Alors que je m'affaire silencieusement à ranger l'appartement, je sens le poids de l'inquiétude peser sur mes épaules, comme une ombre lancinante dans l'atmosphère paisible de notre foyer. Chaque geste que je fais se teinte d'une attention particulière envers Cassia, une tentative désespérée de veiller sur elle, même dans les tâches les plus anodines. Lorsqu’elle se blottit contre moi, je ne peux que l’accueillir. Ses lèvres cherchent les miennes. Je réponds à son baiser tendrement en veillant à ne pas lui créer une nouvelle douleur supplémentaire. Mon regard se glisse furtivement vers elle de temps à autre, cherchant à déceler le moindre signe de malaise, le moindre indice de son état de santé fragile. « Ne te fatigue pas… Repose toi, je m’occupe de tout. Et promis... Demain matin tu pourras te réveiller dans mes bras, et accessoirement t'y endormir. » soufflais-je afin de la rassurer sur mon état. C'est dans l'un de ces moments, alors que la lumière du jour filtre doucement à travers les rideaux, que je la vois soucieuse, ses sourcils légèrement froncés dans une expression de douleur contenue. Mon cœur se serre instantanément, une boule d'angoisse se formant dans ma gorge. Je connais trop bien ces signes précurseurs, ces prémices d'une migraine qui la tourmente trop souvent, qui assombrit son visage angélique et entrave sa joie de vivre. Une vague de compassion et d'empathie m'envahit alors que je m'approche lentement d'elle, tentant de masquer mon inquiétude derrière un masque de calme et de soutien. Je sais que ces maux sont une source de frustration pour elle, un fardeau qu'elle porte avec courage mais qui la rend vulnérable et fragile. Et dans cet instant, tout ce que je souhaite, c'est pouvoir alléger ne serait-ce qu'un peu sa douleur, lui offrir un réconfort dans l'obscurité de son malaise. Je m'approche d'elle avec précaution, mon inquiétude palpable dans chacun de mes gestes. « Cassia, ça va ? » Ma voix est douce, teintée de cette préoccupation que je ne peux masquer. Je vois la lueur de souffrance dans ses yeux alors qu'elle tente de sourire pour me rassurer, mais je sens au plus profond de moi qu'elle est en proie à une douleur lancinante.

Sans attendre, je m'active pour transformer l'appartement en un havre de paix propice à la guérison de Cassia. Mes gestes sont empreints d'une délicatesse presque fébrile alors que je tamise les lumières, fermant délicatement les rideaux pour créer une ambiance plus sombre et plus apaisante. Je connais trop bien l'importance du silence et de l'obscurité dans ces moments de crise, ces instants où chaque bruit semble amplifier la douleur qui tourmente mon amour.
Avec précaution, je lui apporte un verre d'eau fraîche, ce geste devenu une routine dans son combat contre ses migraines récurrentes. Je m'assois ensuite à ses côtés, lui offrant ma présence comme un baume réconfortant. Mes doigts effleurent doucement sa main, un contact léger destiné à lui rappeler qu'elle n'est pas seule dans cette épreuve. « Je suis là, repose-toi. » lui murmurais-je doucement, ma voix imprégnée d'un calme que je souhaite contagieux. Dans le silence feutré de l'appartement, je reste vigilant, prêt à répondre à ses besoins, à lui apporter réconfort et soutien. Chaque minute qui s'écoule semble une éternité, mais je sais que ma présence, mon amour, sont les meilleurs remèdes que je puisse lui offrir dans ces moments sombres. Alors qu'elle ferme les yeux pour trouver un soulagement bien mérité, contre mon torse, je reste là, veillant sur elle avec une dévotion silencieuse et infinie. « Qu’est-ce que je peux faire pour t’aider ? » lui demandais-je à voix basse, conscient que même les mots les plus simples peuvent apporter un peu de réconfort dans les ténèbres de sa douleur.

En arrivant dans le salon je constate rapidement, d’un seul coup d’œil, que Milo avait pris soin de ranger mes affaires qui étaient jusqu’à présent dans des cartons. Je ne suis qu’à moitié surprise, il m’avait prévenu la veille: il s’occuperait de tout. Toutefois, c’est tout naturellement que je m’étais dirigé vers lui, trouvant le chemin de ses bras pour le remercier. Milo savait ô combien j’appréciai le rangement, surtout chez moi. Milo me demande à nouveau de me reposer. Il me promet également que demain matin je pourrais me réveiller dans ses bras. J’esquisse un léger sourire. A croire qu’il avait lu dans mes pensées. « H’ m... je l’espère bien. Cela fait de trop nombreuses fois que je me réveille seule...» dis-je un léger sourire amusée aux lèvres.


Je délaisse notre étreinte pour me servir un verre de jus de fruits. Sentant les prémices, déjà virulents, d’une migraine, je tente de boire quelque chose de frais et qui me fasse surtout envie. Mais le moindre de mes geste ne fait qu’accroître la douleur lancinante qui frappe dans ma tête. Je m’assois pour être mieux installée et éviter tout étourdissement qui pourrait être lié à ce mal qui me ronge. La voix de Milo qui me demande si tout va bien résonne de manière très désagréable dans ma tête. « Début de migraine... » dis-je en soupirant légèrement tout en me massant un peu les tempes bien que je savais d’ores et déjà que ce geste serait vain.  Cette migraine était dans doute lié à ma chute de hier et au coup que j’avais reçu à la tête et qui m’avait value une plaie au niveau du front. Toujours très attentionné, Milo fait en sorte que le salon soit entièrement plongé dans une pénombre. Un climat, une atmosphère beaucoup plus supportable pour moi. Je décide de prendre place sur le canapé d’angle du salon. Mon myocarde lui aussi tambourinait au rythme de la douleur. Milo vient s’installer à mes côtés non sans m’apporter un verre d’eau fraîche. Après en avoir bu une longue gorgée, je viens me blottir contre Milo, fermant les yeux, réflexe habituel pour tenter de minimiser la douleur. Le pilote de ligne me demande ce qu’il pouvait faire pour m’aider. « Pas grand-chose... » dis-je un peu lasse. Moi qui pensait que la journée d’aujourd’hui serait meilleure que celle d’hier. C’était très mal parti. « Enfin si… Ma boite de cachets est dans le premier tiroir de la commode à la salle de bain. Est-ce que tu pourrais aller me la chercher s’il te plais ? » Ce traitement n'était absolument pas efficace à cent pour cent, mais étant donné que la migraine ne faisait que commencer j'espérais fortement que le cachet fasse effet et me soulage en bonne partie.
 

Cassia pose doucement sa tête sur mon épaule, cherchant un réconfort dans ma présence. J'embrasse instinctivement son front, comme pour apaiser ne serait-ce qu'un peu la douleur qui la tourmente. La voir ainsi, dans cet état de vulnérabilité, me brise le cœur à chaque fois. Je connais trop bien l'ampleur de son mal, la souffrance qu'elle endure en silence. Alors, quand elle me demande sa boîte de cachets, je m'empresse d'aller lui chercher ses médicaments. En fouillant avec précaution dans la commode de la salle de bain, je sens un soupir s'échapper de mes lèvres alors que plusieurs boîtes tombent l'une après l'autre. Je les ramasse avec attention, mes yeux tombent sur une boîte à demi-entamée de préservatifs. Une pointe d'étonnement et de confusion s'insinue en moi. Pourquoi Cassia possède-t-elle un tel objet chez elle ? Était-ce pour Andrew ? Ou un autre homme dont elle ne m'aurait pas parlé auparavant ? Des questions tourbillonnent dans mon esprit, m'emplissant d'un mélange d'appréhension et de curiosité. Après tout, au cours de leurs multiples séparations, Cassia a peut-être fréquenté quelqu'un d'autre. Je chasse rapidement ces pensées de mon esprit, en me promettant de poser la question à Cassia plus tard, quand elle sera dans un meilleur état pour en parler. Une fois toutes les boîtes rangées avec soin, je retourne vers elle, armé d'un nouveau verre d'eau pour qu'elle puisse prendre son traitement. Je lui tends doucement les médicaments, lui offrant un sourire tendre et rassurant, même si mes pensées sont encore accaparées par cette découverte inattendue.

Sans le vouloir, la boîte de médicaments m'échappe des mains et tombe lourdement sur le sol. Un cachet s'échappe et file sous le canapé d'angle, se jouant de ma patience naissante. Je me retrouve rapidement allongé par terre, dans une position inconfortable, à tenter désespérément de récupérer ce maudit cachet. Il semble s'être glissé dans l'endroit le plus inaccessible, défiant mes efforts pour le récupérer. Avec un grognement de frustration, j'étends mon bras aussi loin que possible, mes doigts frôlant les recoins poussiéreux sous le canapé. Après plusieurs tentatives infructueuses, je finis enfin par saisir le cachet entre mes doigts. Un sentiment de victoire m'envahit alors que je le récupère, mais cette sensation est rapidement remplacée par un dégoût palpable lorsque je constate que ma main est couverte de toiles d'araignées. Je retiens un juron, préférant ne rien dire à Cassia pour ne pas l'inquiéter avec des créatures à huit pattes velues. Je me contente d'essuyer rapidement ma main sur l'arrière de mon pantalon, espérant dissimuler la saleté qui s'y est accrochée. « Repose-toi, je vais sortir un instant. Je n'en ai pas pour longtemps. Je vais déposer ton arrêt maladie à l'hôpital et faire quelques courses » lui annonçais-je doucement, déposant un dernier baiser sur ses lèvres avant de m'éclipser.

Après avoir déposé l'arrêt de travail à l'hôpital, je traverse le couloir, espérant éviter toute rencontre indésirable. Mais comme par ironie du destin, je croise Anna, qui ne manque pas de me demander des nouvelles de Cassia. Un bref échange s'ensuit, où je lui assure que Cassia se repose et que je prends soin d'elle, avant de m'éclipser rapidement en direction du premier magasin disponible.

Une idée germe dans mon esprit depuis le matin, et la découverte de cette toile d'araignée a ravivé mes pulsions ménagères. Je connais Cassia et sa phobie des araignées, mais aussi son désir de maintenir un foyer propre et accueillant. Dans la situation actuelle, avec son état de santé fragile, il est hors de question qu'elle se retrouve à devoir nettoyer un appartement envahi par les arachnides. C'est alors que je décide de me lancer à la recherche de l'aspirateur parfait. Son aspirateur actuel ressemble plus à Erin en plein orgasme qu'à un appareil ménager, et je refuse que le bruit assourdissant de cet engin n'empire ses migraines déjà éprouvantes. Je parcours les rayons, scrutant chaque étiquette, cherchant désespérément l'aspirateur le plus silencieux possible. Chaque modèle examiné est accompagné d'une foule de spécifications techniques et de promesses de performance. Je m'attarde sur chaque détail, comparant les niveaux sonores et les caractéristiques de filtration, déterminé à trouver l'appareil parfait qui allie efficacité et discrétion. Pour Cassia, je suis prêt à parcourir des kilomètres et à étudier chaque produit jusqu'à trouver celui qui lui apportera un peu de répit dans son quotidien tumultueux. Après avoir scruté les rayons pendant ce qui semble une éternité, mes yeux se posent enfin sur l'objet tant recherché : l'aspirateur parfait. Son design épuré et moderne attire immédiatement mon attention, mais c'est surtout sa promesse de silence qui retient mon regard. Je saisis l'appareil avec précaution. En lisant les caractéristiques sur l'étiquette, un sourire satisfait se dessine sur mon visage. Cet aspirateur semble répondre à tous mes critères : puissant et surtout silencieux, efficace tout en étant pratique. Je prends quelques instants pour vérifier une dernière fois que c'est bien celui-là qu’il me faut. Avec détermination, je me dirige vers la caisse, le précieux appareil dans les mains.

Arborant un sourire de satisfaction, je quitte le magasin, l'aspirateur parfait entre mes mains. La fraîcheur de l'air extérieur me frappe agréablement, apaisant mes sens après l'agitation du magasin. Les rues sont animées de mouvements incessants, mais mon esprit est calme, concentré sur le chemin du retour vers Cassia. Je prends un moment pour respirer profondément, laissant l'air frais remplir mes poumons et me revitaliser. Puis, je m'engage sur le chemin familier qui me mènera à l’appartement de Cassia. La ville défile autour de moi, mais mes pensées restent ancrées sur Cassia et sur la manière dont cet aspirateur silencieux pourrait améliorer son quotidien.

En poussant la porte d'entrée, je fais attention à ne pas faire de bruit alors que je rentre avec mes derniers achats. Mes pas sont légers sur le parquet, et je dépose délicatement les sacs sur le sol, évitant tout bruit inutile. Mon regard se tourne aussitôt vers Cassia, allongée sur le canapé d'angle, endormie. Une légère grimace se dessine sur mon visage en la voyant ainsi. Avec une douceur infinie, je m'approche d'elle et glisse mes bras sous son corps léger, la soulevant avec précaution. Elle semble si paisible dans son sommeil. Avec toute l'attention dont je suis capable, je la transporte jusqu'à sa chambre, veillant à ce qu'elle ne se réveille pas. Je la dépose avec tendresse sur son lit, arrangeant délicatement les couvertures autour d'elle pour qu'elle soit confortable. Avant de la quitter, je caresse doucement sa joue, effleurant sa peau du bout des doigts. Un baiser léger est déposé sur son front, empreint d'amour et de sollicitude. Puis, avec une extrême précaution, je quitte la chambre, veillant à refermer la porte avec un minimum de bruit pour ne pas la déranger. De retour dans le salon, je prends conscience du silence qui règne dans l'appartement. Pour ne pas troubler le repos de Cassia, je m'empresse de calfeutrer au maximum la porte de la chambre, utilisant tout ce que je trouve à ma disposition pour étouffer le moindre bruit qui pourrait la perturber dans son sommeil paisible.

