre au profit d'un avenir où je ne suis pas à ses côtés me glace le sang. Dans cette salle de bain, enveloppé dans la vapeur et la proximité de Cassia, je me sens simultanément exposé et protégé. Ce moment d'ouverture, de partage de mes peurs les plus intimes, renforce mon besoin de la garder près de moi, de lutter contre les ombres qui menacent de nous séparer.

L’absence de Milo dans le lit m’avait intriguée. Alors sans attendre j’étais venue le retrouver. Là, dans la salle de bain. Surprise et perplexe par le fait qu’il soit debout, je lui avais demandé si tout allait bien. Milo, dans un premier temps, me confirme que oui mais le fait qu’il ne sache pas réellement me répondre m’intrigue au plus au point. Rien ? Non il n’y avait pas rien. Mon regard cherche le sien, l’incitant alors à me parler. Le pilote de ligne finit par me confier alors sa tourmente. Un mauvais rêve. Un mariage avec Erin. « Oh... » Oui je ne peux cacher ma surprise. « Oui c’était juste un mauvais rêve... » dis-je pour accompagner ses mêmes mots et ainsi le réconforter davantage. Mais mon sixième sens me faisait penser que Milo ne me disait pas tout. Cet aveu concernant Erin n’était pas complet. Finalement, mon meilleur ami continue. Lui marié avec Erin et moi à Andrew. J’étais un peu perplexe. Si Milo avait rêvé d’un tel évènement c’est que cela devait vraiment le travailler, dans son subconscient. « Milo… Ce n’était qu’un rêve. Regarde... » et je montre alors mon annulaire gauche dépourvu d’une quelconque bague. Malgré que tout ceci ne soit issu que d’un mauvais rêve j’avais la sensation que ça affectait beaucoup Milo. Plus que je ne l’imaginais. Mon meilleur ami ne semblait pas soulagé que les images qu’il avait pu voir ne soient le fruit que de son imagination. Je me rapproche alors du pilote de ligne, encadre son visage de mes douces mains, caressant ce dernier délicatement avec le revers de mes pouces « Je ne vais pas l’épouser… Ce n’est pas dans mes intentions. Et je pense que ce n’est même pas dans les siennes... » Nous n’avions jamais parlé de ce genre e projet avec Andrew.

Je viens déposer un baiser rassurant sur sa joue tout en lui adressant un doux sourire « Je te le promets...». Et si il le fallait j'étais prête à lui répéter encore et encore que non je n'allais pas épouser Andrew. Si il fallait que je le fasse pour être certaine que Milo passe une bonne fin de nuit, alors je le ferai.

La manière dont Cassia réussit à apaiser mes tempêtes intérieures reste pour moi un mystère des plus doux. Lorsqu'elle pose délicatement ses mains sur mon visage, je sens une vague de sérénité m'envahir, comme si, par ce simple contact, elle avait le pouvoir d'effacer toutes mes angoisses. L'absence d'une alliance sur son doigt gauche, symbole de liberté et de choix non encore scellés, me remplit d'une gratitude silencieuse, tandis que ses paroles, empreintes de sincérité, agissent tel un baume apaisant sur mon cœur tumultueux.
La perspective de la perdre au profit d'un avenir façonné par d'autres mains que les nôtres m'avait terrifié au-delà de l'imaginable. Et dans cette salle de bain, enveloppé par la chaleur de sa présence, l'idée fugace de la demander en mariage traverse mon esprit. Une impulsion née de la peur, de l'amour, et du désir de l'ancrer à moi, de nous ancrer à un futur où nous sommes inséparables. Pourtant, je retiens cette envie, conscient que le timing, l'espace, nos circonstances actuelles ne s'y prêtent pas.

Son baiser, doux et réconfortant, éclipse les résidus de mon cauchemar, transformant cette nuit en un havre de paix retrouvé. « Je suis désolé… » mes mots sont un murmure, une confession de ma vulnérabilité face à la peur de la perdre. « J’ai eu peur… Peur de te perdre… » Ces aveux, bien que difficiles, me libèrent d'un poids, me permettant d'accepter cette peur comme une partie intégrante de mon amour pour elle. La serrer dans mes bras devient plus qu'un besoin ; c'est une affirmation, un engagement silencieux que, quelles que soient les épreuves, je serai là, pour elle, avec elle. La notion de la mort m'est indifférente, tant que Cassia reste à mes côtés, en sécurité, épanouie. Mon propre bonheur semble désormais intrinsèquement lié au sien, révélant la profondeur de mes sentiments et la sincérité de mon engagement envers nous, notre avenir ensemble.

Retournant dans l'étreinte sécurisante du lit, je me blottis instinctivement contre Cassia, cherchant dans sa proximité un réconfort face aux ombres de la nuit. Malgré le peu d'heures restantes avant l'aube, mon besoin de me sentir proche d'elle surpasse toute envie de sommeil. La prise de Morphée sur moi devient incertaine, tandis que je me perds dans l'observation silencieuse de Cassia à mes côtés. Sa présence, si paisible et rassurante dans l'obscurité, offre un contraste saisissant avec les visions troublantes qui m'ont arraché au sommeil. La pensée de Cassia unie à Andrew dans les liens du mariage m'est insupportable, un cauchemar bien plus terrifiant que tout ce que la nuit pourrait m'offrir. L'idée même provoque en moi une révolte intérieure, un mélange de dégoût et de peur à l'idée de perdre celle qui incarne tant à mes yeux.

Le tic-tac de l'horloge rythme mon insomnie, chaque heure qui passe me semblant une éternité. Immobile, je reste allongé à ses côtés, cherchant en vain le sommeil qui refuse de m'envelopper de nouveau. Finalement, l'aube pointe, marquant l'heure de s'éveiller. Je me lève avec une légèreté de pas, prenant soin de ne pas troubler le sommeil paisible de Cassia. Direction la salle de bain, où je procède à mes rituels matinaux, me rappelant au passage sa proposition d'hier : laisser quelques affaires ici. C'est donc avec un petit sourire que je décide d'y laisser un signe de ma présence, une trace tangible de mon passage.

Je prends un post-it et, d'une écriture hâtive mais chargée d'émotion, je laisse un message qui se veut à la fois rassurant et teinté d'humour : je suis toujours là, dans un coin de ton cœur. À côté, je dépose l'un de mes tee-shirts, espérant qu'il lui apporte un peu de réconfort en mon absence.

Avant de franchir le seuil de la porte, je ne peux m'empêcher de revenir sur mes pas, attiré par la douceur de son sommeil. Je m'approche silencieusement du lit, dépose un baiser empreint de tendresse sur ses lèvres et effleure sa joue du bout des doigts. « Je te promet de revenir très vite » murmure-je, espérant que ces mots la rejoignent dans ses rêves. Avec un dernier regard chargé d'émotion, je quitte la chambre, emportant avec moi la promesse d'un retour imminent.

Le sommeil de Milo avait donc été perturbé par un mauvais rêve des plus surprenants. Un mariage. Ou plutôt deux mariages. Cela avait affecté, je le voyais bien, mon meilleur ami. Alors j’étais la plus rassurante possible envers lui. Tout ceci n’était qu’un rêve. Et je n’avais pas l’intention d’épouser Andrew. A mon tour donc, d’avoir des paroles et des gestes rassurants pour apaiser les craintes de la personne que je considérais comme mon âme sœur. Afin de l'aider, si possible, à retrouver un paisible sommeil.


