Mon esprit tourmenté, j’avais  tenté de trouver du réconforte et de la confiance près de Milo. Ces paroles avaient été un véritable baume à mon myocarde meurtri. Si bien que j’avais décidé non plus d’écouter la raison mais mon cœur. Mes lèvres étaient donc venues à la rencontre de celles de Milo afin d’échanger un baiser passionné mais surtout sincère et très intense. Ce baiser j’en avais eu envie, j’en avais eu besoin. Ce doux échange qui venait d’avoir lieu entre nous me confortait sur deux points. Le premier, c’est que cette proximité entre nous deux m’avait terriblement manqué. Le second, c’est que la réaction de Milo vis à vis de ce baiser me consolait quant au fait que mon pouvoir de séduction n’était pas inexistant.

Ce baiser terminé, un léger silence s’installe. Nos regards se croisent et bien qu’aucun mot ne soient prononcés,nous arrivons tout de même à nous comprendre. Parfois, il suffisait d’un simple regard ou d’un simple sourire. Pas de regrets, pas même la moindre excuse face à ce geste sans doute inattendu mais tant désiré. Bien au contraire, ce baiser semblait être à l’aube d’une ère nouvelle. Un simple aperçu de ce que notre désir avait l’intention de nous faire faire. Milo me décrit faussement sa déception quant à ce seul et unique baiser. Un léger sourire se dessine sur mon visage. Mon regard toujours plongé dans le sien, mes lèvres viennent tantôt effleurer les siennes tantôt les fuir comme si nous voulions un peu jouer à nouveau à ce jeu que nous appréciions tant ces dernières semaines. « Mais je n’ai pas dit que nous allions nous arrêter là, monsieur Davis... » dis-je d’une voix amusée mais aussi pleine de défi.

Mes lèvres reprirent alors le chemin des siennes, fougueusement cette fois-ci. Et bien que nos corps soient proches j’en voulais davantage, alors pour réduire le peu d’espace entre nos deux corps et pour plus de confort, je fis passer une de mes jambes au dessus de Milo afin de me retrouver assise, à califourchon, sur lui. Mes lèvres n’avaient toujours pas quitter les siennes. Mes mains quant à elle avaient glissées tendrement sur ton torse et commençaient à défaire un à un les boutons de sa chemise jusqu’au moment où enfin son torse et son abdomen, parfaitement sculpté, étaient apparents et à porté de main. Mes lèvres quittèrent le temps d’un court instant celles de Milo pour venir déposer quelques baisers le long de son cou « Montre moi... » ma voix était entrecoupée par les doux baisers que je déposais sur la peau du jeune homme « que je suis séduisante » dis-je dans un léger murmure. Une demande, un défi. Tout ce que je savais à ce moment là c’est que j’avais besoin de ses lèvres, j’avais besoin de sentir sa peau contre la mienne. J’avais besoin et envie de son être tout entier.

Ce moment divin que nous venions de partager venait de prendre fin. Nos corps toujours entrelacés reprenaient doucement leur souffle. Mon visage niché au creux du coup de Milo, je reprenais quant à moi doucement mes esprits. Mes muscles, après avoir été rondement sollicités, se décontractaient petit à petit. Mon esprit lui, commençait doucement mais sûrement à se rendre compte réellement de ce qu’il venait de se passer. Pour la première fois, nous nous étions donné l’un à l’autre, pour la première fois nous avions franchi cette limite que l’on pensait jusqu’à présent infranchissable. Mais je ne regrettais absolument pas. Ce moment partagé avec Milo restera sans doute à jamais gravé dans ma mémoire. Tout avait été si parfait. L’alchimie déjà présente entre nous n’avait fait que se décupler lors de ce moment de pur intimité, de pur abandon de soi. Dans un geste doux et habile, Milo se retourne légèrement afin de s’allonger sur le dos à mes côtés. Je viens m’allonger sur le côté, me blottissant contre lui. Je déposer un doux baiser sur son torse avant d’y poser délicatement mon visage. « Et dire que tu m’avais prévenu…que tu ne pouvais me résister et que je pouvais te faire monter en température... » dis-je en souriant légèrement en reprenant les paroles prononcés quelques temps plus tôt par Milo lui même. Malgré ce moment, rien ne changeait entre nous. Les taquineries avaient toujours lieu d’être. Ma main caressant délicatement son torse du bout de doigts, je finis par redresser mon visage pour regarder le jeune homme. Un sourire suspendu à mes lèvres, « Je me sens si bien, avec toi... » avouai-je dans un léger murmure. Ces paroles étaient plus que sincères. Elle trahissait tout le bonheur, tout le plaisir que j'avais pu ressentir à être sienne ce soir, et à vivre tant de moments partagés avec lui.