Je m'équipe de mon arme secrète : un chiffon doux pour dépoussiérer chaque surface, un aspirateur pour chasser les saletés les plus tenaces, et une paire de gants pour affronter les recoins les plus sombres de notre foyer. Chaque pièce est minutieusement inspectée, chaque recoin scruté avec attention. Je me penche sous les meubles, déplace les objets pour accéder aux endroits les plus cachés, là où les araignées aiment se cacher. Chaque brin de poussière est traqué, chaque toile d'araignée est méthodiquement détruite, dans le but de créer un environnement sain et rassurant pour Cassia. Chaque fois que je découvre une araignée, je réprime un frisson de dégoût, mais je reste résolu à les éliminer toutes.
Des heures passent, mais je ne faiblis pas. Chaque tâche accomplie me rapproche un peu plus de mon objectif. Et lorsqu’enfin j'achève ma mission, je contemple avec fierté le résultat de mon travail : un appartement étincelant de propreté, où aucune trace de saleté, aucune araignée ne pourra troubler la quiétude de Cassia.

La douleur lancinante à ma tête me forçait à rester tranquille. Dans ce genre de moment, chaque geste, chaque pas, chaque mots prononcés étaient un véritable supplice. J’avais pris place sur le canapé, Milo à mes côtés. Ce genre de moment était d’autant plus frustrant qu’il n’y avait jamais eu de remède miraculeux. J’avais essayé déjà de nombreux traitements mais peu avait fait effet. A ce jour, mon traitement actuel ne permettait pas d’éradiquer la migraine mais plutôt de la contenir, me soulageant un minimum. Traitement que j’avais d’ailleurs demandé à Milo d’aller me chercher afin que je puisse prendre l’un des cachets assez rapidement. Quand le jeune homme revient avec le précieux sésame, je me redresse pour pouvoir prendre un de ces fameux cachets. « Merci » Malheureusement le boit tombe à terre, et s’en suit alors une lutte acharnée de la part de Milo pour retrouver un cachet perdu. « Laisse, ce n’est rien... » Il faudrait juste songer à le retirer plus tard. D’une main fébrile je prends un autre cachet de la boite et l’avale avec une grande gorgée d’eau. Milo, obstiné, finit tout de même pas retrouver le petit cachet perdu. Je m’allonge sur le canapé, tentant de trouver une position confortable qui pourrait me soulager. Le pilote de ligne m’annonce sortir un petit moment pour diverses raison. « D’accord, à tout vite alors... » dis-je en grimaçant légèrement. Même parler devenait un véritable supplice.

Milo ayant quitté l’appartement, je me retrouve seule sur le canapé du salon. Enfin seule, non, la migraine était toujours là. Elle tambourinait toujours de manière régulière dans ma tête. Je m’étais allongée, fermant les yeux afin d’éviter toute sensation d’étourdissement et de nausée.  Et puis enfin, petit à petit, j’avais l’agréable sensation que le cachet commençait à faire effet. Les pulsations constantes dans ma tête devenaient moins virulente. Et comme bien souvent, quand la migraine se calmait la fatigue m’envahissait rapidement.

Le sommeil profond me quitte. Je me sens à présent bouger dans le lit. Dans le lit. Étrange, le dernier souvenir dont je me souviens c’est de m’être allongée sur le canapé du salon et non sur le lit de la chambre. J’ouvre alors les yeux. J’étais bel et bien dans la chambre. Les douleurs provoquées par la migraine étaient devenues infimes, presque inexistantes. Apparemment j’avais pris le cachet à temps pour minimiser la crise. Je jette un coup d’œil à l’heure et encore une fois je suis surprise de me rendre compte d’avoir dormi plusieurs heures. Je me lève donc doucement du lit pour quitter la chambre et rejoindre la pièce de vie. Milo était revenu. J’observe la pièce. Pièce qui, il y a quelques heures était déjà bien rangée, mais qui à présent était impeccablement bien rangée. Et une odeur de produit ménager flottait dans les airs. « Whoa... » dis-je surprise par le fait que Milo ait entrepris de faire le ménage. « Je croyais que tu devais seulement faire un aller retour à l’hôpital et faire quelques courses... » dis-je amusée mais aussi touchée de ce qu’avait fait Milo. J’avais l’œil, et je pouvais voir que tout y était passé, la poussière, les quelques objets qui pouvaient traîner au salon, les tasses utilisées ce matin n’étaient plus dans l’évier non plus. Rien n’avait échappé au jeune pilote de ligne. « Tout est… impeccablement bien rangé et propre… » Je me tourne vers Milo, lui lançant un regard plein de gratitude « Merci infiniment Milo… Mais tu n’étais pas obligé de faire tout ça tu sais. Je suis presque gênée... » Puis soudainement mon attention est attiré par un objet qui m’était inconnu. Un aspirateur. « Il est à qui cet aspirateur ? » demandai-je en désignant l'objet en question. Non ce n’était pas le mien, j’en étais certaine.
 

L'éclat de bonheur dans les yeux de Cassia, suite à mon intense session de nettoyage, inonde mon âme d'une satisfaction profonde et ineffable. Bien avant que je ne m'arme de détermination et de produits nettoyants, son espace de vie se distinguait déjà par une propreté remarquable. Pourtant, sous mes efforts assidus, chaque coin, chaque recoin de son appartement se met à rayonner d'une lumière nouvelle, comme si chaque surface, chaque objet avait été méticuleusement caressé et revitalisé par les mains bienveillantes de l'attention et du soin le plus minutieux. Une fois mes gants de ménage retirés, je me dirige avec une satisfaction tranquille vers le lavabo. L'eau tiède coule sur mes mains, emportant avec elle les dernières particules de poussière et les vestiges de mon labeur, dans une danse de purification qui semble laver également l'âme.

Je me tourne ensuite vers Cassia, un sourire malicieux éclairant mon visage, reflétant la lumière et la joie que je ressens à cet instant. « Eh bien... » je commence, ma voix teintée d'un amusement complice, « L'idée de te savoir entourée de ces araignées velues était loin de me plaire. Sache que ton chevalier servant ne pourra pas toujours se précipiter à ta rescousse pour les capturer ! » Ma déclaration, chargée d'un orgueil bien placé et d'une victoire personnelle, se veut légère et taquine, une promesse silencieuse de protection et de prévoyance. Je poursuis, mon ton se faisant plus tendre, plus sérieux : « Je t'ai promis que je prendrais soin de tout. Voir l'ombre de la fatigue effleurer ton visage est au-delà de ce que je peux supporter, Cassia. J’ai choisi de prendre quelques jours de congé, non pas pour m'éloigner du tumulte du quotidien, mais pour m'immerger pleinement dans le tien. Pour être là, à tes côtés, pour veiller sur toi et pour t'entourer de toute l'attention et le soin que tu mérites. » Mon engagement, prononcé avec une sincérité vibrante, se veut être un témoignage de mon dévouement total, une promesse de veiller à son bien-être avec autant de diligence et de passion que celle mise dans le nettoyage de son appartement. Chaque mot est une caresse, chaque promesse une assurance que, dans les petits gestes comme dans les grands, je serai là pour elle.

L'éclat de sa remarque au sujet de l'aspirateur déclenche en moi un éclat de rire, franc et libérateur, un son pur qui résonne dans l'espace entre nous avec une chaleur contagieuse. « Alors, comment exprimer cela avec toute la délicatesse requise ? » dis-je, laissant une main s'égarer dans mes cheveux dans un geste de fausse perplexité, comme si je cherchais les mots justes dans un océan de diplomatie. « Vois-tu, en vérité... ton aspirateur rivalise en décibels avec Erin lorsqu'elle est en plein élan orgasmique... » Je marque une pause, mon sourire s'élargissant à l'idée de cette comparaison pour le moins inattendue. Ma voix, teintée d'un amusement sincère, souligne l'absurdité charmante de l'entreprise : remplacer un aspirateur simplement parce qu'il perturbe le sommeil, comme si cet acte était le plus naturel du monde. « Je ne voulais pas te réveiller, j'ai même calfeutrer la porte de la chambre pour que tu n'entendes rien... » Cet investissement dans le confort et la tranquillité de Cassia, bien plus qu'une simple acquisition matérielle, est une illustration tangible de mon engagement à créer un environnement où elle peut se reposer sans souci, une preuve d'amour enveloppée dans l'anecdote d'un appareil ménager.

« Comment va ta migraine ? » La question glisse de mes lèvres avec une douceur et une préoccupation palpable alors que je l'enveloppe délicatement de mes bras, offrant un havre de réconfort et de chaleur. Avec une tendresse méthodique, mes doigts s'aventurent dans ses cheveux, écartant une mèche rebelle pour la placer délicatement derrière son oreille, un geste intime qui se veut rassurant. Je dépose ensuite un baiser léger sur son front, un geste empreint d'affection et de sollicitude, avant de plonger mon regard dans le sien, cherchant à y déceler la moindre trace de douleur ou de malaise restant. « Je ne suis rien qu’à vous, Mademoiselle Henderson… » Cette déclaration, prononcée avec une sincérité et une gravité inattendue, marque un instant de vulnérabilité rare de ma part, une fenêtre entrouverte sur l'étendue de mes sentiments pour elle.

Cet aveu, bien que teinté d'une assurance apparente, cache une mer d'hésitations et d'incertitudes qui agitent mon esprit. L'idée de me dévoiler complètement à elle, de laisser transparaître chaque facette de mon être, même les plus sombres et les plus fragiles, est une perspective qui m'effraie autant qu'elle m'attire. La révélation de mon dévouement total envers elle est un pas de géant dans l'expression de mon affection, un engagement émotionnel que je n'avais jusqu'alors jamais osé concrétiser pleinement. Et pourtant, malgré cette ouverture partielle de mon cœur, une part de moi reste barricadée, retenue par la peur de l'inconnu, par l'appréhension de la façon dont elle pourrait percevoir les ombres qui dansent au creux de mon âme.

J’étais tout simplement surprise, et encore c’était un euphémisme, de voir l’appartement étinceler de toute part. Milo n’avait pas exagéré hier quand il m’avait dit qu’il s’occuperait de tout. Je ne pensais pas qu’il irait jusqu’à faire le ménage de fond en comble ici pour me soulager de cette tâche. « Merci infiniment pour tout ce que tu fais. Mais maintenant, promets moi de te reposer aussi d’accord ? » Certes, Milo avait pris quelques jours de congés mais mon souhait n’était en aucun cas qu’il s’épuise à cause de moi. Mon attention avait été retenue par un appareil électroménager inconnu. Je questionne alors le jeune pilote de ligne quant à l’appartenance de cet objet. Milo me fait comprendre que mon ancien aspirateur était trop bruyant. Je grimace légèrement lorsque mon meilleur ami compare le volume sonore de mon ancien aspirateur avec Erin en plein élan orgasmique. « Arg… Milo ! » dis-je pour le réprimander faussement. « J’ai envie de tout sauf d’imaginer Erin en train de … » je ne trouvais pas les mots « Avec toi en plus... » dis-je finalement pour couper court à la situation. En somme, Milo avait acheté un nouvel aspirateur car le mien était trop bruyant et qu’il ne souhaitait pas me réveiller. L’attention était des plus touchantes. Mon regard se tourne vers la porte de la chambre, je n’avais même pas remarquée qu’il l’avait calfeutré. Un sourire se dessine sur mon visage. « Tu as pensé à tout… Mais tu n’étais pas obligé pour l’aspirateur, il a dû coûter assez cher... » Cela se voyait déjà à son design, et je savais pertinemment que cette nouvelle technologie silencieuse avait un prix. « Merci beaucoup, j’apprécie vraiment tout ce que tu fais pour moi » dis-je le plus sincèrement du monde.

Alors que les bras du jeune homme viennent m’envelopper délicatement. Ce dernier me questionne quant à ma migraine. « Mieux. Beaucoup mieux... » dis-je en laissant reposer mon visage sur son torse. Un large sourire prend possession de mes lèvres quand Milo m’annonce que maintenant il était rien qu’à moi. « Chouette, depuis le temps que j’en rêvais... » dis-je amusée. Je dépose un baiser sur sa joue avant de me diriger à la cuisine pour me préparer une tasse de thé. Avec ma mon bras valide j’ouvre un placard pour en sortir une tasse « Je te prépare quelque chose ? Je peux au moins faire ça... » dis-je avant que Milo refuse que je fasse quoi que ce soit.
 

La prévenance de Cassia, toujours tournée vers les autres avant même de penser à sa propre santé, m'émeut profondément. Il y a dans son attitude une générosité d'esprit qui m'est précieuse, un altruisme qui définit sa personnalité à la perfection. Je chéris cette qualité chez elle, et je ne désirerais pour rien au monde la voir se transformer, pas même pour alléger mes propres soucis. C'est dans son essence même, dans cette authenticité et cette spontanéité, que réside l'essence de l'amitié que je lui porte. « Me reposer ? Impossible ! Tu sais bien que j'ai la bougeotte ! » Je lance cette réplique sur un ton léger, cherchant à insuffler un peu d'humour dans notre échange, même si l'ombre d'un sourcil de Cassia se hausse, trahissant son appréhension à l'idée qu'Erin puisse, d'une manière ou d'une autre, s'immiscer entre nous. Cette réaction, bien qu'involontaire, esquisse sur mes lèvres un sourire amusé, un reflet de la complexité et de la richesse de nos interactions. « Mais rassure-toi, Cassia… C'est… Non… Nous en parlerons plus tard. » Ces mots, ajoutés presque comme une pensée après coup, portent en eux une hésitation, un choix délibéré de reporter une conversation qui, je le sens, est inévitable. Le sujet est délicat, peut-être même trop lourd pour être abordé dans l'immédiat, empreint d'une fraîcheur et d'une complexité qui exigent du temps et de la réflexion.