Quelques semaines plus tard.
Milo était en ville pour le week-end. Il était arrivé hier soir et logeait donc dans mon appartement pour son court séjour. Comme c’était le cas depuis un certain temps. Andrew lui, n’était pas là ce week-end. Il cumulait les nombreux rendez-vous d’affaires pour le travail. Le week-end s’annonçait donc merveilleusement bien. Et il avait d’ailleurs très bien commencé. Nous avions dîner en ville la veille avec Milo, puis nous avions profité du temps clément pour aller se promener un peu en ville. Nous avions ensuite été boire un verre dans un bar où un petit groupe de musique bien sympathique jouait. Ce matin, nous avions un peu procrastiné. Mais comme le dit le proverbe : tous les bonnes choses ont une fin. En milieu de matinée, Milo avait souhaité sortir histoire de se dégourdir un peu les jambes et s’octroyer une séance de sport. Quant à moi, j’étais sortie de mon côté pour faire quelques courses.

En rentrant à l’appartement, tout était calme. Milo n’était pas encore rentré. Je range alors rapidement les courses. J’allume ensuite ma petite enceinte installée au salon pour mettre un fond de musique et me décide à m’afférer à une tache que je ne portais pas dans mon cœur : le linge. Ma dernière lessive étant sèche je ne pouvais reculer devant l’évidence même : il fallait tout plier et ranger. Je m’installe donc tranquillement, fredonnant les airs de musique qui pouvaient s’enchaîner. La musique avait toujours été un bon moyen pour moi de trouver une motivation certaine. La porte de l’entrée s’ouvre et se referme immédiatement. Milo était de retour. Un sourire apparaît sur mes lèvres. « Alors, comment était ta séance de sport ? » demandai-je à mon meilleur ami. Puis j’enchaîne sur une idée qui m’était venue un peu plus tôt dans la matinée. « J’ai pensé que ce soir on pourrait ce faire une toile, ça fait longtemps… Qu’est-ce que tu en penses ? » Oui un cinéma, ça faisait bien trop longtemps que nous n’y avions pas été tous les deux.

Les semaines filent, rythmées par mes allées et venues incessantes entre New-York et Fall River. Chaque vendredi soir, je fais le voyage pour retrouver Cassia, avant de repartir aux premières lueurs du lundi. Cette routine, aussi épuisante soit-elle, est le prix que je suis prêt à payer pour être auprès d'elle, pour saisir ces précieux instants qui nous sont offerts. Ce weekend, j'ai décidé de laisser Cassia mener la danse, de choisir nos activités, qu'il s'agisse d'un dîner en ville, d'une balade improvisée ou d'une soirée dans un bar musical. L'essentiel, pour moi, n'est pas tant ce que nous faisons, mais le fait d'être à ses côtés, de partager ces moments, de construire nos souvenirs.
Les rares messages d'Erin, que je reçois de temps en temps, glissent sur moi sans laisser de trace. Il y a bien longtemps que je n'ai pas croisé son chemin, et cela ne me manque pas. La nouvelle dynamique qui s'installe entre Cassia et moi, ces dernières semaines, est rafraîchissante et me convient parfaitement. Certes, mes séjours à New-York sont parfois entrecoupés d'écarts, de moments de faiblesse, mais mon cœur, invariablement, me ramène vers Cassia. Peu importe où je vais, quoi que je fasse, c'est vers elle que mes pensées et mes pas me guident, encore et toujours.

Lors de cette matinée ensoleillée, je me sens soudain motivé à intensifier mes efforts physiques, à diversifier mes activités sportives au-delà des plaisirs intimes partagés. Il faut dire que ses talents culinaires sont tels qu'ils menacent l'équilibre parfait de ma condition physique, forgée à l'image d'un athlète des temps modernes. Dès l'entrée dans la salle de sport, l'atmosphère chargée de testostérone est palpable, un véritable hymne à la virilité où chaque haltère soulevé semble un défi à la gravité elle-même. Au milieu de cet univers de muscles et de sueur, une jeune femme, visiblement en difficulté avec ses exercices de squats, lance des regards d'appel à l'aide. Mon instinct premier me pousse à voler à son secours, une opportunité d'étaler ma courtoisie et peut-être, d'attirer l'attention de cette demoiselle en détresse. Cependant, je me retiens, conscient des promesses faites à Cassia, de cette nouvelle voie que je m'efforce de suivre. La tentation est là, palpable, mais ma détermination à rester plus ou moins fidèle, à ne pas me laisser distraire par une rencontre éphémère, est plus forte.

Après ma session d'entraînement, plutôt que de retourner directement chez Cassia, je choisis de prolonger cet effort par un jogging improvisé dans les rues adjacentes. Ce détour, loin de n'être qu'un simple prolongement de mon exercice, symbolise aussi ma volonté de me dépasser, de rester sur la bonne voie, celle qui mène inéluctablement vers Cassia. C'est dans ces moments de solitude choisie, au rythme de mes foulées sur le bitume, que je mesure le chemin parcouru et celui qui reste à accomplir.

En me promenant, distrait par mes pensées, mon regard est soudain attiré par une silhouette étrangement familière. Non, ce ne peut être lui... Andrew, ici ? Cassia m'avait pourtant assuré de son absence, invoquant un prétendu voyage d'affaires. Mon cœur s'accélère lorsque je vois une femme le rejoindre, leurs étreintes équivoques ne laissant aucune place à l'interprétation. Saisi d'une impulsion, je tente de capturer cet instant avec mon téléphone, mais ils se volatilisent dans l'entrée d'un hôtel avant que je n'y parvienne. Je décide de les attendre, persuadé que leur entrevue sera brève, connaissant la réputation d'Andrew.
L'arôme tentateur d'une pâtisserie voisine me distrait de ma surveillance. La file d'attente, signe de l'excellence de leurs douceurs, me convainc de profiter de ce moment pour satisfaire une gourmandise soudaine. « Pourriez-vous me préparer une tartelette aux fraises et un framboisier, s'il vous plaît ? », demande-je avec courtoisie. Service rapide et efficace, et me voilà reparti, les bras chargés de pâtisseries. C'est alors que je les vois ressortir de l'hôtel. Leur adieu, éphémère et passionné, confirme mes soupçons. Les récits de Cassia à propos de ses pitoyables performances ne m’étonne guère. Je lorgne sur ma montre en hochant la tête. « Effectivement… C’est du rapide ! » Frustré, je réalise que j'ai raté l'opportunité de documenter leur trahison, maudissant intérieurement la distraction causée par ces délices sucrés. « Zut ! », soufflais-je en regagnant le domicile de Cassia, contrarié par ma maladresse et déterminé à trouver le moment opportun pour révéler cette découverte à Cassia, sans preuves visuelles mais avec la ferme intention de protéger son cœur.

Tandis que je franchis le seuil de l'appartement de Cassia, un tourbillon de pensées me submerge. La révélation que je dois lui faire pèse lourd sur mes épaules, et je me demande comment elle accueillera la nouvelle de ma rencontre fortuite avec Andrew. Son accueil chaleureux ne parvient qu'à m'arracher un sourire contraint, tandis que je lutte intérieurement avec mes réflexions. « La salle de sport était... intense. Il y a toujours ce type qui semble croire qu'un hurlement accompagne chaque effort physique, comme s'il participait à un accouchement plutôt qu'à un simple exercice » je lui explique en délaissant mon sac, tentant de détendre l'atmosphère malgré la gravité de mes pensées.