Le souffle encore haletant, je m'efforce de retrouver mon calme, la chaleur de l'instant se dissipant doucement autour de nous. Allongé, le regard fixé au plafond l’espace de quelques secondes, je sens Cassia se mouvoir délicatement pour venir m'embrasser, sa présence se faisant immédiatement enveloppante et rassurante. Elle se blottit contre mon flanc, sa main dessinant des motifs absents sur mon torse avec une douceur infinie. Je me laisse emporter par la tendresse de son geste, chaque effleurement me rappelant à quel point elle m'est précieuse.Son murmure, teinté d'une légèreté amusée, me tire un sourire. Elle évoque, avec cette pointe d’humour qui nous est propre, ma propension à succomber sous le poids de son regard, celui-là même qui a le pouvoir de me consumer de désir en un instant. Son baiser, déposé avec une infinie délicatesse sur mon torse, avant qu'elle n'y cache son visage, est une invitation à l'intimité que je m'empresse d'accepter, élargissant l'étreinte de mes bras pour l'accueillir encore plus près. « Oh mais vous êtes plus séduisante et attirante que vous ne pouvez le penser Mademoiselle Henderson. » Je dépose un baiser empreint d'affection sur sa tempe, un geste silencieux mais lourd de significations. « Et puis… » Je ne dis rien, laissant un suspens se former. « …Je suis un homme plein de surprise ! » lui précisais-je en me penchant pour embrasser sa poitrine l’air insatiable. « Moi aussi, je suis bien avec toi Cassia… Vraiment. » Je ne suis pas certain de comprendre ni de savoir où cet intime moment nous conduira, mais je veux vivre cette aventure avec elle. Avec Cassia et personne d’autre.

Mes lèvres cherchent les siennes avec une tendresse renouvelée, une douceur qui se veut promesse d'une nuit différente, unique. Ce moment, je le veux loin des précédents, loin des étreintes éphémères et des adieux précipités. Je désire m'ancrer à ses côtés, construire des souvenirs qui défient le temps, non pas m'éclipser à l'aube, emportant avec moi la chaleur de son corps comme un voleur. En caressant sa joue d'un revers de pouce, je réalise l'ampleur de mon désir pour elle, un désir si profond qu'il en devient presque douloureux. Si je me laissais aller, je nous offrirais un répit, juste assez pour que nos souffles se mêlent à nouveau, pour que nos corps battent à l'unisson.

Dans le silence qui enveloppe notre intimité, ma voix s'élève, fragile mais sincère. « Tu peux me promettre une chose ? » Mes mots flottent entre nous, chargés d'une vulnérabilité que je ne me connaissais pas. « Promets-moi de ne plus jamais douter de toi… » Ce n'est pas tant une requête pour que rien ne change entre nous, que nous demeurions des confidents, des amis, des amants. C'est plutôt un souhait pour elle, pour son bien-être. Je veux qu'elle se voie à travers mes yeux, qu'elle comprenne sa valeur, qu'elle saisisse l'étendue de son importance, non seulement pour moi mais pour le monde.

Je ne suis pas aveugle. Je suis pleinement conscient de la réalité qui nous entoure. Les cicatrices laissées par l'infidélité d'Andrew ne sont pas invisibles à mes yeux. Elles imprègnent chaque silence, chaque hésitation, chaque regard perdu dans le vide. Je comprends, avec une clarté douloureuse, que le chemin vers la guérison sera long et semé d'embûches. Une chose est indéniable : je serai là, inébranlable, à chaque étape de ce voyage vers la renaissance. Je lui offrirai mon épaule sur laquelle pleurer, ma main pour la guider, et mon cœur pour lui rappeler qu'elle est digne d'amour, d'un amour authentique et sans faille. À travers les jours sombres, je serai sa lumière, un phare dans la nuit de son désarroi. Et dans les moments de joie, je serai là pour célébrer avec elle, lui rappelant que chaque petite victoire est un pas de plus vers la guérison.