Ce qui s'est passé à New York n'est pas une simple anecdote de voyage ; c'est un événement chargé d'implications et d'émotions encore trop vives pour être pleinement explorées sans risquer de nous blesser davantage. L'idée de repousser cette conversation nécessaire est un choix conscient, une tentative de préserver, pour un temps encore, la bulle de notre complicité face aux tempêtes extérieures. La reconnaissance tacite que, bien que certains sujets doivent être confrontés, le timing et le contexte doivent être choisis avec soin, dans le respect de notre amitié et de nos émotions. Ce report n'est pas une fuite, mais une pause, un moment de répit avant de plonger ensemble dans les eaux profondes et parfois troubles de nos expériences partagées. Cette décision non dite de reporter la discussion sur New York est une marque de notre maturité relationnelle, une preuve que notre amitié est capable de naviguer à travers les complexités de la vie, en reconnaissant quand il est temps de parler et quand il est temps de laisser le silence et la compréhension mutuelle panser les plaies encore fraîches. Tôt ou tard, nous devrons affronter ensemble les répercussions de ces événements, mais jusqu'à ce moment, nous choisissons de nous appuyer l'un sur l'autre, de chérir les moments de légèreté et de soutien mutuel qui font le cœur de notre lien.

L'interrogation de Cassia à propos de l'aspirateur nouvellement acquis, notamment son coût, me tire un sourire amusé. Comment se fait-il qu'elle n'ait pas encore saisi l'étendue de ma détermination quand il s'agit de son bien-être ? Que pour elle, je suis prêt à dépasser les limites de la raison, même si cela signifie investir une somme conséquente dans un simple appareil ménager. « Cassia... Ne t'en fais pas pour moi. » Je commence, espérant apaiser ses inquiétudes financières avec une assurance douce. « Entre ce que je gagne, ce que j'épargne, et où j'investis, acquérir un aspirateur plus silencieux pour préserver ta tranquillité et ta santé ne représente qu'une goutte d'eau dans l'océan de mes possibilités. » Je poursuis, empreint d'une gravité teintée de tendresse, voulant imprimer dans son esprit l'importance qu'elle a pour moi. « Si demain, pour garantir ta santé et ton bonheur, je devais vider mon compte en banque, sache que je le ferais sans hésiter. » Ce n'est pas tant la somme dépensée qui importe, mais ce qu'elle symbolise : ma volonté inébranlable de prendre soin d'elle, de la protéger, quel que soit le coût. « Je suis heureux d'apprendre que tu vas mieux » murmurais-je, ma voix chargée d'un soulagement sincère tandis que mes mains dessinent des cercles apaisants sur son dos. Chaque contact est un message d'affection, un souffle d'encouragement silencieux. « La seule chose que je désire, c'est être à tes côtés, partager chaque instant avec toi. Dis-moi, de quoi, ou plutôt de qui as-tu envie ? » ajoutais-je, injectant une note de fausse innocence dans ma question. Mon ton léger cache cependant une curiosité véritable, un désir profond de connaître ses aspirations, ses désirs les plus intimes, afin de mieux comprendre comment je peux y répondre, comment je peux être la source de sa joie et de son épanouissement.

Depuis hier, j’avais pleinement conscience que Milo se pliait en quatre pour que ma convalescence se passe au mieux. Mais je ne souhaitais en aucun car que mon meilleur ami s’épuise. Lui aussi, avait besoin de repos. Et aujourd’hui, pour mon bien être, le pilote de ligne c’était clairement surpassé. Il avait même investi dans un nouvel aspirateur pour éviter tout désagrément à mon égard. Mais je n’étais pas dupe, ce nouvel appareil électroménager avait du avoir un certain coût. Bien évidemment, Milo me demande de ne pas m’en faire pour cela, me rappelant qu’il gagnait bien sa vie et que donc cet achat n’allait pas l’empêcher de manger pour le reste du mois. Les paroles de Milo me touchent. Il était capable de tout pour moi, et l’inverse était vrai également. Cela faisait partie de notre relation si unique. Je le remercie une dernière fois en le gratifiant d’un sourire sincère.

Ma migraine allait beaucoup mieux. Et alors que je sortais deux tasses pour préparer une boisson chaude, les mains de Milo viennent dessiner de doux cercles sur mon dos. Un geste doux et apaisant. Ma question se transforme en une autre question, venant de Milo cette fois-ci. Un sourire aux lèvres, je me retourne doucement pour faire face au jeune homme. « Je ne dirais pas non à une bonne tasse de thé, mais comme tu peux le voir c’est en cours... » dis-je amusée. « De qui ?  H’m… je ne dirais pas non pour profiter de la présence d’un homme qui ne quitte plus mes pensées depuis un certain temps… » Mon regard, plein de malice se plonge dans le sien. « Il est grand, très séduisant. Il sait piloter n’importe quel engin pouvant voler, ça le rend davantage irrésistible... Il est très attentionné, toujours très surprenant… Et il s’avère que c’est un excellent amant... » dis-je pour terminer avec une touche de légèreté. Toutefois, toutes les paroles que je venais de prononcer étaient plus que sincères. Ma main valide, vient s’enrouler délicatement derrière la nuque de Milo « Et ça tombe très bien, car il est justement en face de moi... » dis-je un léger sourire aux lèvres. Après la journée d'hier et le début de journée assez catastrophique d'aujourd'hui, tout ce que je souhaitais c'est enfin profiter de la présence de Milo et partager de doux moments avec lui.
 

« Ah oui ? Mais dites-moi, Mademoiselle Henderson… Vous semblez incroyablement chanceuse d'avoir un homme tel que lui dans votre vie ! J'aimerais bien le rencontrer… » Ma réplique, empreinte d'un amusement feint, danse sur les mots avec une légèreté qui dissimule à peine l'affection sous-jacente. Ce jeu de rôle délicat, où je feins l'ignorance de sa description évidemment dirigée vers moi, tisse une toile d'intimité et de complicité entre nous. C'est un ballet de sous-entendus et de taquineries qui enrichit notre conversation, lui donnant une profondeur et une chaleur inattendues. « D'ailleurs… Il semblerait qu'il m'ait confié un petit secret à votre sujet. » Mon ton se fait légèrement conspirateur, plein de promesses non dites, alors que je m'avance doucement vers elle. Cette proximité, réduisant l'espace entre nos visages, est comme le prélude d'une mélodie attendue, chaque mouvement chargé d'une tension douce et agréable. Puis, dans un geste tendre et plein d'intention, nos lèvres se rencontrent dans un baiser. Ce baiser, doux et réfléchi, est une exploration mutuelle, une affirmation de notre connexion unique et de l'affection que nous partageons.

Dans ce moment suspendu, notre échange transcende les mots, se communiquant plutôt à travers le langage universel du toucher et de l'émotion. C'est un instant où le temps semble ralentir, où tout le reste s'efface pour ne laisser place qu'à la pureté de notre lien. Avec ce baiser, je lui confirme sans dire que, oui, elle est l'unique destinataire de mes sentiments les plus profonds, la muse de mes pensées les plus intimes. Ce geste est une promesse, non seulement de mon affection inconditionnelle mais aussi de mon engagement à être là pour elle, à chérir et respecter la connexion que nous avons tissée avec tant de soin. « La seule femme qui compte à ses yeux, c'est vous… Mais chut, c'est un secret » je murmure ces mots contre ses lèvres, laissant le souffle de ma voix effleurer sa peau dans une caresse presque tangible. Alors que je m'écarte doucement, mon regard plonge dans le sien, cherchant à capturer ce moment d'intimité avec un sourire complice qui se dessine sur mes lèvres. Ce murmure, chargé d'une sincérité vibrante et d'une promesse tacite, est un fil doré tissé entre nos cœurs. Je veux qu'elle comprenne, à travers ces simples mots, l'ampleur et la profondeur de mes sentiments pour elle.

Tandis que nous partageons ce « secret », mes mains s'affairent avec une grâce tranquillité à préparer sa tasse de thé. Ce geste quotidien, si banal en apparence, se transforme sous nos yeux en une danse d'affection, chaque mouvement exécuté avec une tendresse attentive. L'eau frémissante, le thé qui infuse, la vapeur qui s'élève en volutes dansantes - chaque élément contribue à créer une atmosphère empreinte de soin et de dévotion. C'est ma manière de lui montrer que, dans les actes les plus simples comme dans les grandes déclarations, ma priorité reste son bien-être et son bonheur. Ce thé, préparé avec tant de soin, devient un symbole de notre amour, un nectar doux qui, espérons-le, réchauffera son cœur comme il réchauffe ses mains. Je souhaite que, à chaque gorgée, elle se rappelle ce moment, de cette révélation murmurée, de la sincérité de mes sentiments. C'est un acte d'amour silencieux, une promesse de toujours être là pour elle, de la chérir et de la soutenir, dans les gestes les plus humbles comme dans les grands éclats de passion. Dans cette intimité partagée, chaque geste, chaque parole, devient une déclaration d'amour, un engagement à chérir et à respecter le lien précieux qui nous unit, aujourd'hui et pour tous les jours à venir. « Mais avez-vous été assez sage pour profiter de sa présence ? On me confie que vous ne vous reposez pas assez. » Mon regard, empli d'une douce réprimande, se fixe dans le sien, cherchant à y lire sa réaction, à y déceler les nuances de son âme. « Peut-être pourrions nous sortir afin que vous m’en racontiez plus sur cet homme bien chanceux ? »

La douleur à mon épaule étant davantage supportable et ma migraine de ce matin étant terminée, je me sentais enfin un peu mieux. Et je comptais bien profiter du reste de la journée pour profiter un peu de la présence de Milo. D’ailleurs, c’est ce que je venais de lui faire comprendre quand ce dernier me demanda de quoi ou de qui j’avais envie. Tout en lui faisait une certaine éloge. Eloge qu’il méritait amplement. Sa réaction me fait sourire. « Oui incroyablement chanceuse, je le sais... » Bien que mes mots soient légers, j’étais sincère. Plus que jamais. J’avais toujours su que j’avais une immense chance d’avoir Milo dans ma vie. Mais cette sensation se renforçait de jour en jour, je ne pensais pas que cela était possible. Mon regard devient intrigué quand Milo, qui continue à jouer ce petit rôle, me dit avoir un secret à me confier. Mes lèvres sont suspendus aux siennes, attendant que ce fameux secret soit porté à mes oreilles. Mais avant nos lèvres se rencontrent afin d’échanger un doux baiser. Un baiser rempli de tendresse et symbolisant toute l’affection que nous nous portions en ce moment même. Et enfin, le secret est dévoilé. Ce dernier engendre la naissance d’un doux sourire sincère et touché. « Oh… ne vous inquiétez pas, je garderai le secret. C’est promis... » dis-je dans un léger murmure en posant ma main sur mon cœur. Geste symbolique qui signifiait que ses mots me touchaient infiniment.

Dans ce moment de tendres aveux, Milo finit par terminer de préparer mon thé. Je me contente de le laisser faire sachant très bien qu’aucun mot, qu’aucun argument ne pourra le faire changer d’avis. Il voulait s’occuper de tout. Ses paroles ne cessaient de faire échos dans ma tête. Milo me taquine quelque peu en me demandant si je méritais de profiter de sa présence car selon, lui je ne me reposais pas assez. Je lève les yeux vers lui, son regard a un air faussement réprobateur. « Alors, je me reposerai davantage demain... » dis-je en espérant que cette réponse apaise son inquiétude. Le jeune pilote de ligne me fait ensuite une proposition qui, en un instant, illumine mon regard. Sortir. « Ce serait génial... » dis-je presque soulagée de pouvoir sortir un peu. Prendre l’air, marcher un peu. Même si ce n’était qu’un court instant, cela me ferait sans doute un bien fou. « Et je me ferais une joie de tout raconter sur cet homme qui hante mes pensées... » dis-je sur le ton d’une promesse.

Une fois notre boisson chaude avalée, nous nous préparons tranquillement pour sortir. Toujours avec difficulté, j’enfile une paire de chaussure et une veste, non sans être aidée par Milo qui veille. Nous décidons de faire simple et de nous rendre tout simplement à pieds, dans un parc non loin de là. « Alors, qu’est-ce que je peux bien te raconter sur cet homme mystérieux… ? Ah oui, je sais… est-ce que je t’ai dit qu’il savait très bien cuisiner ? L’autre jour, il m’a préparé un risotto aux truffes, à tomber... » dis-je un sourire aux lèvres en me rappelant de ce dîner extraordinaire. « Oh et il est toujours là pour moi. Dans les bons comme dans les mauvais moments… Je suis vraiment chanceuse de l’avoir dans ma vie... » Bien que mes paroles pouvaient d’apparence ressembler à un petit jeu de comédie, c’était en réalité une véritable déclaration. Et comme pour sceller cette confidence, je viens déposer un baiser aux coin de ses lèvres.
 

La complicité qui s'est tissée entre Cassia et moi au fil des années est aussi riche et nuancée que les couleurs d'un coucher de soleil. Elle est le fondement de notre amitié, un lien indéfectible qui nous unit dans les rires comme dans les silences. Chaque fois que Cassia parle de moi, ses mots sont empreints de cette familiarité profonde, de cette connaissance intime de l'autre que seul le temps et les expériences partagées peuvent forger. Je me retrouve suspendu à ses lèvres, écoutant avec une attention quasi religieuse ses descriptions de moi, chaque anecdote, chaque trait de caractère qu'elle souligne, me peignant sous des jour qui, parfois, m'échappent même à moi-même. Son portrait de moi m'arrache un sourire doux, teinté d'amusement et d'une pointe de fierté. Il n'est pas question pour moi de la contredire, non seulement parce que je trouve une joie secrète à m'entendre dépeint à travers ses yeux, mais aussi parce que je chéris sa liberté d'expression, la place que j'occupe dans son monde.