Je lui présente ensuite un petit cadeau, espérant adoucir le moment à venir. « J'ai pensé à toi en passant devant la pâtisserie. J'espère que cela te fera plaisir » je dis en déposant délicatement le carton sur la table, capturant brièvement ses lèvres dans un baiser éphémère. La légèreté de l'instant me permet une brève évasion de mes soucis. Cherchant à prolonger cette ambiance détendue, je rebondis sur son goût prononcé pour les films romantiques. « Alors, prête pour la dernière romance au cinéma ? Je te propose un marché : je t'invite, mais en échange, j'ai le droit aux popcorns » je propose avec un sourire complice, espérant que cette petite échappatoire cinématographique nous offrira un moment de répit avant la tempête des révélations.

Je ne sais pas comment lui dire. Je cherche désespérément une solution. Et la seule qui me viennent en tête c’est la fuite. « Je vais prendre une douche rapide, et ensuite, je serai entièrement à toi » lui annonçais-je en tentant de masquer mon trouble imminent. Seul sous le jet d'eau, mes pensées tournent en boucle, sans trouver d'issue. L’eau chaude coule sur moi sous la douche, je suis submergé par une avalanche de pensées contradictoires, cherchant désespérément le moyen de révéler à Cassia ce que j'ai vu, sans la blesser. La décision de m'enfuir de cette réalité est tentante, mais je sais au fond de moi que ce n'est pas la solution. Lorsque je rejoins finalement Cassia, mon visage trahit mon anxiété profonde. Je rassemble tout mon courage et, avec une voix plus grave que d'habitude « Il faut qu'on parle » je lâche, conscient de l'effet presque cliché et redouté de ces mots. Je prends une profonde inspiration, cherchant à calmer le tumulte intérieur qui menace de me submerger. « Je t'en prie, assieds-toi » je réitère doucement, mon cœur battant à tout rompre. Je me prépare mentalement à partager avec elle la scène à laquelle j'ai assisté, tout en me demandant comment elle réagira.

Milo venait de rentrer. Je m’étais alors empressée de lui demander comment s’était passé sa petite séance de sport. Cette dernière fut, selon les dires du jeune homme, intense. Et ses quelques commentaires sur les différents stéréotypes de sportifs présents dans ce genre de salle me font rire de bon cœur. « Je vois… C’est pour cela que je préfère le calme de la piscine. » Au moins dans l’eau, l’atmosphère est toujours plus apaisante. Mon meilleur ami attise ma curiosité en m’avouant avoir pensé à moi en passant devant la pâtisserie. Je viens alors, telle une petite fille bien trop curieuse, ouvrir la boite en carton pour y découvrir une tartelette aux fraises et un framboisier. Un sourire illumine mon visage « Oh… merci beaucoup » dis-je vraiment ravie de cette douce surprise culinaire. « C’est vraiment toi le meilleur... » dis-je en en prenant du bout des doigts un quartier de fraise afin de croquer dedans. La tentation était trop forte. Ces pâtisseries avaient l’air vraiment très appétissantes.

Dans la foulée, j’avais proposé au pilote de ligne d’aller au cinéma ce soir. J’adorais m’y rendre, et ce, depuis toujours. J’avais toujours trouvé que c’était une activité agréable à faire entre amis, en couple ou même seule. Et cela me réjouissait d’avance de pouvoir partager un bon moment comme celui-ci avec Milo. Je nous imaginait déjà sans la salle plongée dans la pénombre à partager un pot de pop-corn. Milo accepte ma proposition, non sans me taquiner en sous entendant que le film serait bien évidemment un film romantique. Il me propose alors un marché, il m’invitait mais en échange il avait le droit aux pop-corns. « Marché conclu ! » dis-je un sourire ravi aux lèvres. Milo s’en va occuper la salle de bain. Une douche sans doute bien méritée après cette longue séance de sport.

Continuant mon pliage de linge et mon rangement, je suis interrompu par le retour de Milo. Il semble attendre quelque chose. Mon regard se pose alors sur lui. Il avait un air grave sur le visage. Étrange. Le rythme de mon myocarde accélère anormalement en l’entendant dire qu’il fallait que l’on parle. Il avait l’air si sérieux. Milo me demande de m’asseoir. « D’accord... » dis-je en prenant place sur le canapé. Je n’étais vraiment pas rassurée. Il y avait énormément de chose qui me passait pas la tête. Allait -il m’annoncer que sa formation allait se prolonger ? Ou pire encore qu’il devait vivre à New-York indéfiniment. Allait-il m’annoncer être tombé amoureux d’une femme ? Ou alors m’annoncer qu’il était enfin prêt pour notre histoire. « Milo, tu m’inquiètes… Qu’est-ce qui ne va pas ? » demandai-je alors la voix fébrile.

Alors que je me tiens là, face à Cassia, un tourbillon d'émotions me submerge. La tâche de lui révéler ce que j'ai découvert me semble insurmontable. Mon regard se perd dans le sien, cherchant désespérément un signe, une échappatoire à cette situation délicate. « Je... » ma voix se brise sous le poids de l'incertitude. Je me lève, agité, comme si le simple fait de bouger pourrait alléger le fardeau de mes révélations. « Comment te dire ça... » je marmonne, chaque mot pesant lourd sur ma conscience.

Je fais les cent pas, chaque pas résonnant comme un écho à mon trouble intérieur. « Bon, voilà alors euh... » je tente à nouveau, ma voix trahissant ma nervosité croissante. Je m'arrête net, confronté à l'inévitable vérité que je dois partager. « Je ne sais pas comment te le dire, Cassia, mais... » une fois de plus, les mots se figent dans ma gorge. Dans un geste désespéré pour gagner du temps, je lance, « J'ai faim ! Toute cette activité m’a ouvert l’appétit ! » en cherchant toujours une solution, espérant détourner l'attention de l'urgence de notre conversation. Intérieurement, je me critique pour cette diversion maladroite, conscient que je ne fais que repousser l'inévitable.

Face à elle, le cœur lourd, je réalise que je ne peux plus fuir la réalité. « Cassia, il faut que tu saches quelque chose d'important... » je commence, rassemblant tout mon courage. « C'est à propos d'Andrew... » Je m'arrête, cherchant la manière la plus douce, la plus délicate de lui transmettre une nouvelle qui risque de bouleverser son monde. Comment lui dire que l'homme qu'elle a choisi de donner une énième chance ne mérite peut-être pas sa confiance ni son amour ?

La révélation que je m'apprête à faire à Cassia me noue l'estomac, chaque syllabe résonnant comme un coup porté à notre amitié. Mon cœur bat à tout rompre alors que je cherche désespérément une manière de lui transmettre la nouvelle sans lui briser le cœur. Andrew te trompe, cette pensée tourne en boucle dans ma tête, mais trouver la force de la prononcer s'avère bien plus difficile que prévu. L'interruption inopinée de mon téléphone me procure un répit temporaire, mes parents à l'autre bout du fil, ignorant le dilemme qui me taraude.

Après cet échange téléphonique salvateur, je retourne vers Cassia, l'air encore plus préoccupé qu'auparavant, si tant est que cela soit possible. « Excuse-moi… Où en étions-nous ? » Je tente de reprendre le fil de notre conversation, mais la gravité de ce que je dois lui révéler pèse lourdement sur mes épaules. « Cassia, il y a quelque chose que tu dois absolument savoir... » Les mots me manquent, chaque tentative de les prononcer se heurtant à un mur d'incertitude et de peur de la blesser. Je respire profondément, cherchant en elle la force nécessaire pour continuer. « Ce matin, en revenant de ma séance de sport, j'ai vu Andrew... » Ma voix tremble légèrement, témoignant de l'angoisse qui m'étreint. « Il n'était pas seul. Il était avec une autre femme, et ils sont entrés ensemble dans un hôtel. » L'aveu est fait, brutal et sans appel. Dans un effort désespéré pour adoucir le choc, j'ajoute maladroitement, « Mais tu sais, ça n'a pas duré très longtemps. On connaît ses... limites, après tout. » Mon regard cherche le sien, espérant y déceler une étincelle de compréhension, voire de pardon pour cet assaut inattendu sur sa tranquillité.