Lorsqu'elle évoque mon risotto, le rire dans sa voix me remplit d'une chaleur réconfortante. Il est vrai que j'ai tenté de reproduire sa recette avec une précision méticuleuse, pesant chaque ingrédient, respectant chaque étape comme un rituel sacré. Mais la vérité, celle que nous partageons dans un accord tacite, c'est que Cassia est la véritable artiste culinaire entre nous. Son talent pour la gastronomie dépasse de loin mes modestes essais. Elle possède cette magie innée, ce don pour transformer les ingrédients les plus simples en plats qui enchantent les sens, réchauffent le cœur et nourrissent l'âme. Cassia, dans sa modestie, pourrait attribuer le succès de ses plats à la technique ou à la recette, mais je sais que c'est son amour, sa passion pour la cuisine qui infuse chaque bouchée de sa signature indélébile.

Notre amitié, comme les plats que Cassia prépare, est un mélange complexe de saveurs et de textures, de moments doux et d'autres plus piquants, mais toujours enrichissants. Chaque conversation, chaque partage, renforce notre lien. A travers ce tissu d'expériences partagées, les moments simples comme la préparation d'un risotto prennent une dimension nouvelle, devenant des souvenirs précieux, des pierres angulaires de notre complicité.

À l'instant où Cassia souligne ma présence constante à ses côtés, dans les épreuves comme dans les moments de joie, un sentiment de fierté et d'accord profond m'envahit. Il est vrai ; ma place est indéniablement à ses côtés, ancrée dans les fondations de notre relation. Elle n'est nulle part ailleurs. C'est un engagement silencieux que nous avons scellé, non pas par des mots, mais par des années de soutien mutuel, de compréhension et d'amitié. Nous marquons une pause dans notre promenade vers le parc, un moment suspendu qui nous appartient. « Sache que même quand je ne suis pas à côté de toi, je suis toujours là... » dis-je doucement, pointant du doigt son cœur dans un geste symbolique. « J'y serai toujours, même si un jour je ne suis plus là... » Mes mots, chargés d'une promesse éternelle, scellent une vérité que nous connaissons tous les deux : notre lien dépasse les circonstances, les distances, et même les frontières de la vie elle-même.

Alors que nous reprenons notre marche, notre bulle est doucement percée par l'approche d'une jeune femme visiblement désorientée. Mon instinct protecteur s'éveille immédiatement, me poussant à me placer légèrement en avant de Cassia, prêt à intervenir si la situation l'exige. Cependant, la préoccupation de l'inconnue est bien loin de tout danger ; elle est simplement perdue, en quête de la mairie pour un mariage. Après lui avoir indiqué le chemin le plus rapide avec un sourire rassurant, sa gratitude se teinte d'une remarque qui nous fait échanger un regard amusé. « Oh merci beaucoup ! Vous êtes adorables ! Vous formez un beau couple ! J’espère que le prochain mariage que la mairie célébrera, sera le vôtre ! » Sa spontanéité et son vœu bienveillant me laisse sans voix. Son commentaire, bien que lancé en passant, résonne avec une certaine gravité dans l'air qui nous suit alors qu'elle s'éloigne. Il soulève, dans le sillage de son départ, une myriade de pensées et de possibilités, un avenir imaginé où notre lien pourrait se transformer, évoluer vers quelque chose de différent, mais tout aussi profond. Pour l'instant, ces pensées restent suspendues entre nous, non exprimées mais palpables, alors que nous reprenons notre chemin vers le parc.

Quelques minutes de marche tranquille plus tard, nous arrivons au parc, un havre de paix au milieu de l'agitation urbaine. Nous choisissons un banc isolé, un peu à l'écart, où l'on peut se sentir seul au monde malgré la présence discrète des promeneurs. Là, dans ce cadre apaisant, je me trouve soudainement face à un élan de courage inattendu, poussé par les mots impromptus de l'inconnue plus tôt. Contre toute attente, et peut-être contre ma propre nature habituellement réservée, j'ouvre le sujet qui me tourmente en silence depuis notre retour de New-York. « Où en sommes-nous, Cassia ? » Ma question, chargée d'une vulnérabilité inhabituelle, brise le calme de notre complicité. Je pose délicatement ma main sur la sienne, cherchant dans ce geste un réconfort, une ancre alors que je m'aventure dans des eaux émotionnelles tumultueuses. « Je veux dire… J’ai l’impression que depuis New-York… Enfin… Nous ne sommes plus uniquement des amis, non ? Je ne sais pas quel terme utiliser pour qualifier notre relation. Mais ce que je peux te dire, c'est que lorsque je suis avec toi, je ne désire personne d’autre que toi. » Ces mots, une fois prononcés, semblent suspendre le temps autour de nous. J'avoue, avec une honnêteté brute, l'évolution de mes sentiments, la complexité de ce que nous sommes devenus. Il y a une part de moi qui craint d'avoir franchi une ligne, de perturber l'équilibre de notre amitié. Pourtant, une autre part, peut-être plus audacieuse, ou simplement amoureuse, aspire à reconnaître et à nommer ce changement entre nous.

Je réalise, peut-être pour la première fois avec une telle clarté, que mes aventures passées, ces distractions volages qui parsemaient mon existence avant elle, ne semblent plus avoir la moindre importance. Elles s'estompent dans le fond, reléguées à un passé lointain et flou, tandis que l'image de Cassia se dessine en premier plan, vibrante et claire. Il n'y a, en vérité, qu'une seule femme qui détient la clé de mon bonheur, qui occupe mes pensées et éveille en moi des désirs et des aspirations que je ne me connaissais pas : elle. Dans ce moment de vulnérabilité partagée, je cherche non seulement à comprendre où nous en sommes, mais aussi à lui offrir mon cœur, mais peut-être pas de manière entière encore.

Le trajet jusqu’au parc présent non loin de mon appartement est agréable. L’air frais qui balaye mon visage et mes cheveux est revigorant. Et même si je n’étais pas au lit à me reposer comme préconisé, j’étais certaine que cette ballade allait me faire le plus grand bien. Comme convenu, nous commençons à discuter. Et je continue à faire l’éloge de ce fameux homme mystère qui n’était autre que Milo. Il le savait bien d’ailleurs. Car bien que nous soyons extrêmement proches, ce n’était tout de même pas tous les jours que nous ne tarissions pas d’éloges à l’égard de l’autre. Mais le plus important de tout était sans nul doute que Milo était toujours présents à ms côtés, que ce soit dans les bons ou les mauvais moments. Et depuis hier, il me prouvait encore une fois. Mes paroles de Milo me touchent, « Je sais. Et je te l’ai dit, il n’y a que toi qui y occupe une place si importante... » dis-je un léger sourire aux lèvres. Renouvelant alors ainsi un aveu que je lui avait déjà fait il y a quelques semaines.

Sur le chemin du parc nous sommes brièvement interrompu par une inconnue qui semble perdue. Une femme qui devait se rendre à un mariage et qui malheureusement ne trouvait pas le chemin de la mairie où avait lieu la cérémonie. Milo se charge de lui répondre. La femme semble rassurée et satisfaite de la réponse. Elle remercie mon meilleur ami avant de nous complimenter tous les deux. Couple, mariage. Ces deux mots sont plus que surprenants, surtout venant d’une inconnue. Instinctivement, nous échangeons un regard amusé. Bien que dans le fond, je ne sais pour quelle raison exacte, cette remarque me met quelque peu mal à l’aise. La remerciant d’un simple sourire, nous terminons notre marche pour arriver au parc. Un petit coin de verdure, loin de l’agitation de la ville. Nous terminons notre marche pour venir s’installer sur un banc. Un lieu peut-être un peu plus isolé du chemin des autres promeneurs fréquentant le lieu. J’apprécie cette halte qui d’une part me permets de souffler un peu, car malgré tout je pouvais encore ressentir certaines douleurs, et d’autre part car elle évitait de me faire croiser un peu trop de monde qui aurait tendance à poser le regard sur moi sans doute surpris de voir une femme avec une épaule en écharpe, une plaie sur le front et quelques marques sur le visage. J’avais toujours eu du mal avec le regard d’autrui. Un léger silence s’était installé. Un silence que Milo rompu en me demandant où est ce que nous en étions. Sa main se dépose sur la mienne. Nos doigts s’entremêlent d’un geste des plus naturels. Milo continue son explication bien que j’avais déjà compris là où il voulait en venir. Mon visage se tourne vers le jeune homme. Un léger sourire se dessine sur mon visage quand il évoque que depuis mon escapade à New-York nous n’étions plus uniquement des amis. Je prends quelques secondes de réflexion. La question pouvait sembler simple en apparence mais elle n’y était pas. « Je pense qu’en effet, nous ne sommes plus uniquement que des amis... » Nous étions déjà sur la même longueur d’ondes pour cela. « Je vais être honnête avec toi, moi non plus je n’ai aucune idée de quel terme utiliser pour qualifier notre relation. Tout ce que je peux te dire c’est que… ce qu’il s’est passé à New-York, je ne le regrette pas. C’était merveilleux… » dis-je en toute sincérité, un léger sourire aux lèvres rien qu’en y repensant. Lorsque Milo m’avoue que quand il est avec moi, il ne désire personne d’autre que moi, je me sens soudainement rassurée. « Alors reste avec moi... » Des mots qui soufflaient presque comme une demande. Mais si c’était la solution pour que le jeune homme ne désire que moi, qu’il cesse ses activités volages, alors c’est ce que je souhaitais. « Est-ce que l’on doit réellement trouver un terme qui définisse ce qu’on est ? Je suis conscience que l’engagement t’effraie encore et je ne veux en aucun cas te brusquer. Tu sais, avec toi je me sens vraiment bien. Il n’y a que toi qui compte. Alors si… on se contentait pour le moment de continuer ainsi sans pour autant mettre une étiquette sur notre relation ? » Nous pouvions très bien mettre de côté les mots qui seraient susceptibles de déplaire ou d’angoisser Milo tel que « couple » « relation sérieuse » « emménagement » et tout ce qui pouvait aller avec. « Continuons ainsi, prenons notre temps...Le temps de se découvrir ou plutôt de se redécouvrir, le temps de partager d’autres moments uniques. Mais... » Et oui il y a toujours un mais. « Tu sais ô combien j’attache de l’importance à la fidélité… » commençai-je pour appréhender la suite. Milo avait déjà sans doute compris là où je voulais en venir « Même si tu n’es pas encore prêt pour t’engager disons… émotionnellement sur le long terme. Pour ce qui est de l’engagement physique, est-ce que tu te sens prêt malgré tout à m’offrir l’exclusivité ? » demandai-je au jeune homme. Bien qu’il n’y ait pas de réel engagement entre nous, ni de couple officiel. Je sais que je ne supporterai pas savoir Milo dans les draps d’une autre femme. Et si nous voulions que tout soit clair entre nous, il était sans doute important d’en discuter en amont.

 

Nichés à cet endroit discret du parc, où les bruits du monde semblent étouffés par la tranquillité de la nature, nous découvrons un havre de paix parfait pour les confidences. Là, à l'abri des regards curieux et des oreilles indiscrètes, une bulle d'intimité se forme autour de nous, rendant ce moment unique et précieux. Nos mains s'entrelacent naturellement, un geste qui, en d'autres circonstances, aurait pu sembler anodin, mais qui aujourd'hui marque un tournant dans la complexité de nos liens. Malgré les apparences, ce geste simple révèle une proximité et une compréhension mutuelle profondes.

Je prends un instant pour la contempler, capturant chaque détail de son visage, chaque éclat de son sourire, chaque nuance de sa voix qui, ensemble, composent la mélodie de son être. C'est dans ces détails que je trouve la confirmation de nos sentiments partagés, une harmonie silencieuse qui nous unit bien au-delà de l'amitié. Cassia, avec sa sensibilité et sa clairvoyance habituelles, semble partager cette perception. L'évidence de notre évolution s'impose à nous, sans mots, sans questions. Les baisers que nous avons échangés, les moments de plaisir partagé, ces instants volés au temps ne peuvent être relégués au rang de simples manifestations d'amitié. Cette prise de conscience, loin de nous effrayer, semble nous libérer. Il y a dans ce partage un soulagement, comme si mettre des mots sur nos sentiments permettait de dissiper les derniers doutes. Il ne s'agit plus de définir ce que nous sommes avec des termes convenus, mais plutôt de reconnaître la singularité de notre relation, de l'accepter pour ce qu'elle est : une histoire unique en son genre.

La demande voilée de Cassia, celle de rester à ses côtés, résonne en moi avec une force surprenante. Elle n'a pas eu besoin de formuler sa requête avec des mots précis pour que je saisisse l'ampleur de ce qu'elle espère de moi. Il est vrai, la présence de Cassia possède cet effet unique où le reste du monde semble s'effacer, où aucune autre ne saurait capturer mon attention comme elle le fait. Sa simple présence suffit à rendre tout le reste secondaire, voire invisible. Même dans un scénario aussi provocateur qu'une strip-teaseuse cherchant à attirer mon regard, je sais que mon monde se limiterait à Cassia, à son sourire, à ses yeux, à la musique de sa voix. C'est elle, et elle seule, qui occupe chaque parcelle de mon attention, chaque battement de mon cœur. Avec les autres, avant elle, je semblais simplement traverser la vie, sans but précis, sans réelle passion. Elles étaient des compagnons de voyage éphémères sur un chemin dont je ne discernais pas clairement la direction. Mais avec Cassia, tout change. À ses côtés, je ne me contente pas de vivre ; j'existe pleinement. Chaque instant passé ensemble est empreint de signification, chaque conversation, chaque silence partagé ajoute une couche de profondeur à mon existence. Elle donne du sens à chaque souffle, à chaque pas que je fais.

La passion, cette forme de l’amour qui refuse l’immédiat, fuit le prochain, veut la distance et l’invente au besoin, pour mieux se ressentir et s’exalter, trouve une résonance particulière dans ma relation avec Cassia. Elle est cette force qui nous pousse à chercher la distance, non pas pour nous éloigner, mais pour mieux savourer notre union, pour exalter chaque moment partagé. Avec Cassia, je vis une passion au sens le plus noble du terme, une passion qui enrichit, qui élève, qui transforme. Cette passion ne se contente pas de défier le temps et l'espace ; elle les réinvente. À ses côtés, chaque instant est une éternité, chaque étreinte un voyage au-delà des frontières du réel.

Lorsque Cassia aborde la question de l'engagement et le souligne comme une source d'appréhension pour moi, je sens un poids dans ma poitrine. C'est vrai, l'engagement me terrifie. J'ai toujours vécu ma vie à cent à l'heure, cherchant constamment le prochain horizon, le prochain défi. Cette soif d'aventure, ce désir insatiable d'explorer le monde, m'ont naturellement conduit vers une carrière de pilote de ligne. Ce métier, avec son rythme effréné, où chaque jour apporte son lot de nouvelles destinations, me permet de s'endormir sous un ciel pour se réveiller sous un autre, est une métaphore parfaite de ma vie sentimentale jusqu'à présent : toujours en mouvement, jamais tout à fait ancré. La question de m'engager dans une relation stable avec Cassia m'effleure l'esprit avec une intensité surprenante. La vérité, celle qui me brûle l'âme, c'est que je désire plus que tout m'ancrer à ses côtés. L'idée de construire quelque chose de durable avec elle, de partager plus que des moments éphémères, m'attire et m'effraie à la fois. C'est un désir profond, presque primal, mais il est accompagné d'une peur paralysante de ne pas être à la hauteur, de ne pas savoir être l'homme qu'elle mérite.

Je lutte pour trouver les mots justes, ceux qui pourraient exprimer à Cassia ce tourbillon d'émotions sans la blesser, sans lui donner l'impression d'être insuffisant. Comment lui dire que, malgré mes peurs, mon cœur sait qu'il n'y a qu'avec elle que je veux être ? Que malgré cette nature nomade qui a longtemps défini mon existence, l'idée de rester immobile à ses côtés m'apparaît soudain comme le plus beau des voyages ? Je cherche dans son regard un indice, une étincelle qui pourrait me guider, me montrer la voie pour partager mes sentiments sans équivoque. Je recherche l’équilibre délicat entre la vulnérabilité de l'aveu et la force de l'engagement, de lui faire comprendre que, malgré mes hésitations, malgré les turbulences de ma nature vagabonde, c'est avec elle que je veux découvrir ce que signifie réellement s'ancrer quelque part. Avec Cassia, je suis prêt à apprendre à rester, à construire une stabilité qui ne soit pas synonyme d'ennui ou de contrainte, mais plutôt une aventure partagée, un nouveau défi à relever ensemble. « Avec toi je pourrais vraiment devenir quelqu'un de bien. »

La question s'échappe de mes lèvres avec une légèreté feinte, tentant de masquer l'intensité de l'émotion qui m'anime. Mon sourire en coin, à la fois espiègle et teinté d'une certaine gravité, cherche à sonder les profondeurs de ses pensées. « Tu veux dire… Continuer de s’embrasser, de partager des moments intimes, d’être présent l’un pour l’autre, que je t'emmène au septième ciel, sans que nous officialisions réellement la nature de notre relation ? »  Ce que je cherche à travers cette question, c'est à comprendre les limites et les possibilités de ce que nous sommes en train de tisser ensemble. C'est une exploration délicate du territoire qui s'étend entre nous, un paysage émotionnel riche et complexe où les mots semblent parfois insuffisants pour capturer toute la nuance de nos sentiments. Ma question n'est pas seulement une demande de clarification ; c'est aussi une invitation pour Cassia à partager sa vision de notre avenir commun, à exprimer ses désirs et ses attentes.

Je connais Cassia. Son désir profond de revêtir un jour une belle robe blanche ne m'échappe pas ; c'est un rêve qui brille dans ses yeux à chaque mention d'un futur ensemble. Sa réflexion sur la fidélité, si innocemment posée, me touche profondément. Je réagis instinctivement, mes lèvres trouvant le front de Cassia dans un baiser tendre et réconfortant, évitant avec soin la cicatrice laissée par les déceptions passées. L'ombre de l'infidélité d'Andrew plane encore, une blessure vive qui teinte ses attentes et ses espoirs. Sa question sur l'exclusivité me frappe de plein fouet, provoquant un tourbillon d'émotions et de réflexions. Ma vie, mes choix, mes libertés passées défilent devant mes yeux, un kaléidoscope d'interrogations et de possibilités. « L’exclusivité… » je répète, laissant le mot flotter entre nous, lourd de conséquences et de promesses. « Tu sais comment cela se nomme, une relation où nous nous embrassons, partageons des moments intimes, où nous sommes présents l’un pour l’autre, et avec l’exclusivité ? » Ma question, bien que posée avec une feinte ignorance, cache une vérité que je n'ose pas encore affronter. Je joue la montre, tentant désespérément de rassembler mes pensées, de peser le pour et le contre d'une décision qui pourrait redéfinir notre avenir.

La réalité, c'est que je suis terrifié. Terrifié à l'idée de m'engager, de promettre une exclusivité qui m'a toujours semblé contraignante, un fardeau trop lourd à porter. Et pourtant, face à elle, face à la profondeur de ses yeux et à la sincérité de sa demande, une part de moi crie pour dire oui, pour plonger dans l'inconnu de cette exclusivité et découvrir ensemble ce que pourrait être notre histoire. Je lutte contre la peur de m'égarer, de perdre ce lien précieux qui nous unit. La peur de ne pas être à la hauteur de ses attentes, de ses rêves.

Assis sur ce banc, le temps de la discussion avait commencé. Un temps sans doute nécessaire pour tenter de clarifier au maximum ce qui était en train de se passer entre nous. Car en effet, personne ne pourrai dire le contraire, depuis mon escapade à New-York et notre nuit passé ensemble, notre relation avait changé. Nous étions à présents plus que des amis. Et cela, chacun de nous en avait pleinement conscience. De mon côté, je ne regrettai pas ce qu’il s’était passé entre nous. Cela avait sans doute été la plus merveilleuse nuit que j’avais passé avec un homme. Toutefois j’avais conscience que l’idée de continuer cette relation de manière officielle pouvait déplaire voir effrayer le pilote de ligne. Je proposai donc de continuer mais en prenant notre temps, sans pour autant nous coller une étiquette à nous ou à notre relation si particulière. Milo a comme une sorte de révélation en pensant qu’avec moi il pourrait devenir quelqu’un de bien. Mon regard se pose sur lui, un regard d’incompréhension mêlée à une certaine remontrance. Il était déjà quelqu’un de bien. Il l’ignorait encore, tout simplement. A cet instant, tout ce que je souhaitais c’était de ne pas rebrousser chemin. Cette nuit à New-York avait incontestablement marqué un tournant dans notre relation. Il était difficile de ne pas faire marcher arrière tout en prenant en compte l’appréhension que Milo avait de l’engagement. Je ne voulais pas que la situation devienne source de trop nombreuses interrogations, d’incertitude, ni d’angoisse pour nous deux. Nous devions clarifier la situation, c’était un fait. Alors, je proposai à Milo de continuer notre chemin ensemble sans pour autant donner une étiquette à notre relation. Le pilote de ligne résume alors en quoi consisterait notre relation, comme pour s’assurer que nous étions sur la même longueur d’onde. Un léger sourire aux lèvres s’affiche sur mon visage, surtout quand Milo évoque le fait de m’emmener au septième ciel. C’était du Milo dans toute son humilité. « Oui… Si cela te convient ainsi, alors ça me convient également... » dis-je d’une voix neutre mais pour autant très sincère. Si cela pouvait l’aider à ne pas appréhender un quelconque engagement ou à se sentir plus libre, je ne m’y opposais pas. Toutefois, j’avais une requête. Bien que je pouvais me passer d’officialiser une quelconque relation, ou alors me passer d’être nommé comme sa petite amie, ou pour d’autres détails encore, je ne me voyais pas faire l’impasse sur la fidélité. Cela semble rendre Milo quelque peu perplexe. Sa question m’interroge et me fait comprendre que le côté exclusif n’était pas forcément gagné. « Si tu penses que je vais te répondre le concubinage ou encore le mariage, tu te trompes... » dis-je légèrement amusée malgré tout. « Je te l’ai dit, pas d’étiquette sur notre relation, ni sur toi ni sur moi...On continue ce qu’on a commencé, on prend notre temps… Si c’est ce que tu souhaites aussi, bien évidemment…. » J’étais consciente que c’était sans doute beaucoup demandé à Milo. « Je ne te demande pas une réponse immédiate Milo. Prends le temps qu'il te faut...» précisai-je. Inutile de prendre une décision hâtive.
 

La légèreté de notre échange dissimule mal la profondeur de nos sentiments, un jeu subtil de mots et de regards qui danse sur le fil ténu de nos émotions. « Ah parce que tu ne te projettes pas aussi loin avec moi ? Tu ne te vois pas mariée, obligée de me supporter jusqu’à la fin de tes jours ? » ma question, teintée d'un mélange de provocation et d'humour, cherche à éclairer, même de manière détournée, les contours de nos rêves et aspirations partagés. « Très bien, je note cette précieuse information, Madame Davis, euh, Mademoiselle Henderson ! » Ma fausse indignation, ponctuée d'un clin d'œil complice, sert à alléger l'atmosphère, à nous rappeler que, malgré la gravité de nos conversations, notre capacité à rire ensemble reste intacte.

Nos mains entrelacées parlent un langage bien à elles, des caresses douces qui traduisent mieux que les mots la tendresse et le soutien mutuel qui nous lient. Le baiser que je dépose sur le dos de sa main est une promesse silencieuse, un geste de réconfort qui cherche à dissiper ses inquiétudes, à lui rappeler que, quel que soit l'avenir, mon affection pour elle est une constante inébranlable. « On peut continuer ainsi, oui. Je t’embrasse autant que je le souhaite. Je t’offre du plaisir autant que tu le veux. Et je suis là pour toi. Ah oui… J’oubliais le plus important : mon cœur t’appartient. » Ces mots, prononcés avec une sincérité désarmante, révèlent une vérité profonde : mon engagement émotionnel envers elle dépasse toute réserve physique. « Je ne regrette pas ce qui s’est passé à New-York… » Cette confidence, partagée dans un souffle, ouvre la porte à des souvenirs intenses, à une nuit qui a marqué un tournant dans notre relation. « Le plaisir que tu m’as donné ce soir-là… » Je laisse ma phrase en suspens, les mots s'envolant dans la brise légère, un non-dit qui contient tout l'univers de nos sentiments, de nos désirs partagés. « Je vais te confier un autre secret, Cassia. J’ai beau faire le tour du monde, je reviendrai toujours dans tes bras. » Cet aveu, chargé d'émotion, est plus qu'une simple affirmation ; c'est une promesse, un serment. Peu importe les distances qui peuvent nous séparer physiquement, dans mon cœur, je suis irrévocablement lié à elle. Même à l’autre bout du monde, c'est son image qui hante mes pensées.

Alors que le ciel commence à se voiler d'un manteau de nuages sombres, une brise fraîche se lève, portant en elle le présage d'une pluie imminente. Je suggère à Cassia de nous mettre en chemin vers la sécurité de son appartement, désireux de préserver la sérénité de notre moment partagé des caprices du temps. Nos mains se trouvent naturellement, se liant dans une étreinte qui semble désormais aussi nécessaire que notre prochain souffle. Sur le chemin du retour, la destinée nous fait croiser à nouveau le chemin de l'inconnue de plus tôt, son sourire en voyant nos mains entrelacées est teinté d'une complicité silencieuse, comme si, en effet, elle percevait la profondeur de notre lien, nous reconnaissant comme le couple que nous sommes devenus, ou que nous sommes sur le point de devenir.

Les premières gouttes de pluie commencent à tomber, marquant le sol de points humides, précurseurs d'un orage plus conséquent. Instinctivement, je déploie ma veste pour offrir un abri à Cassia, un geste protecteur dicté par l'affection et le souci. La pluie s'intensifie alors que nous nous hâtons, mais nous parvenons à son appartement juste à temps, évitant de justesse une averse plus sévère. Une fois à l'intérieur, la porte se referme doucement derrière nous, nous enveloppant dans une bulle de tranquillité, loin des éléments déchaînés et des regards curieux.

Dans la quiétude de son foyer, mon attention se porte sur Cassia, et plus précisément sur le pansement qui orne son front, maintenant à peine accroché. « Assieds-toi, je vais chercher le nécessaire » formulais-je, la voix empreinte d'une douce autorité. Je me précipite vers la salle de bain, fouillant rapidement l'armoire à la recherche de ce dont j'ai besoin pour soigner sa blessure. Revenant vers elle, je trouve Cassia assise sur son canapé d'angle, un îlot de vulnérabilité dans la tempête de nos vies. Je m’agenouille devant elle, je me prépare à soigner sa plaie, conscient de l'intimité du geste. « Je suis désolé, cela va un peu piquer ! » je la préviens, mon cœur serré à l'idée de lui causer la moindre douleur. Délicatement, je nettoie la blessure avec un coton imbibé d'alcool, mes gestes sont précis, empreints d'une attention particulière. Ce geste, simple en apparence, est lourd de significations. Il symbolise ma volonté d'être là pour elle, de prendre soin d'elle dans les moments de vulnérabilité, de la protéger contre les orages, qu'ils soient météorologiques ou émotionnels.