Mon cœur se serre à l'idée de la douleur que mes mots pourraient lui infliger. Je me tiens là, vulnérable, prêt à la soutenir quelles que soient les conséquences de cette révélation.

Alors que Milo était rentré l’air détendu et satisfait de sa matinée, il avait à présent un air grave sur le visage. Il souhaitait que l’on parle. Mais quel sujet de discussion voulait-il aborder exactement ? Les possibilités étaient si nombreuses. Mon rythme cardiaque avait subitement accélérer. Comme demandé, je m’étais assise sur le canapé. Mon regard ne quittait pas Milo. J’étais suspendu à ses lèvres, attendant avec la plus grande des impatience ce qu’il avait à me dire. Ma patience est mise à rude épreuve, mon meilleur ami avait bien du mal à trouver les mots pour m’annoncer ce qu’il souhaitait me dire. Malgré que Milo soit debout à faire les cent pas, mon regard, inquiet, ne la lâche pas d’une seconde. Finalement, après moult tentative Milo finit par prononcer une phrase dans son intégralité. Il avait faim. Un froncement de sourcil apparaît sur mon visage. Signe que je ne comprenais absolument pas le comportement du jeune homme et surtout que je me doutais qu’il ne s’était pas mis dans un état pareil juste pour une faim de loup. « Milo... » dis-je d’une voix peu sévère, l’incitant alors à me dire la vérité. Et quand le pilote de ligne se décide enfin à me parler, il m’avoue que cela concerne Andrew. Alors ça, je ne m’y attendais pas. « Je t’écoute… Dis moi, que s’est-il passé ? » L’avait-il rencontré ? En étaient-ils venus encore aux mains ? Non, Milo n’aurait pas attendu si longtemps avant de me faire part d’une telle altercation. Mais la sonnerie du téléphone de Milo nous coupe dans notre conversation. Ce dernier répond, il s’agissait de ses parents. Et les minutes qui passèrent me parurent alors une éternité. Je ne cessais de m’imaginer les pires scénarios possibles dans mon esprit.

Une fois l’appel terminé, Milo revient à notre discussion. Il se lance alors en m’expliquant avoir vu Andrew. Ce dernier était apparemment accompagné d’une femme et tous les deux avaient rejoint un hôtel. Je suis perplexe quant à cette annonce. Je pensais Andrew en dehors de la ville pour ses rendez-vous. Étrangement, Milo tente de dédramatiser la situation en me précisant que le moment à l’hôtel n’avait pas duré longtemps. Je lui lance un regard tout de même assez réprobateur. Je soupire légèrement, un peu perplexe par la situation. « Et donc… ? En le voyant en compagnie d’une femme tu t’imagines qu’il est infidèle, c’est ça ? » Je passe furtivement une main dans mes cheveux. « Cette femme, elle était comment ? C’était sans doute Jenny, sa collaboratrice. Elle est quasiment présente à tous ses rendez-vous et dîners d’affaires… » dis-je, sans m’en rendre compte, dans un dénis complet. Cela n’avait pas du être facile pour Milo de me dire ce qu’il avait vu et ou cru voir. « Écoute, ce n’est pas parce que tu ne portes pas Andrew dans ton cœur qu’il faut l’accabler à la moindre occasion… Lui, infidèle ? Ce serait un comble tu ne trouves pas ? » Oui comment quelqu’un qui était jaloux maladif pourrait lui même commettre l’adultère. « C’est gentil de t’inquiéter Milo... Je me doute que ça n’a pas du être facile de me dire ce que tu pensais avoir vu... » Une fois encore, j'étais dans un dénis total. Mais cela je ne le savais pas encore.

La tension monte d'un cran, palpable dans l'air qui se charge d'émotions contradictoires. Cassia, les bras croisés, affiche une incrédulité qui me transperce le cœur. Un mélange de frustration et de désespoir m'envahit alors que je tente de lui faire comprendre la gravité de la situation. « C'est donc normal pour toi, cette proximité douteuse avec sa collègue, leur escapade discrète dans cet hôtel ? C'est ça, la norme pour toi ? » Mes mots se teintent d'amertume, reflétant une colère grandissante face à son déni.

Je me lève brusquement, l'agacement me gagnant. « Regarde les choses en face, Cassia. Le monde est rempli d'hommes qui ne respectent pas leur engagement, et Andrew fait bien partie de ce lot ! » Mon ton se fait plus dur, tranchant l'air entre nous. « Et sa jalousie maladive, tu crois que ça sort d'où ? Il sait de quoi il est capable, et il projette ses propres fautes sur toi ! »

Je fais les cent pas, tourmenté par la tournure de notre conversation. « Et nous, alors ? » je lance, une pointe de défi dans la voix. « Ce que nous partageons, ces moments volés, cette complicité... A tes yeux, qu’est-ce que c’est ? De l’amitié ? » Mon regard la scrute, cherchant une réponse, un indice quelconque de ses sentiments véritables. Je suis conscient de mes propres contradictions, de mes propres erreurs. Oui, il m'est arrivé de fréquenter d'autres femmes, mais Cassia occupe une place à part dans ma vie, une place que je n'avais jamais envisagé d'offrir à qui que ce soit auparavant. « C'est différent avec toi, Cassia. Ce qu'on vit, ce qu'on ressent... C'est pas juste une passade. Alors ne me dis pas que tu lui es encore fidèle… Ou alors c’est à moi que tu mens, ou pire, à toi-même.» Mes mots sont lourds de sens, un aveu à peine voilé de la profondeur de mes sentiments pour elle.

La frustration fait place à une vulnérabilité à fleur de peau, exposant un cœur habituellement gardé sous clé. « Je... J'ai peur de te perdre, Cassia. Peur que ce... que cet homme te fasse du mal, d'une façon ou d'une autre. » Mon admission est un murmure, une confession arrachée des profondeurs de mon âme, une supplication muette pour qu'elle voie enfin la vérité derrière mes mots. « Là encore tu le défends, comme si il était incapable d’une telle chose ! »

Ma frustration atteint un pic, me poussant instinctivement à créer une distance physique avec Cassia, comme pour matérialiser le fossé émotionnel qui semble s'installer entre nous. Je m'ancre dans l'extrémité opposée du canapé, mon corps entier exprimant mon malaise et mon agacement. « J'ai essayé de capturer ce moment, de te fournir une preuve tangible... Mais j'ai été trop lent » je marmonne, regrettant mon manque de réactivité.

Je me tourne vers elle, le regard chargé d'une sincérité désarmante. « Cassia, tu sais que je suis franc sur mes fréquentations, même celle qui ne te plaise pas. Jamais je ne me permettrais de créer une histoire de toutes pièces, surtout une aussi douloureuse. » Mon ton trahit une pointe de tristesse, marqué par la déception de ne pas être cru. « Pourquoi aurais-je intérêt à mentir sur une chose aussi grave ? » Je pose la question, laissant le silence qui s'ensuit remplir l'espace entre nous, espérant qu'elle puisse sentir la vérité de mes paroles. « Je partage tout avec toi, Cassia, même les choses les moins glorieuses de ma vie. Crois-tu vraiment que je jouerais avec quelque chose d'aussi sérieux ? » Mon cœur se serre en réalisant à quel point cette situation met en lumière les fragilités de notre relation. « Je n'ai rien à gagner à inventer une histoire pareille... Tout ce que je veux, c'est te protéger, te voir heureuse. » Ma voix baisse, presque suppliant, implorant Cassia de voir au-delà de ses doutes, de reconnaître la profondeur de mes sentiments et de mon engagement envers elle.