Je ne souhaitais en aucun cas car hâter Milo dans une quelconque décision. J’avais pleinement conscience que l’exclusivité que je lui demandais n’était pas rien pour lui . Tout comme je ne souhaitais pas lui faire peur en voulant aller trop vite ou en exigeant trop de chose de cette relation si particulière. D’ailleurs, j’avais évincé tout mot susceptible de le mettre mal à l’aise tel que les mots suivants : couple, concubinage et mariage. Milo réagit avec une touche d’humour, se voyant faussement vexée par mes propos. Amusée, je lui donne un léger coup d’épaule amical et taquin « Tu sais parfaitement ce que j’ai voulu dire... » Bien évidemment que je me projetais, il le savait. Mais pour le moment il n’était pas question que je parle de cela à voix haute. Nous avions mis les choses au clair : nous devions prendre notre temps, laisser couler cette relation qu’était la notre. Le fait d’avoir discuter un peu sur cette relation, sur ce que nous attendions de cette dernière mais aussi et surtout de l’un et de l’autre avait un effet bénéfique. Nous savions à présent où nous en étions. Cela avait un côté très satisfaisant. Milo, à son tour m’avoue ne pas regratter ce qui s’est passé à New-York. Il est vrai que nous n’en avions pas encore parlé. Mais l’entendre dire une telle chose de sa propre bouche me soulageait quelque peu je dois bien l’avouer. Il continue sur sa lancée, en me dévoilant quelques confidences quant au plaisir que je lui avait donné ce soir là. Un sourire, presque gênée mais pas peu fier se dessine sur mon visage. J’étais presque nostalgique de cette nuit là « Oui, une nuit inoubliable... » à tout point de vue. Une nuit qui restera à jamais gravé dans ma mémoire. Puis Milo m’avoue qu’il avait beau faire le tour du monde, il reviendrait toujours dans mes bras. « Et moi, je serais toujours là. Prête à t’accueillir à bras ouverts... » soufflai-je la voix remplie de sincérité.

Le temps était devenu soudainement changeant. Le vent s’était levé faisant ainsi arriver la pluie. Nous nous hâtons donc de quitter le parc pour prendre le chemin du retour. Non sans croiser à nouveau cette fameuse inconnue de tout à l’heure. Décidément. Une fois arrivés à l’appartement, nous ôtons chaussures et vestes. Je remarque que le pansement qui était jusqu’à présent sur mon front était mouillé et ne tenait plus. Milo aussi l’avait remarqué. Je retire avec le morceau de pansement restant quand Milo me demande de m’asseoir pendant qu’il allait chercher le nécessaire. Je prends donc place sur le canapé. Le pilote de ligne revient avec de quoi nettoyer la plaie. « Ce n’est rien, ne t’inquiète pas ». Il est vrai que le contact de l’alcool sur ma plaie piquait un peu, mais cela ne dura pas longtemps. « Te voilà médecin maintenant… Décidément, tu es une perle rare. » dis-je un peu amusée. Je continue sur la même lancée « Étant donné que j’ai été sage et courageuse, ai-je le droit à un baiser ? » demandai-je avec un air taquin et malicieux.

Une dizaine de minutes plus tard, la sonnette de la porte résonne dans l’appartement. Je lance un regard à Milo, surprise car je n’attendais personne. Je me lève et vais ouvrir la porte. « Maman…  » dis-je surprise mais tout de même heureuse de la voir. « Cassy, comment vas-tu ma chérie ? Dans quel état tu es...» me demande t-elle en venant me prendre délicatement dans ses bras. « Ça va, ça va… je te l’ai dit par message, plus de peur que de mal... » dis-je en la laissant entrer avant de refermer la porte. Ma mère m’observe, de haut en bas comme pour s’assurer elle même des mes propos. Je perçois une immense inquiétude dans son regard. « Maman, je t’assure que ça va... » Elle se résigne à me croire puis elle aperçoit Milo. Son visage s’illumine. « Oh Milo, mon garçon… Comment vas-tu ? Ça me fait plaisir de te voir. Ça fait longtemps...» dit-elle en venant l’embrasser chaleureusement. « Me voilà rassurée, tu n’es pas seule. Je me faisais un sang d’encre, tu n’as pas répondu à mes derniers messages... » Soudainement, je me rappelai que j’avais eu l’intention de le faire et puis il y avait eu la migraine et le reste de la journée était passé très vite. « Oui, c'est vrai... Excuse-moi, la journée est passée assez vite et j'ai beaucoup dormi... » je viens déposer un bisous sur sa joue pour me faire pardonner et la rassurer également.

 

Lorsque le coton imbibé d'alcool touche délicatement la plaie de Cassia, je suis instantanément aux aguets, scrutant sa réaction. La moindre grimace de douleur sur son visage m'est insupportable, me poussant à me confondre en excuses pour le désagrément causé. « Tu as vu un peu, tu as devant toi l’homme parfait ! Mais que lui manque-t-il pour te combler ? » lançais-je, jouant avec une arrogance feinte, une tentative d'alléger l'atmosphère avec un brin d'auto-dérision. Ma fausse vanité, loin d'être sérieuse, est une invitation à la taquinerie, un jeu complice qui nous est familier. La riposte de Cassia, évoquant son courage face à l'assaut du coton et de l'alcool, m'arrache un rire franc et sincère. Son esprit, même dans la douleur, reste vif et joyeux, une qualité que j'admire profondément chez elle. « Je vous trouve bien raisonnable, Mademoiselle Henderson. Un seul baiser ? C’est le lot de consolation ça… Un seul baiser ! » je réplique, feignant l'indignation tout en m'inclinant pour sceller mes mots d'un baiser doux. Ce geste tendre, bien que présenté comme une récompense légère, est empreint d'une affection profonde, un symbole de notre intimité et de notre complicité. « Je m’attendais à une récompense plus importante qu’un simple baiser ! » affirmais-je, jouant le jeu de la surprise choquée, alors que je range soigneusement la trousse à pharmacie. Cette fausse attente d'une récompense plus grande est une autre facette de notre interaction ludique, une danse de mots et de gestes qui tisse entre nous un lien toujours plus serré. Chaque taquinerie, chaque échange, enrichit la toile de notre relation, ajoutant des nuances de joie et de partage qui rendent chaque moment passé ensemble précieux.

Quand la sonnette de l'appartement retentit, un frisson d'appréhension traverse l'air entre Cassia et moi. Nos regards se croisent, empreints d'une confusion partagée, tandis que mon esprit s'emballe à l'idée que Andrew pourrait oser perturber ce havre de paix que nous avons trouvé. La perspective de le confronter à nouveau, bien que je sois prêt à la défendre, n'est pas celle que je souhaite pour notre journée. Mais s’il tient à prendre une seconde raclée, je suis tout à fait disposé à répondre à ses attentes. « Si c’est Andrew et qu’il vient pour le second round, je suis son homme. » Ma voix assurée ne plaisante pas. Encore moins lorsqu’il s’agit de Cassia. Heureusement, ce nuage d'inquiétude se dissipe dès que la voix familière de sa mère remplit l'espace, apportant avec elle un soupir de soulagement qui m'échappe involontairement.

À distance, j'observe la scène touchante de retrouvailles entre mère et fille, leur étreinte rappelant celle d'une veillée protectrice, similaire à la sollicitude que ma propre mère aurait manifestée dans une situation pareille. Leur interaction, emplie d'amour et de soin mutuel, esquisse sur mes lèvres un sourire amusé, témoignant de la beauté universelle du lien familial. L'accueil chaleureux de Madame Miller m'englobe dans leur cercle d'affection. « Bonjour Madame Miller, très bien et vous-même ? » répondais-je avec le respect et la politesse qui sied à l'instant, tout en restant en retrait, spectateur discret de leur échange. Elisabeth, avec une inquiétude palpable qui émane d'elle, rappelle à Cassia son silence aux messages, une préoccupation que ma propre mère aurait partagée dans une situation similaire. Cet écho de familiarité dans son comportement renforce le sentiment de connexion, de compréhension mutuelle entre nos familles, bien au-delà des liens du sang.

Alors que Cassia et sa mère se plongent dans une conversation intime dans le salon, je choisis discrètement de m'éclipser vers la cuisine, désireux de leur préparer du thé accompagné de quelques douceurs sucrées. Ce geste, simple mais empreint d'attention, est ma manière de contribuer à ce moment familial, de créer une atmosphère chaleureuse et accueillante qui enveloppe leur échange.

Le respect que j'éprouve pour la mère de Cassia m'a toujours guidé à maintenir une certaine forme de politesse dans nos interactions. Malgré ses invitations répétées à adopter un ton plus familier, à la tutoyer et à l'appeler par son prénom, j'ai choisi de persister dans le vouvoiement. Ce choix n'est pas le reflet d'une distance émotionnelle ou d'un manque d'affection à son égard ; bien au contraire, il symbolise le profond respect que je lui porte, une marque d'estime pour la personne qu'elle est et le rôle qu'elle joue dans la vie de Cassia.

Préparer le thé, sélectionner avec soin les biscuits et gâteaux à servir, c'est participer à ma façon à la trame de cet après-midi. Chaque geste, chaque choix de thé, chaque arrangement sur le plateau, est pensé pour apporter un peu plus de douceur à leur moment de retrouvailles. C'est un acte de service silencieux, une expression de ma gratitude pour l'accueil et l'amour qu'elle m'a toujours témoigné, malgré le formalisme de notre échange verbal. En revenant vers elles, plateau en main, je suis accueilli par des sourires qui réchauffent mon cœur. Je pose délicatement le thé sur la table, offrant ainsi un prétexte pour m'immiscer brièvement dans leur discussion, et m’asseoir à côté de Cassia.

Afin de dédramatiser un peu la situation, je plaisante quant au fait que Milo est multifonction. Je souris face à sa remarque et sa question plus ou moins rhétorique. « Mais qui te dit, qu’il ne me comble pas déjà ? » soufflai-je comme pour laisser une légère touche de suspens entre nous. Toujours dans ce petit jeu de taquinerie, je quémande un baiser sous prétexte d’avoir été courageuse face au soin, certes très minime et donc non douloureux ou presque, procuré par Milo. Je ris de bon cœur quand il évoque le fait que je sois raisonnable. « C’est l’hôpital qui se moque de la charité… Tu ne cesses de me répéter d’être raisonnable et de me reposer depuis hier... » dis-je amusée par sa remarque. « Alors soit, va pour une récompense plus importante qu’un simple baiser... » dis-je en me levant du canapé pour aller jeter le coton à la poubelle alors que Milo, lui se rendait à la salle de bain pour ranger la trousse à pharmacie.

Mais notre discussion est interrompue par la sonnette de la porte d’entrée. Nos regards se croisent, nous devons sans doute tous les deux penser à la même chose : Andrew. Mais il n’en était rien. Fort heureusement. A ma grande surprise ma mère était venue me rendre visite. Ce n’était pas son genre de venir à l’improviste mais étant donné les circonstances exceptionnelles et le fait que je n’avais pas répondu à ses derniers messages elle était venue d’elle même, inquiète. Elle ma salue alors chaleureusement, me scrutant dans les moindre détails. Puis, ravie de voir que Milo était là elle vient le saluer de bon cœur également. « Élisabeth… Combien de fois t’ai-je dit que tu pouvais m’appeler Élisabeth. » Je souris face à cette scène assez touchante, il fallait bien l’avouer. Nous nous installons alors dans le salon. Milo, de sa propre initiative s’éclipse à la cuisine pour préparer quelque chose à boire. Voir ma mère me faisait chaud au cœur. Elle si élégante, toujours tiré à quatre épingles, toujours dynamiques et chaleureuse. « Je ne savais pas que Milo était encore ici avec toi. » me dit-elle un grand sourire aux lèvres. « Si, il a décidé de rester quelques jours pour m’aider un peu... » Il est vrai que je ne l’avais pas mise au courant des dernières nouvelles. Son regard se pose sur moi, un air un peu plus grave cette fois-ci. « Je n’arrive pas à croire ce qui s’est passé… Tu as déjà porté plainte ? » Je me doutais qu’elle évoquerait ce sujet là. « Non… Et je ne pense pas le faire. » avouai-je à ma mère « Cassia, et si il recommençait ? Il ne doit plus s’approcher de toi. » Cette discussion allait me sembler longue « Maman, il ne recommencera pas. Tout est terminé entre nous. Il n’y a aucune raison qui mènerait nos chemins à se croiser à nouveau un jour. Je préfère oublié et aller de l’avant... » Milo arrive à ce moment là, déposant des tasses de thé accompagnées de petites douceurs. Nous le remercions chacune notre tour. « Merci beaucoup Milo. Tu es adorable, comme toujours. Je suis rassurée d’apprendre que Cassy soit avec toi pour quelques jours... » Et bien évidemment elle en profite « Tu pourrais peut-être la faire changer d’avis toi. Elle refuse de m’écouter et de porter plainte contre Andrew... » je lève les yeux au ciel. « Maman... » Cette dernière lève les mains en signe d’abdication « Très bien, très bien. Je ne dis plus rien là-dessus mais réfléchis bien avant de prendre ta décision définitive. » Je lui adresse un simple signe de tête pour la rassurer. Mais au fond de moi ma décision était déjà prise, et j'avais de bonnes raisons.

 

Comme à chaque rencontre, Elisabeth renouvelle avec bienveillance son invitation à briser la glace du formalisme, à la tutoyer et à l'appeler par son prénom. Face à cette demande répétée, je ne peux m'empêcher de répondre par un hochement de tête amusé, de gauche à droite, accompagné d'un sourire qui traduit à la fois mon embarras et mon affection. Malgré mes efforts et la sincérité de mon désir de lui faire plaisir, je trouve que le passage du vouvoiement au tutoiement représente une barrière invisible que je n'arrive pas à franchir.  Il y a quelque chose dans ce respect formel, ce vouvoiement persistant, qui est devenu au fil du temps une marque de mon affection et de mon respect pour elle, une sorte de rituel dans notre relation qui, bien loin de créer une distance, semble nous rapprocher d'une autre manière. C'est devenu une caractéristique de notre interaction, un trait distinctif qui, j'en suis sûr, amuse autant Elisabeth qu'il m'est cher.

Je lui exprime, à travers mon sourire et mon incapacité à changer cette habitude, une sorte de reconnaissance tacite pour tout ce qu'elle représente pour Cassia, et par extension, pour moi. « J’ai beau essayer, je n’y parviens pas. Je crois que vous appellerai toujours ainsi » avouais-je, mi-résigné, mi-amusé par cette particularité de notre relation. C'est une admission pleine de tendresse, un aveu que, malgré le passage du temps et les changements que la vie peut apporter, certaines choses restent immuables, comme des repères stables et rassurants. Elisabeth, avec la sagesse et la compréhension qui la caractérisent, accueille ma décision avec un sourire bienveillant, reconnaissant dans ce geste une forme d'intimité unique à notre relation. Cet échange, léger en surface mais profond dans son essence, renforce le lien spécial que nous partageons, un lien tissé de respect, d'affection et d'une touche d'humour qui rend notre relation si particulière.