La tension monte en moi, une tempête d'émotions me submerge. L'idée que Cassia puisse douter de ma parole, de mon honnêteté, me révolte et m'attriste à la fois. Comment peut-elle penser un instant que je serais capable de fabriquer une histoire aussi blessante, surtout concernant quelque chose d'aussi grave que la fidélité d'Andrew ? Chaque fois que je partage quelque chose avec elle, je le fais avec une transparence totale, mettant à nu mes vérités les plus intimes, y compris mes propres failles et aventures.

Le poids de son incrédulité pèse lourdement sur moi, érodant la solidité du lien que je croyais inébranlable entre nous. « Je ne supporte pas l'idée que tu puisses douter de moi, surtout sur un sujet qui touche directement à ton bonheur et à ta sécurité émotionnelle. » Mon cœur se serre davantage à l'idée qu'elle puisse continuer à donner sa confiance à Andrew, ignorant les preuves de sa trahison que je n'ai, malheureusement, pas réussi à capturer.

Dans ce moment de vulnérabilité, j'implore silencieusement Cassia de voir au-delà de ses doutes, de reconnaître la sincérité et la gravité de mes intentions. « Je ne te dirais jamais quelque chose d'aussi sérieux sans en être absolument certain, Cassia. Tout ce que je veux, c'est te voir heureuse, en sécurité, aimée comme tu le mérites... Pas avec quelqu'un qui te trahit. » Mes paroles sont un mélange de supplication et de déclaration, un appel désespéré à sa confiance et à son discernement.

J’avais quelque peu de mal à assimiler les informations que me donnait Milo. Et pour cause, tout ceci était tout simplement invraisemblable. Et puis tout était devenu très clair. Andrew étant en rendez-vous d’affaire il devait sans aucun doute être avec Jenny, sa collaboratrice. Milo, en voyant Andrew en présence d’une autre femme que moi c’était tout de suite imaginer le pire scénario possible. Étant donné qu’il ne portait absolument pas Andrew dans son cœur, cela n’avait pas été compliqué. Milo ne semble pas comprendre ma réaction. « Il n’y a pas de norme Milo. Des hôtels il en fréquente des dizaines tous les mois à chaque fois qu’ils se déplacent quelque part ou pour rencontrer un potentiel futur client... ». J’imaginais très mal Andrew infidèle. Ça ne collait pas avec sa jalousie maladive pour moi. Mais pour Milo c’était ou autre chose, mon ami avait une vision bien à lui, pensant que justement cette jalousie était belle et bien lié à son infidélité.

Milo focalise ensuite la discussion sur nous. Le pilote de ligne me demande, un soupçon de défi dans la voix, ce qu’étaient pour moi les moments que nous partagions. Il souligne un fait auquel je n’avais pas réellement songé. Du moins pas comme cela. Nos moment passés entre nous ? Comment les définir. Blessée par les propos de Milo je réagis « Qu’est-ce que tu en en train d’insinuer ? Que je suis moi aussi volage ? Tu sais très bien que je n’ai jamais été ainsi... » Non l’infidélité était bien quelque chose que j’avais grandement du mal à supporter. Ensemble, nous ne faisions rien de mal. Du moins c’est ce que je pensais. Soudainement, c’est comme si je prenais conscience que ces moments volés étaient source de mal. Milo m’avoue une fois encore avoir peur de me perdre et peur qu’Andrew, d’une manière ou d’une autre me fasse du mal. Il me reproche de le défendre. Il m’avoue même avoir voulu capturer ce moment où il avait vu Andrew avec Jenny. « Je ne dis pas que tu mens Milo et je ne doute pas de toi.... Mais peut-être tu tires des conclusions trop hâtives… ». Je finis par me lever à mon tour. Je n’aimais pas forcément la manière tout du moins le ton que pouvait employer Milo pour me parler. « Vraiment Milo, tout ce que tu dis me touche. Sincèrement… Mais je ne suis plus une petite fille... » Puis soudainement une idée me vient en tête. Mais venant de la part de Milo, cela m’étonnerait malgré tout. « C’est… c’est parce que tu ne supportes vraiment pas ma relation avec lui ? Parce que je ne l’ai pas encore quitté… ? » Je me demandais en effet si ces conclusions hâtives n'étaient pas dû au fait que finalement ma relation avec Andrew perdurait encore.

La tension de cette conversation tant redoutée atteint son paroxysme, laissant un goût amer de déception. Cassia choisit de se voiler la face, préférant s'accrocher à l'illusion d'un Andrew fidèle – quelle farce. Mon cœur se serre, la franchise a toujours été mon credo face à cette relation toxique. Saisissant ma veste avec précipitation, je me prépare à affronter le froid extérieur, ainsi que le froid glacial de nos non-dits. « Ta confiance aveugle en lui m'a toujours déchiré. Mais si tu préfères entretenir des illusions plutôt que d'affronter la réalité, je comprends le message, Cassia » ma voix trahit ma déception alors que je m'empresse de rassembler mes affaires, un tumulte de sentiments m'envahissant. Mon geste de partir est autant une réaction à la colère qu'à la blessure profonde d'être moins crédible à ses yeux qu'Andrew. Finalisant ma valise avec une précision mécanique, je dépose les doubles des clés, ces témoins muets de nos moments partagés, sur la table – un symbole de ce qui aurait pu être. « Puisqu'il est le pilier de ta confiance, donne-lui ces clés. Demande-lui aussi ce qu'il pense de notre « amitié » si pure et innocente. » Chaque mot est un coup porté contre ma propre cage thoracique, chaque syllabe une larme invisible.

Sortant de son appartement, la porte se referme avec fracas derrière moi, un écho à la tempête intérieure qui me ravage. La colère est mon carburant, m'empêchant de sombrer dans le désespoir. Et comme un signe du destin, mon téléphone s'anime – Erin. Dans ma tourmente, j'avais presque réussi à l'effacer de mes pensées. Sa voix au téléphone est une distraction bienvenue, un pansement provisoire sur une blessure béante. Peu à peu, elle parvient à me convaincre de la rejoindre, une échappatoire temporaire à la douleur de la trahison et de l'incompréhension.

À peine franchi le seuil de sa porte, mes mots se font rares, reflétant mon humeur sombre. Erin, avec cette capacité qu'elle a de lire en moi, lance d'emblée, « Tu sembles porter le poids du monde sur tes épaules ! Laisse-moi alléger ta peine. » Sa tentative de réconfort, à travers un baiser fugace dans le cou, me laisse de marbre. L'indifférence m'envahit ; pourquoi ai-je choisi de me réfugier ici ? La réponse est évidente : tenter d'occulter l'image de Cassia de mon esprit. Je me laisse donc entraîner dans ce semblant de distraction, une échappatoire éphémère à ma tourmente.

Des heures s'égrènent, et ma colère, loin de s'apaiser, s'enflamme davantage, nourrie par les circonstances. Erin, avec son habituelle insouciance, semble trouver du plaisir dans mon agitation. « Il y a quelque chose d'irrésistible chez toi quand tu es dans cet état, » murmure-t-elle, un sourire narquois aux lèvres en pianotant sur son téléphone. Soudain, elle propose, « Une amie célèbre son enterrement de vie de jeune fille ce soir. Ça te dirait de venir avec moi ? » C'est avec une apathie manifeste que j'acquiesce, me laissant entraîner dans ce qui semble être une tentative désespérée de fuir mes propres démons.

La soirée m'emmène dans l'antre d'un bar à strip-tease, au cœur d'une fête qui se veut libératrice. Tandis que mes doigts tambourinent nerveusement sur le bois usé de la table, une mosaïque de corps dansants se dévoile devant moi, offrant des spectacles de séduction brute. Parmi eux, des regards lourds de promesses glissent sur l'assemblée, cherchant à captiver. Une danseuse, particulièrement audacieuse, s'approche de moi, sa poitrine opulente à peine voilée par des lambeaux de tissu, ses yeux pétillants de malice scandant le rythme de ses mouvements ensorcelants.

Mais, par un caprice du destin, mon attention se dérobe à sa tentative de charme pour se fixer sur une figure familière dans la pénombre. Non, ce n'est pas Cassia – quelle idée saugrenue qu'elle foule le sol de ce lieu de perdition. Mon cœur fait un bond, non pas d'excitation, mais de stupeur : au milieu de l'effervescence, se détache non pas une strip-teaseuse de plus, mais une escort-girl que je reconnais. Plus troublant encore, c'est la même femme que j'ai vu ce matin aux côtés d'Andrew. Quelle ironie cruelle ! Dans ma quête d'oubli, le sort s'acharne à tisser des liens invisibles qui me ramènent, inlassablement, vers Cassia et les ombres de son histoire avec Andrew.

Je me dirige vers elle impulsivement, attiré par quelque chose de plus fort que la raison. Tout en elle crie son métier : son regard accrocheur, son allure provocante, et chaque geste calculé pour séduire. Curieux, je m'aventure à lui demander son prénom et ses tarifs, cherchant à donner une identité à cette femme mystérieuse qui, d'une manière ou d'une autre, relie mon monde à celui d'Andrew. Elle me fixe avec une intensité déroutante, effleurant mon bras d'une manière qui insinue une promesse de plaisirs inavoués. Son invitation est claire, signalée par le tintement des verres qu'elle commande pour nous deux.

Les verres s'enchaînent, floutant les contours de ma volonté. Nos lèvres se rencontrent dans un baiser empreint de désir et de fuite, un moment suspendu dans le chaos ambiant du bar. Mes mains, guidées par une pulsion primitive, explorent la douceur de sa peau, alors que je me perds dans l'oubli momentané qu'elle m'offre.

Erin, loin de se contenter de regarder, s'empare de son téléphone, décidée à capturer ce moment de faiblesse. Ses mots tranchent l'air, révélant son intention malveillante : transformer cette scène en une arme contre Cassia, pour me séparer d'elle définitivement. « Attendez, il faut que je filme ça les filles ! Je veux absolument voir la tête de Cassia ! » Sa voix, emplie d'une jubilation cruelle, accompagne le clic de son téléphone qui enregistre ma chute morale. Elle envoie ensuite la vidéo à Cassia, convaincue que ce geste scellera mon destin à ses côtés. « Là, c’est certain, elle n’en voudra plus de Milo, et il sera à moi ! » proclame-t-elle, triomphante, alors qu'elle appuie sur le bouton d'envoi, consciente des conséquences dévastatrices de son message.

J’avais un peu de mal à réaliser que nous étions en train d’avoir ce genre de conversation avec Milo. Je me demandais vraiment ce qui le poussait à tirer de telles conclusions. Ce qui me blessait le plus dans cette histoire c’est que Milo, avait sous entendu que moi aussi j’étais infidèle à Andrew et cela à cause de nos moment passés ensembles. Nos moments volé comme il se plaisait à les nommer. Mais dans le fond, cela me faisait réfléchir. Mon comportement envers Milo était-il réellement déplacé vis à vis de Andrew ? Sans doute. Bien que nous n’allions jamais plus loin que quelques baisers volés, il y avait malgré tout une forme d’intimité entre nous. Milo venait donc de révéler une facette de ma personnalité dont j’ignorais l’existence. La tension montre entre nous. Et Milo fait alors rapidement tour des pièces pour ramasser ses affaires. Mon cœur meurt d’envie de le retenir de lui dire de rester. Mais ma fierté est tellement blessée. Avant de quitter l’appartement, Milo me conseille fortement de demander à Andrew ce qu’il pensait de notre amitié pure et innocente tout en me conseillant de lui donner les clés de mon appartement. « Lui au moins il n’invente pas des histoires ! » dis-je avant que le pilote de ligne ne claque la porte. Mes mots avaient dépassés mes pensées. J’étais en colère et triste. Le week-end avait si bien commencé et me voilà seule, meurtrie par les mots et les gestes de Milo. Le plus douloureux était sans doute le fait qu’il m’ait rendu les clés de mon appartement.

Je passe le reste de la journée à tourner en rond. L’envie d’appeler Milo est omniprésente. Mais avant tout, j’avais décidé d’appeler Andrew afin d’avoir des précisions sur ses rendez-vous d’affaires. Il m’assure être avec Jenny, sa collaboratrice. Au téléphone sa voix est douce, posée. Il ne semble pas pris au dépourvus par mes quelques questions. L’investigation s’arrêtait donc là.

Installé dans mon canapé, je tentais une lecture. Difficile quand mes pensées dérivaient sur Milo à chaque minute. Quand mon téléphone sonne j’espère de tout cour voir le nom de Milo apparaître sur l’écran. Mais il n’en est rien. Un message d’Erin contenant une vidéo. Mon cœur s’emballe en voyant le contenu de la vidéo. Milo dans un club en train d’embrasser et de flirter avec une femme. Je vois rouge. Après tout ce qu’il avait pu me dire tout à l’heure. Et sa promesse de voulait réellement changer? Déjà envolée apparemment. Erin semble se donner un malin plaisir à me montrer ses images. Je lui demande des informations quant au lieu. Elle y répond. Sans attendre, j’enfile une veste et quitter l’appartement pour me rendre à ce fameux club. Une fois arrivée, je pénètre dans les lieux. C’était bien la première fois que j’entrais dans un tel établissement. Alors que je me faufilais entre tout ce petit monde à la recherche de Milo, un homme m’interpelle « Hey ma jolie, tu ne veux pas --- » je ne lui laisse pas le temps de terminer sa phrase « Non, va voir ailleurs. » Mon ton était glacial. Mais c’est la colère et la déception qui m’avaient mené jusqu’ici, un cocktail explosif. J’aperçois Milo au comptoir avec cette fille. Je me dirige droit vers eux. « Ça va, tu passes une bonne soirée !? » demandai-je au pilote de ligne, les yeux noirs de colère.

Et pour couronner tout, Erin arrive à notre hauteur. « Hey Cassia... » Je lui lance un regard noir à elle aussi. « Oh s’il te plais, arrête avec tes manières… Tu sais très bien pourquoi je suis ici. C’est toi qui m’as envoyé cette vidéo de Milo ! » Elle sourit légèrement « Je vous laisse régler vos affaires... » dit-elle avant de rebrousser chemin.

Plongé dans un voile d'ébriété, chaque son, chaque visage se brouille, se mêlant dans une danse chaotique de lumières et d'ombres. C'est dans cet état second que je perçois une voix, un écho lointain qui traverse le tumulte ambiant, une voix que je jurerais connaître par cœur. Je cligne des yeux, tentant vainement de percer l'obscurité qui m'entoure, mes gestes lourds et maladroits trahissant les effets de l'alcool qui coule dans mes veines. « Cassia ?! Non non… Tu ne peux pas être elle… » marmonnais-je, la confusion peinte sur mon visage alors que je lutte contre l'éblouissement des projecteurs.