Alors que je me fais discret, écoutant l'échange entre Cassia et sa mère, je me sens en phase avec les préoccupations d'Elisabeth. Il va sans dire que ma décision de rester auprès de Cassia pour les prochains jours, voire plus si elle en ressent le besoin, est ferme et inébranlable. « Je prendrai le temps nécessaire pour Cassia » je m'engage, appuyant mes mots par un geste tendre, posant ma main sur la sienne en signe de soutien inconditionnel. Le sujet de la plainte contre Andrew introduit une tension palpable dans l'air. L'idée, bien que lourde de conséquences, ne me semble pas dénuée de sens au vu des circonstances. Cependant, c'est la réaction d'Elisabeth, espérant que je puisse influencer Cassia dans cette direction, qui m'amène à peser mes mots avec soin. « Oh… Nous n’en avons pas encore parlé » je réponds, choisissant de rester vague pour ne pas forcer la main de Cassia ou me lancer dans un débat potentiellement délicat en ce moment.

Mon assurance se renforce lorsque je pense à la possibilité qu'Andrew puisse tenter de réintégrer la vie de Cassia. « J’espère simplement qu’Andrew ne reviendra pas dans la vie de votre fille » affirmais-je avec une fermeté qui traduit ma détermination à protéger Cassia, quelles que soient les épreuves à venir. « Si jamais il revient, je suis prêt à l’accueillir comme il se doit ! » Cette déclaration, loin d'être une bravade, est le reflet de mon engagement profond à veiller sur elle, à être son bouclier face aux tempêtes passées et futures. L'incertitude quant à ce que Cassia a pu partager avec sa mère sur notre confrontation avec Andrew me laisse pensif. Peut-être ont-elles évoqué l'incident, peut-être pas. Quoi qu'il en soit, mon rôle n'est pas de révéler ces détails, mais de me tenir prêt, à ses côtés, pour affronter ensemble les défis à venir. Ce moment de discussion, malgré ses sujets lourds, renforce ma conviction que ma place est ici, auprès de Cassia.

« Et vous, Elisabeth, comment allez-vous ? » je lance cette question avec un intérêt sincère, me levant pour aller chercher le sucre et le miel que Cassia affectionne particulièrement dans son thé. C'est une petite attention qui reflète ma connaissance intime des préférences de sa fille, mais aussi mon désir de m'assurer que chacun autour de cette table se sente considéré et soigné. Même en la présence d'Elisabeth, une figure maternelle imposante et chérie, je tiens à maintenir les bonnes manières, à montrer par de petits gestes que le respect et l'attention aux besoins de l'autre sont des valeurs que je porte haut. Ces actions, bien que routinières, sont empreintes d'une signification plus profonde. Elles témoignent de ma volonté de tisser des liens solides et respectueux avec la famille de Cassia, de m'inscrire dans le cercle de confiance et d'affection qui unit Cassia et sa mère. C'est ma manière de montrer à Elisabeth que je tiens profondément à sa fille, que je suis attentif aux détails qui contribuent à son bonheur, même les plus infimes, comme sa manière de savourer son thé. Ma question à Elisabeth n'est pas simplement une formalité ; elle est l'expression de mon respect et de mon intérêt pour son bien-être. C'est une invitation à partager, à s'ouvrir sur sa propre vie, ses propres expériences, dans un échange qui, je l'espère, enrichira notre compréhension mutuelle et renforcera les liens entre nous. En retournant vers le salon, le sucre et le miel en main, je suis conscient de contribuer à un moment de partage familial.

Milo s’était à présent joint à notre discussion. Ma mère avait émit on soulagement de savoir ce dernier avec moi pour les jours à venir. Et le pilote de ligne réitère sa volonté ferme de rester avec moi le temps nécessaire, ses paroles étaient accompagnées d’un geste tendre envers mon égard. Mon regard se pose furtivement sur lui, profitant de ce court laps de temps pour lui adresser un léger sourire. Et je savais que les mots de Milo ne confortait pas uniquement ma personne mais aussi ma mère. Toujours soucieuse de mon bien être. Mais, ma mère bien que généreuse et serviable était aussi très obstinée. Elle profite donc de la présence de Milo pour évoquer cette histoire de plainte. Milo répond avec précautions, disant simplement que nous n’en avions pas encore parlé. Il disait vrai. Cela était resté dans un coin de ma tête depuis que le docteur Wilson lui même me l’avait fortement conseillé. Mais comment porter plainte contre Andrew sachant que ce dernier pourrait aisément se retourner contre Milo ? Impossible. C’était même inenvisageable. A ce moment là, je n’ose regarder Milo. Le sujet serait sans doute sensible. « Je l’espère de tout cœur également. Je suis vraiment rassurée de savoir que ma petite Cassy peut compter sur toi. Comme toujours... » Je m’efface quelque peu de la conversation pour prendre ma tassé de thé et en prendre une première gorgée, pensive vis à vis de cette histoire de plainte. Milo prend de nouvelles de ma mère. Etait-ce une manière de changer de sujet de conversation ? Peut-être,d ans tous les cas je lui étais reconnaissante. « Très bien. Toujours très occupée par le travail mais tout va très bien. » Ma mère, depuis de nombreuses années déjà travaillait avec William, Will, son compagnon depuis presque vingt ans maintenant. L’homme qui avait fait officie de figure paternel à mon égard tout au long de mon enfance. Il avait se propre société d’importation et d’exportation de vin. « Will est en déplacement, sinon il serait venu avec moi. Mais il me charge de t’embrasser très fort. Lui aussi a été très chamboulé par… ce qui s’est passé.  » J’acquiesce en silence « C’est gentil de se part. Tu l’embrasseras en retour... » Ma mère prend sa tasse de thé en main pour commencer sa dégustation « Je n’y manquerai pas. Et toi, Milo. Tout va bien ? Et le travail ? Le moi dernier nous avons pris l’avion avec Will pour un voyage d'affaire, un avion de ta compagnie. J’ai demandé à tout hasard le nom du commandant de bord mais manque de chance ce n’était pas toi... » Je souris amusée, imaginant ma mère demander à tout va le nom du pilote.

Entre temps Milo avait fait un aller retour à la cuisine pour ramener du sucre et du miel. Je souris, amusée mais touchée par ce geste. Il n’oubliait jamais. « Merci... » Je prends le soin de mettre une touche de miel dans ma tasse de thé. « A vous regarder on dirait presque un vieux couple… A anticiper les envies de l’autre… » dit-elle amusée. Car oui ma mère elle aussi connaissait ma préférence pour déguster mon thé. « Maman... » dis-je amusée. Mais je connaissais ma mère, elle avait le don pour sentir les choses. « Depuis le temps qu’on se connaît… C’est normal de presque tout connaître l’un de l’autre... » Je tentais de dissimuler les non dits. Nous venions tout juste de clarifier les choses entre nous, il n'était pas question que je dévoile ne serait cce qu'un semblant de ce qu'il se passait entre Milo et moi.

 

L'évocation par Elisabeth de mon métier et de ses propres voyages, ponctuée par sa curiosité amusée à savoir si j'avais été son pilote lors d'une de ses escapades, suscite en moi un rire sincère et chaleureux. L'image d'elle s'enquérant auprès de l'équipage si Milo Davis était aux commandes est à la fois charmante et tout à fait plausible, témoignant de sa nature enjouée et de son intérêt pour les gens qui entourent sa fille. « J'ai beaucoup de talent, mais je ne peux malheureusement pas être dans votre avion et auprès de Cassia » répondais-je simplement en me disant intérieurement que je demanderai à mes collègues si une dame leur a demandé le nom du commandant de bord. « Oh… Je suis en formation pour quelques temps encore à New-York. Mais actuellement, je l'ai mise de côté pour rester avec Cassia » je m'empresse de le préciser. C'est important pour moi qu'Elisabeth comprenne que, malgré l'importance de ma carrière, Cassia occupe une place centrale dans ma vie, au point de réorganiser mes priorités pour être à ses côtés. « Elle doit bientôt s'achever. J'ai hâte d'être de nouveau pleinement à Fall River ! » L'enthousiasme dans ma voix est palpable. L'idée de conclure cette période de formation et de revenir m'installer plus durablement à proximité de ceux que j'aime me remplit d'une anticipation joyeuse. « Même si j’avoue que ne pas admirer New-York à bord d’un hélicoptère auprès de votre fille me manquera. » Je me demande un instant si Cassia a partagé avec sa mère l'étendue de mes déplacements récents entre Fall River et New-York, ainsi que les implications de ma formation sur notre quotidien. « Une fois ma formation achevée, je pourrais piloter des avions plus importants et m'envoler plus souvent à l'autre bout du monde. » J'ajoute cette pensée à voix haute, non sans une pointe de fierté mêlée d'un léger pincement au cœur à l'idée des séparations futures que mon métier pourrait engendrer. Cependant, derrière cette perspective d'aventures lointaines, il y a une promesse tacite souffler Cassia et à sa mère : celle de faire de notre lien un pilier inébranlable, capable de résister aux distances et au temps. « Mais ne vous inquiétez pas, même à l’autre bout du monde, je reviendrai toujours pour votre fille. » précisais-je en jetant un doux regard en direction de Cassia.

Partager ces réflexions avec Elisabeth, c'est lui assurer que, peu importe où mes ailes me portent, mon cœur a trouvé son port d'attache auprès de Cassia, et que chaque décollage sera suivi d'un atterrissage où elle m'attend.

L'attention minutieuse d'Elisabeth ne manque pas de détails, pas même l'oubli involontaire du sucre et, plus crucial encore, du miel pour le thé de Cassia. Sa remarque, teintée d'une affection chaleureuse, sur la manière dont nous nous comportons comme un vieux couple, fait naître en moi un sourire amusé. Il est vrai que notre complicité nous permet d'anticiper naturellement les besoins et les désirs de l'autre, une danse silencieuse de gestes et de regards qui traduit une profonde connaissance mutuelle. Cassia, avec sa répartie habituelle, souligne rapidement que ce niveau de compréhension et de prévenance est le fruit de nombreuses années d'amitié partagée. « Depuis le temps qu’on se connaît… C’est normal de presque tout connaître l’un de l’autre... » souligne-t-elle, validant ainsi l'observation de sa mère tout en soulignant la profondeur de notre lien. Cette capacité à se comprendre et à se soutenir mutuellement sans même avoir besoin de parler est quelque chose que nous avons tissé au fil du temps, une toile complexe d'expériences, de souvenirs et d'émotions partagées.

Ce commentaire, loin de n'être qu'une simple constatation, révèle la beauté de notre relation. Il prouve comment, à travers les années, nous avons appris à lire dans le cœur de l'autre, à deviner ses pensées, à répondre à ses besoins avant même qu'ils ne soient exprimés. Cette familiarité, ce confort que nous trouvons l'un avec l'autre, est une richesse inestimable. La réaction d'Elisabeth, mêlant amusement et tendresse, ajoute une dimension supplémentaire à cet instant partagé. Elle offre un regard extérieur sur notre dynamique, un miroir qui reflète la profondeur et la singularité de notre lien.

Malgré nos efforts pour mettre les choses au clair concernant la nature de notre relation, il est évident qu'Elisabeth a forgé sa propre interprétation de ce que Cassia et moi sommes l'un pour l'autre. Cette perception, imprégnée de l'intuition maternelle et d'une compréhension profonde des dynamiques humaines, ne me surprend guère venant de sa part. Elisabeth, avec son regard aiguisé et son expérience de la vie, semble percevoir les non-dits, ces subtiles nuances de notre comportement qui trahissent peut-être plus que nous aimerions l'admettre. Sa capacité à lire entre les lignes, à deviner les émotions cachées derrière nos façades soigneusement construites, est caractéristique de son approche bienveillante et perspicace. Ce n'est pas tant qu'elle cherche à définir notre relation dans des termes conventionnels ou à nous pousser dans une direction particulière ; plutôt, elle reconnaît et respecte la complexité de ce que nous partageons, offrant un miroir dans lequel nous pouvons nous voir plus clairement.

La manière dont Elisabeth navigue dans cette compréhension tacite, sans imposer de jugements ou d'attentes, témoigne de son respect pour notre autonomie individuelle et pour le lien unique que Cassia et moi avons tissé au fil du temps. Cela dit, sa perspective, enrichie par des années d'expérience et d'observations, nous invite à réfléchir sur ce que nous sommes vraiment l'un pour l'autre, et sur les possibilités infinies que notre avenir commun pourrait nous réserver. Sa présence ne fait pas qu'ajouter une dimension extérieure à notre relation ; elle est un catalyseur pour une introspection plus profonde, nous encourageant à explorer les profondeurs de notre connexion avec honnêteté et ouverture. C'est une invitation silencieuse à reconnaître et à célébrer la richesse de ce que nous partageons, tout en restant ouverts aux évolutions futures de notre lien, quelles qu'elles soient.

« Je veille sur elle, mais pas aussi bien que vous, Madame Miller. » Ces mots, une fois de plus, glissent de ma bouche avec une facilité déconcertante, le vouvoiement se faisant naturellement, comme une marque de respect profondément ancrée. Mon aveu, teinté d'une humilité sincère, reconnaît la place centrale qu'Elisabeth occupe dans la vie de Cassia, une gardienne inégalée de son bien-être et de son bonheur. Pourtant, au cœur de cette affirmation, se cache une promesse, une aspiration qui dépasse la simple surveillance. « Je crois que je ne pourrais vous tutoyer que lorsque Cassia aura accepté de m'épouser. » Cette déclaration, mi-sérieuse mi-joueuse, révèle non seulement mon désir de m'intégrer pleinement dans la famille, mais souligne également l'importance que j'accorde à l'union avec Cassia, la considérant comme le véritable sceau de mon appartenance à leur cercle.