La silhouette qui se détache contre la lumière semble à la fois familière et étrangère, un mirage façonné par mon esprit embrouillé. « Ah si… C’est toi. Mais, si tu es là… Où sommes-nous ? » L'incertitude danse dans ma voix, chaque mot un effort pour rassembler les fragments épars de ma conscience. « Non non… Tu ne peux pas être Cassia… » La réalité et l'illusion se confondent, me laissant désemparé, à la dérive dans un océan d'incertitudes. L'évaporation soudaine de ma compagne de la soirée ne fait qu'ajouter à ma perplexité. « Si tu étais Cassia… » Les aveux se mêlent à l'alcool, révélant des vérités cachées au plus profond de mon cœur. « … Je lui dirais que… Que je suis prêt. Et puis que… Que je l’aime… Mais ça, chut, c’est un secret ! » L'humour involontaire de mes paroles se perd dans l'ivresse, mon doigt sur les lèvres dans une tentative maladroite de préserver le silence autour de cet aveu.

Ma tentative de me distancer de cette Cassia illusoire se termine par une critique mal placée, « …Tu es trop moche pour être Cassia, tu manques de classe et de charme… Elle est mieux que toi ! », alors que je m'efforce de me frayer un chemin à travers la salle, chaque pas plus incertain que le dernier. C'est alors qu'Erin réapparaît, un sourire triomphant aux lèvres, m'accueillant dans ce théâtre de l'absurde. « Ah toi, je te reconnais ! Tu es la folle ! » Mes mots s'évanouissent tandis que je chute, victime de l'insidieuse présence d'une flaque d'eau, ma chute amortie par le sol dur, un dernier affront de cette nuit déjà trop remplie d'erreurs et de regrets.

La scène se déroule sous mes yeux embués d'alcool, une pièce de théâtre dont je suis à la fois l'acteur et le spectateur, perdu entre réalité et illusion. La voix d'Erin résonne, chargée de reproches et d'accusations, son ton acéré tranchant l'air épais de tension. « Ah ben bravo ! Qu’est-ce que tu as fait à mon Milo ? » Sa question, teintée de sarcasme, semble flotter au-dessus de la mêlée, une bulle d'indignation dans l'atmosphère déjà chargée.

Je capte à peine la suite de ses paroles, chaque mot se déformant dans le prisme de mon esprit embrouillé. « Regarde dans quel état il se met à cause de toi ! De toute manière, à chaque fois qu’il te voit ça fini mal… Je lui ai dit qu’il ne serait jamais heureux avec toi mais il s’entête et regarde… » Sa main pointe dans ma direction, un geste accusateur qui semble vouloir me transpercer.

Son conseil, cruel et dénué de toute compassion, me glace le sang, bien que ma capacité à réagir soit entravée par l'étau de l'ivresse. « Moi à ta place je disparaîtrais de sa vie et je retournerai à tranquillement avec Andrew. » L'aide qu'elle m'offre pour me relever est à la fois un geste de soutien et un symbole de contrôle, comme si, en me remettant sur pieds, elle tentait de réaffirmer son emprise sur la situation, et par extension, sur moi.

« Aller viens Milo, on rentre. Il ne faut pas que tu fréquentes cette femme, je te l’ai déjà dit ! » Son insistance pour me guider vers la sortie, malgré mon incapacité à suivre ses directives, révèle une volonté de me soustraire à une influence qu'elle juge néfaste, ignorant le tumulte intérieur qui me déchire entre la loyauté et le désir, entre la raison et le cœur. La complexité de nos relations entrelacées, marquée par des choix difficiles et des chemins incertains, se trouve mise à nu dans cet instant de vulnérabilité, sous les lumières crues d'un monde qui semble, pour un moment, suspendu dans l'attente d'une résolution qui ne vient pas.

Cette vidéo de Milo en train de flirter avec cette femme m’avait lacéré le cœur. Apparemment sa volonté de changer n’était pas si profonde que cela. Et que dire d’Erin qui m’avait délibérément envoyé cette vidéo ? A quel petit jeu voulait-elle jouer exactement ? J’étais tellement en colère. Je me sentais trahi, tout simplement. Alors une fois arrivée dans ce club, je m’étais immédiatement à la recherche de Milo. Et, avec sa carrure imposante, il ne fut pas compliqué à trouver. Sans hésitation et sans gêne, je venais de l’interrompre dans son échange avec l’escort. Le pilote de ligne semble peiner à me reconnaître. Il était ivre. Il faisait fort ce soir. Ce qu’il m’avoue pourrait être très touchant, mais ce n’était que des paroles incitées par l’alcool. « Milo, c’est bien moi. C’est Cassia... » Mais rien n’y faisait, il restait ancré dans une confusion la plus totale. Et le retour d’Erin n’allait rien arranger à la situation. Milo chute à terre. Instinctivement je m’assure qu’il aille bien « Milo ! Est-ce que ça va ? Tu ne t’ai pas fait mal ? » Erin s’adresse alors à moi avec un ton chargé de reproche. Son Milo ? Mais pour qui ne prenait-elle. Et ma collègue ne s’arrête pas en si bon chemin, elle me met en tort quant à l’état du jeune pilote de ligne. Elle souligne le fait qu’à chaque fois qu’il me voyait ça finissait mal. « Pour commencer, c’est toi qui l’a emmené ici alors tu as ta part de responsabilité concernant son état ! Et ce qu’il se passe entre nous ne te regarde absolument pas ! » Erin, toujours sûre d’elle continue à me faire face, elle me conseille fortement de disparaître et de retourner tranquillement avec Andrew. Et sur ses mots elle aide Milo à se relever. Ses dernières paroles me donnent tout simplement envie de hurler. Je lui barre le passage, « Personne ne me dit ce que je dois faire, certainement pas toi ! Maintenant je te conseille fortement d’aller voir ailleurs sinon tu auras à faire à moi. Et crois moi, ce soir je suis particulièrement très énervé. Donc ne me cherche pas trop longtemps. » Sur mes derniers mots, je ne lui laisse pas le choix, je l’écarte de mon chemin et prends le relais auprès de Milo. Et sans plus attendre nous prenons le chemin de la sortie. Le chemin du retour fut silencieux. Milo somnolait à moitié. C’est avec difficulté que nous rentrions à l’appartement. Une fois fait, j’avais guidé Milo jusqu’à la chambre. Allongé sur le lit, je lui retire ses chaussures, je l’aide tant bien que mal à retirer sa veste afin qu’il soit un minimum à l’aise. Je place un plaid sur lui pour la nuit. Après m’être assuré qu’il c’était bien endormi, je quitte silencieusement la chambre.


Le lendemain matin.
J’avais passé la nuit sur le canapé. Un plaid en guise de couverture. Peu importe, je n’avais presque pas fermé l’œil de la nuit. Entre la dispute de la veille avec Milo, les images de cette vidéo qui tournait dans ma tête sans cesse et la scène dans le club. Difficile de trouver le sommeil ou même une certaine sérénité. A présent, le soleil était levé. Je décide de me préparer une bonne tasse de café pour essayer de m'éclairci les idées.

Je ne sais plus ce que je fais ni ce que je dis. Je me laisse faire tout simplement. Je suivrais presque n’importe qui, n’importe où. Je ne sais même pas qui est côté de moi dans la voiture. Je m’écroule sur un lit et m’endors comme une masse.

Au réveil, une douleur sourde et lancinante pulse à l'arrière de mon crâne, chaque battement de mon cœur semblant amplifier l'agonie. Les yeux mi-clos, je tente de rassembler mes esprits, mais l'effort se révèle titanesque. L'environnement m'est étrangement familier, pourtant baigné dans une brume d'incertitude. La lumière du jour, impitoyable, filtre à travers les interstices des volets, agressant mes pupilles réticentes à s'adapter. « Cassia ? » murmurai-je, ma voix rauque trahissant la sécheresse de ma gorge.

Un tour d'horizon hésitant de la pièce ne fait qu'ajouter à ma confusion. Des flashes fragmentés de la soirée précédente tentent de percer le voile de mon esprit embrumé. La douleur pulsatile derrière mon crâne se fait l'écho d'une soirée visiblement oubliée, et la présence inattendue de Cassia ajoute à mon désarroi.

Je m'efforce de me redresser, chaque mouvement exacerbant la sensation de ma tête comme un poids disproportionné sur mes épaules. « Salut… » Les mots s'échappent péniblement de mes lèvres, tandis que je porte une main à mon crâne dans une vaine tentative de soulagement. « Qu’est ce que j’ai mal au crâne… Qu’est ce que je fais ici ? Qu’est ce qu’il s’est passé ? » L'absence de souvenirs tangibles rend la situation d'autant plus insupportable.

Je la regarde, cherchant désespérément des réponses dans son expression, mais je ne rencontre qu'un mélange de colère et d'inquiétude. « Quel jour sommes-nous ? » La question, naïve, souligne mon désarroi total. L'angoisse d'avoir manqué à mes responsabilités professionnelles se mêle à l'incertitude de ce qui a pu se dérouler la veille. Le silence pesant qui suit ma question me laisse anticiper le pire, me préparant à affronter les conséquences d'une soirée dont les détails m'échappent encore cruellement.

Je m'affaisse sur le canapé, le corps lourd et l'esprit noyé dans un brouillard d'incompréhension et de douleur lancinante. Chaque battement de mon cœur résonne comme un coup de marteau à l'arrière de mon crâne, soulignant la présence d'une gueule de bois titanesque. « Tu aurais quelque chose pour la tête, s'il te plaît ? » ma voix est rauque, presque méconnaissable, témoignant de la nuit d'excès et de l'état pitoyable dans lequel je me trouve. « N'importe quoi qui puisse atténuer cette douleur... » j'ajoute, ma main toujours pressée contre ma tête, espérant trouver un semblant de soulagement à cette souffrance qui semble me punir pour les péchés de la veille. Mes yeux peinent à rester ouverts, agressés par la lumière du jour qui s'infiltre dans la pièce, exacerbant mon malaise. Je cherche du réconfort, un geste, un mot, quelque chose qui puisse m'aider à reconstituer les pièces du puzzle de la nuit passée, tout en redoutant les réponses que je pourrais obtenir.

Une tasse de café chaud et surtout bien fort, j’étais installé dans le fauteuil présent dans le salon.L’appartement était plongé dans un silence de plomb. Milo dormait encore, quant à moi je ne cessais de cogiter quant aux derniers évènements. La voix de Milo se fait entendre. Il étai réveillé. Je le vois arriver. « Salut » dis-je simplement avec une distance méconnaissable. En observant le pilote de ligne, je ne peux qu’imaginer le douloureux mal de tête qui le submerge. Il ne semble avoir aucun souvenir de la soirée d’hier. Il pose des questions quant à sa présence ici. « Je suis venue te chercher dans le club de strip-tease où Erin t’avais emmené pour l’accompagner à une soirée… Vu ton état c’était préférable... » Je prends une longue gorgée de café avant d’ajouter d’un ton ironique et mesquin « Je t’ai en quelques sorte sauvé de ses griffes... » Quoi que, si il avait été en état de donner son avis, peut-être aurait-il préféré rentrer avec Erin. Qui sait. Milo semble soudainement s’inquiéter du jour auquel nous sommes. Je comprends rapidement qu’il s’inquiète pour son vol prochain, pour son travail. « On est dimanche » Inutile de faire durer le suspens, autant le rassurer immédiatement.

J’observe silencieusement Milo prendre place sur le canapé. Chaque mouvement semblait le faire souffrir. Et sans surprise, il me demande quelque chose pour soulager le mal de tête. « Je vais te chercher ce qu’il faut. » dis-je en me levant pour me diriger vers la salle de bain. Avec mes migraines habituelles, j’avais le nécessaire. Je reviens donc alors au salon, non sans être passé par le coin cuisine pour prendre un verre d’eau, et pose devant Milo un comprimé ainsi que le verre d’eau. « Prends ça. Ça devrait aller mieux assez rapidement. »

Je reprends place dans le fauteuil. « Je ne te demandes pas si tu as passé une bonne nuit... » Question sans doute inutile vu les circonstances et son état. Quoi que, il avait sans doute mieux et plus dormi que moi.

La distance dans la voix de Cassia résonne en moi comme une alarme silencieuse, m'alertant sur le fait que quelque chose de grave s'est produit. Son approche, tenant en main un verre d'eau et un comprimé, est presque salvatrice dans cet état de désarroi. « Merci » murmure-je, la gratitude teintée d'une confusion profonde, avant de laisser le comprimé glisser dans ma gorge. La fraîcheur de la glace contre l'arrière de mon crâne est un soulagement immédiat, un rappel cinglant de la nécessité de revoir mes choix de vie.

« Erin ? Pourquoi tu me parles d’Erin ? » La question m'échappe, trahissant l'amnésie qui brouille mes souvenirs récents. « La dernière chose dont je me rappelle, c’est… Une jeune femme ! La même qui était avec Andrew hier matin ! » Le nom d'Andrew évoque une cascade de souvenirs flous, m'entraînant encore une fois dans le tourbillon de nos complications passées. « Et après, c’est le trou noir… » L'aveu de mon ignorance sonne comme une défaite personnelle, alors que je m'enfonce plus profondément dans le canapé, cherchant désespérément un semblant de confort. « Raconte-moi… Qu’a-t-elle voulu, Erin ? Pourquoi… Pourquoi m’as-tu extrait de ses griffes ? » Ma voix, emplie d'une curiosité mêlée d'appréhension, cherche des réponses, tente de reconstituer le puzzle de la nuit précédente. Chaque mot de Cassia, chaque indice sur les événements que j'ai manqués, est crucial pour comprendre comment j'ai pu dériver si loin, et surtout, pourquoi Cassia, malgré tout, a choisi d'intervenir.

La perplexité s'empare de moi alors que je tente de démêler les fils embrouillés de la veille. La sensation de déjà-vu est accablante, me ramenant à ces années révolues où Cassia était mon phare dans la tempête, me guidant à travers mes périodes les plus tumultueuses. Quel rôle joue-t-elle dans ma vie, sinon celui d'un ancrage dans mes moments de perdition ? « Merci… D’avoir été là pour moi, encore une fois, et pour… Pour tout ce que tu fais… » Ces mots, simples et pourtant chargés d'une profonde gratitude, semblent insuffisants pour exprimer l'ampleur de ma reconnaissance. Elle a traversé l'orage pour me sauver, affrontant Erin et ses manigances sans hésiter.

Dans ce moment de vulnérabilité, je réalise l'importance capitale de Cassia dans mon existence. Non seulement elle est venue à mon secours dans une situation désespérée, mais elle continue de m'offrir un refuge et un soutien inébranlable. « Je ne sais pas où j'en serais sans toi… » L'admission de ma dépendance à son égard est à la fois un aveu de faiblesse et une reconnaissance de sa force. Cassia, par sa simple présence, transforme mes égarements en chemins de retour, me rappelant à l'ordre et à la raison. Sa patience et sa bienveillance envers moi ne sont rien moins qu'un don, une lumière dans les ténèbres de mes errances.