Ma réflexion sur le tutoiement, conditionné par un événement aussi significatif que le mariage, souligne l'importance que j'attache à la formalité et au respect dans nos interactions actuelles. Pourtant, elle ouvre également la porte à une évolution future de notre relation, à une dynamique familiale où Elisabeth et moi partagerions un lien plus intime et personnel, symbolisé par le passage du vouvoiement au tutoiement.

Ma mère avait toujours beaucoup apprécié Milo. Elle le considérait même comme un membre à part entière de la famille. Elle était donc très heureuse de le savoir avec moi dans cette période que l’on pouvait sans doute qualifier de difficile. J’étais vraiment heureuse de les voir tous les deux bien s’entendre et discuter tout naturellement comme si la dernière fois qu’il s’était vu c’était hier et non il y a plusieurs mois. Milo, à son tour donne des nouvelles concernant son travail et surtout sa formation actuelle à New-York. « New-York en hélicoptère ? » demande t-elle surprise. Oui j’avais évoque mon escapade dans la Grosse Pomme avec Milo mais je n’avais pas donné tous les détails. « Oui, Milo a trouvé une manière toute particulière de me faire visiter la ville. C’était incroyable... » dis-je les souvenirs encore frais dans mon esprit. Milo évoque l’après de sa formation. J’étais incroyablement fière de lui mais l’imaginer devoir s’absenter pour plusieurs jours me serrait déjà le cœur. « Incroyable. C’est très impressionnant Milo. Tes parents doivent être tellement fiers de toi. Et je le suis aussi... » dit-elle le plus sincèrement du monde. Et quand Milo rassure ma mère quant au fait que même à l’autre bout du monde il finirait par revenir vers moi ma mère réponds d’un ton amusé « Oh mais je ne suis pas inquiète. Vous avez toujours été insérables vous deux... » Il est vrai que la vie avait toujours fait en sorte que l’on se retrouve toujours rapidement. Alors que Milo, toujours très attentionné, vient déposer du sucre et du miel pour agrémenter mon thé, ma mère se permet une remarque quant au fait que l’on ressemblait à un vieux couple à agir de la sorte. Décidément, cela faisait la deuxième fois dans la même journée. Je tente de donner des explications rationnelles au fait que oui en effet, nous anticipions beaucoup les fais et gestes de l’autre tous comme nos envies. Je prétexte tout simplement que cette manière d’agir était due tout simplement à nos nombreuses années d’amitié.

Et en continuant cette douce dynamique dans notre conversation, Milo souligne le fait qu’il ne veillait pas aussi bien sur moi que ma mère. « H’m… je n’en suis pas aussi sûre… Disons que nous avons tous les deux notre manière bien à nous de veiller sur elle. » dit-elle en lui adressant un léger sourire complice.  Néanmoins, ce qu’ajoute Milo par la suite concernant un potentiel tutoiement à l’unique condition que j’accepte de l’épouser me surprend au plus haut point. A tel point que je manque d’avaler mon thé de travers. J’étais un peu perplexe, alors qu’il y a une heure à peine on se disait être tout les deux d’accord pour prendre notre temps et lui laisser le temps d’accepter un engagement à long terme.  Ma mère, pensant sans doute que Milo plaisantait en tout point se met à rire de bon cœur « Alors vivement que ce jour arrive ! Et tu as déjà ma bénédiction... » dit-elle en souriant de bon cœur, plaisantant à son tour. Impossible de ne pas sourire à la scène qui se déroule en ce moment même tant il y avait de potentiels et véritables engagements alors que ma mère semblait sans doute que tout ceci n’était que plaisanterie. Bien que, elle m’avait déjà avoué à plusieurs reprises que Milo était un gendre idéal.

La discussion se poursuit dans une bonne humeur des plus agréables. Jusqu’au moment où ma mère décide de prendre congé. Nous la raccompagnons alors jusqu’à la porte. Ma mère me prend délicatement dans ses bras « Et surtout, prends bien soin de toi. Et n’oublies pas de me donner des nouvelles, d’accord ? Un peu plus même, ce ne serait pas du luxe... » dit-elle me faisant passer ainsi un message. « Oui ne t’inquiète pas. Et promis, je te donnerai plus de nouvelles... » Ma mère se retourne vers Milo qu’elle embrasse pour le saluer « Et toi aussi, prends soin de toi. Et encore merci pour ce que tu fais pour Cassy... » Ma mère vient déposer un énième baiser sur ma joue « A bientôt » je lui adresse un dernier sourire « Oui, à bientôt maman, merci d’être venue. » Un dernier au revoir et là voilà partie. Je referme alors la porte d’entrée, n’oubliant pas de fermer cette dernière à clé.
 

Le souvenir de ce week-end à New-York continue de s’éprendre de ma mémoire, me procurant une sensation de bien-être qui dépasse de loin le simple plaisir de la découverte urbaine vue du ciel. Mon sourire, en coin, se teinte d'une complicité évidente alors que je lance un regard à Cassia, évoquant sans mots les moments partagés qui ont rendu ce séjour inoubliable. La remarque d'Elisabeth, affirmant que mes parents devaient être fiers de moi et qu'elle l'était également, résonne en moi avec une force particulière. C'est une reconnaissance qui va au-delà de la fierté professionnelle, touchant à la connexion profonde et indéniable que Cassia et moi partageons. Elisabeth poursuit, soulignant notre inséparabilité, une vérité qui s'est manifestée à travers les années. Malgré les distances, les circonstances, et les périodes de séparation, nous avons toujours trouvé le chemin du retour l'un vers l'autre, comme guidés par une boussole intérieure qui ne connaît qu'une seule direction : nous. Cette constance, ce fil invisible mais indestructible qui nous lie, est une source de joie et de certitude dans un monde en perpétuel changement.

Lorsque la mère de Cassia exprime sa bénédiction pour un potentiel mariage avec sa fille, un sentiment d'émerveillement m'envahit, amplifiant le large sourire qui orne déjà mon visage. C'est une approbation qui signifie plus que le simple accord d'une mère ; c'est la reconnaissance d'un lien qui a résisté à l'épreuve du temps, qui s'est renforcé et approfondi, prêt à franchir le seuil vers un engagement plus profond. À cet instant précis, Cassia, surprise par cette déclaration, manque de s'étouffer, me tirant brusquement de ma rêverie. Mon attention se focalise immédiatement sur elle, prêt à intervenir, à lui venir en aide. Sa bénédiction n'est pas seulement un soutien à notre union potentielle ; elle est aussi un rappel de l'importance de chérir et de protéger ce que nous avons construit.

La conversation avec Elisabeth se déroule dans une atmosphère chaleureuse et intime, jusqu'à ce qu'elle décide qu'il est temps de nous laisser. Je regarde avec une certaine solennité son départ, écoutant attentivement ses recommandations finales adressées à Cassia. Elle incarne le rôle de la mère protectrice à la perfection, insistant pour que sa fille communique davantage et veille sur elle-même. Lorsque Elisabeth se tourne vers moi pour me dire au revoir, je réponds par un hochement de tête respectueux, un geste simple mais empreint de gratitude et de promesses silencieuses.

Une fois la porte fermée derrière elle, plongeant l'appartement dans un silence soudain, je me dirige vers la cuisine dans un mouvement presque automatique. Je m'attelle à la vaisselle, une tâche ordinaire qui me permet de rassembler mes pensées, de m'occuper les mains tout en laissant mon esprit vagabonder. Ce n'est pas seulement un acte de considération pour Cassia, pour lui éviter la fatigue, c'est aussi une stratégie de diversion, un moyen de gagner du temps avant d'affronter les sujets qui pèsent inévitablement sur nous. Je suis pleinement conscient que ma mention légère, presque en passant, de notre potentiel mariage a laissé une empreinte sur l'atmosphère entre nous. De même, l'ombre de ma formation à venir, avec ses implications de longues périodes loin de Fall River – et par extension, loin de Cassia –, plane sur nos échanges. Ces sujets, lourds de conséquences et d'émotions, requièrent une attention particulière, un moment choisi pour être abordés avec la délicatesse et la sincérité qu'ils méritent. Alors que je rince les derniers verres, je me prépare mentalement à cette conversation inévitable. Je termine la vaisselle, essuyant mes mains sur un torchon, avant de me retourner vers Cassia, prêt à ouvrir mon cœur, à partager mes pensées et à écouter les siennes. « Tout s’est bien passé, non ? Ta mère est toujours aussi charmante ! »

La discussion entre ma mère, Milo et moi se poursuit tranquillement, chaleureusement. J’étais ravie qu’elle soit venue, j’en avais ans doute besoin aussi tout au fond de moi. Les sujets de conversations sont nombreux jusqu’au moment où ma mère doit prendre congé. Elle nous salue chaleureusement et, comme si nous étions encore des enfants, nous demande de prendre soin de nous.

Ma mère étant partie, l’appartement est à présent plongé dans un léger silence. Et à peine ai-je fermé la porte à clé que Milo débarrasse déjà les tasses de la petite table basse pour s’affairer à les laver à la cuisine. Quant à moi, je ramène tranquillement de mon bras valide le pot de miel et la boite à sucre à la cuisine. Tout était calme et ça faisait du bien. J’étais heureuse d’avoir pu voir ma mère et d’avoir pu la rassurer comme je pouvais également. Milo termine la vaisselle et se tourna alors vers moi. Je m’appuie contre le plan de travail le regardant s’essayer les mains dans le torchon. Je souris face à sa question. « Oui, tout s’est très bien passé... » Mon sourire s’élargit davantage en entendant Milo complimenter ma mère « Et elle t’apprécie toujours autant... » dis-je heureuse de voir que cette complicité entre eux était resté intacte avec le temps. Mon regard se pose sur le pilote de ligne. Toutes les paroles prononcées durant cette longue discussion me reviennent en tête. Ses départs lointains après sa formation, le sujet d’Andrew et aussi cette remarque sur un potentiel future mariage. « Tu te rends compte qu’il s’en ai fallut de peu pour qu’elle n’envoie pas de suite les invitations pour le mariage ? Ou devrais-je dire, notre mariage… » demandai-je amusée mais sérieuse malgré tout. Il est vrai que j'étais un peu perplexe quant à ses paroles, lui qui avait encore peur de s'engager et qui n'avait toujours pas répondu quant à ma requête d'une exclusivité venant de sa part.

 

La réponse de Cassia à mes allusions concernant notre potentiel mariage capte immédiatement mon attention, son commentaire léger sur l'envoi immédiat des faire-part par Elisabeth amplifiant l'ambiance détendue entre nous. Je saisis l'occasion pour poursuivre sur cette note humoristique, « C’est vrai. Peut-être qu’elle va envoyer les faire-part tout de suite, qui sait ! » Ma voix, teintée de plaisanterie, cherche à maintenir cette légèreté, cette bulle de complicité qui nous enveloppe. Cependant, derrière ce voile de légèreté, je perçois l'importance de revenir sur notre discussion précédente, de ne pas laisser les non-dits ou les malentendus s'installer entre nous. « Dis-moi… Tu sais… Si tu veux que nous reparlions de notre conversation de tout à l’heure, je suis totalement disposé à t’écouter et en parler. » Cette proposition, formulée avec douceur, est mon invitation à ouvrir un espace de dialogue, à explorer ensemble les sentiments et les pensées qui ont émergé suite à notre échange sur l'avenir. C'est une main tendue vers elle, un geste qui signifie que, au-delà des rires et des plaisanteries, je suis prêt à accueillir ses réflexions, ses doutes, et ses désirs avec tout le sérieux et l'attention qu'ils méritent.« Et aussi d’autre chose… » En prononçant ces mots, je cherche à lui assurer que son ressenti est primordial pour moi, que notre relation, avec toutes ses potentialités et ses incertitudes, est un sujet que je souhaite aborder avec ouverture et sincérité. C'est une démarche qui va au-delà de la simple communication ; c'est une affirmation de mon engagement envers elle, de ma volonté de construire un avenir ensemble, fondé sur la compréhension mutuelle et le respect de nos besoins et aspirations individuels.

Je reste attentif, patient, prêt à écouter et à dialoguer, à naviguer à travers les complexités de nos sentiments avec la tendresse et la profondeur que notre relation mérite. Cette proposition de conversation est un pas de plus vers une intimité renforcée, vers une compréhension plus profonde de ce que nous sommes l'un pour l'autre et de ce que nous pouvons devenir. Dans cet instant de vulnérabilité partagée, je me tiens prêt à accueillir tout ce qu'elle a à dire, à affronter ensemble les défis de notre présent et à rêver à l'unisson de notre futur.

« J’espère que ta mère ne va pas croiser la mienne au supermarché, sinon on peut être sûrs et certains que la mienne ne va pas tarder à débarquer ! » je lance cette remarque en me rapprochant de Cassia, un sourire amusé flottant sur mes lèvres. L'idée des deux mères se rencontrant par hasard et partageant leurs impressions et peut-être même leurs plans pour nous concernant ne manque pas de piquant. Il y a dans cette perspective une certaine comédie, un scénario où nos vies semblent se jouer aussi à l'extérieur de notre bulle, orchestrées par des forces maternelles bien intentionnées mais peut-être un peu trop enthousiastes.

En rejoignant Cassia, je cherche à alléger l'atmosphère, à introduire une touche d'humour dans le tissu de notre quotidien parfois trop sérieux. C'est une manière de dire que, peu importe les tempêtes, les discussions sérieuses ou les possibles interventions familiales, nous avons toujours la capacité de nous retrouver, de rire ensemble des situations les plus improbables. Tout en plaisantant sur la possibilité d'une visite impromptue de ma mère, je signale à Cassia que, quelles que soient les pressions extérieures, quelles que soient les opinions ou les espoirs de nos mères, nous sommes ensemble dans cette aventure, naviguant côte à côte à travers les attentes familiales, les décisions partagées et les moments d'incertitude