Blottie contre Milo, je profitai encore un instant de la douceur et de la chaleur de son corps. Bien que ce soir nous soyons devenus amants, cela ne changeait en rien notre coutume habituelle de nous taquiner un peu. C’est exactement ce que je venais de faire en rappelant à Milo ses propres paroles prononcées depuis que j’étais arrivée en ville. Ce qu’il répond me fait sourire. Oui ce soir il m’avait montré à quel point il me trouvait séduisante et attirante. Quand Milo ajoute qu’il était un homme plein de surprise, je souris de plus belle. Alors que le pilote de ligne vient à nouveau embrasser ma poitrine, mes mains glissent tendrement dans ses cheveux. « Oui, c’est ce que j’ai pu voir... » dis-je amusée par se remarque. Ce soir, comme toujours et peut-être même encore plus que je ne le pensais, je m’étais vraiment sentie bien avec Milo. Ce moment que nous avions partagé ne ressemblait à aucun autre que j’avais pu connaître avec un autre homme. Comme si, le fait de se connaître depuis de si nombreuses années, nous avait aidé à mieux comprendre ce que désirait l’autre.

Après quelques nouveaux baisers, un léger silence s’installe dans la chambre. Non pas un silence pesant mais plutôt un silence reposant. Milo brise ce silence en premier en me demandant de lui promettre une chose. Intriguée, mon visage se tourne légèrement pour regarder mon meilleur ami. Ce dernier me fait promettre de ne plus jamais douter de moi. Un léger sourire apparaît sur mon visage. La demande de Milo pouvait en apparence être simpliste, mais dans le fond elle n’y était pas tant que cela. « Cela ne va pas être si facile... » avouai-je au jeune homme. « Mais je te promets qu’un jour, je ne douterai plus jamais de moi. » Cette réponse soulignait tout la volonté que j’avais en moi pour reprendre confiance le plus rapidement possible. Cette confiance déjà fébrile, avait été brisée par la tromperie d’Andrew. Mais je ne voulais pas que cela me poursuive à vie. Alors oui, j’apprendrai à avoir à nouveau confiance en moi-même. Et sur ces mots, je viens déposer un doux baiser sur les lèvres de Milo comme pour sceller officiellement cette promesse.

Les incertitudes qui assaillent Cassia m'atteignent profondément. Je refuse catégoriquement qu'elle doute de sa propre valeur, surtout à cause des trahisons d'Andrew. Il lui a déjà volé trop de son temps, de son énergie, et je ne supporterai pas qu'il lui arrache également son sourire radieux et sa confiance en elle. Lorsqu'elle m'avoue que le chemin vers la confiance en soi sera semé d'embûches, un serrement s'empare de mon cœur. Cependant, elle ajoute avec une lueur d'espoir qu'un jour, elle se libérera de ses doutes. Cela me procure un certain réconfort, bien que mes inquiétudes ne soient pas totalement apaisées.

Cette situation me fait prendre conscience de l'impact que mes propres actions ont pu avoir sur mes relations passées. Je réalise l'amertume et le désarroi qu'ont dû ressentir celles que j'ai laissées derrière moi, voyant peu après mon attention se porter sur une autre. Je refuse de reproduire ce schéma avec Cassia, de devenir l'homme qu'elle regrettera. Fuir n'est pas une option pour moi. Au contraire, je trouve un apaisement certain à rester à ses côtés, d'autant plus que je ne me sens pas prêt à conclure cette soirée.

Mes lèvres se mettent à la recherche des siennes avec une douce insistance, explorant le chemin de son cou, où je me sens capable de me perdre sans fin. J'aspire à ce que ce moment d'intimité s'étire indéfiniment, nous éloignant de toute réalité extérieure, nous isolant de ses tracas, en particulier de celui qui porte le nom d'Andrew. Dans cet instant suspendu, je souhaite lui offrir un refuge, un havre où elle peut momentanément oublier ses peines et se rappeler de la légèreté de l'être, loin des ombres du passé. « Je crois que… » Et sans un mot j’embrasse de nouveau sa poitrine dénudée. « ...Je suis accro à vous Mademoiselle Henderson » Un dernier regard complice et je me glisse sous la couette d’un air purement innocent. Mon souffle reprend possession de son épiderme. Il suit la fine ligne de son corps avant de s'adonner à un nouveau plaisir plus intime.

Less premiers rayons du soleil tentent en vain de percer les voiles de ma conscience encore engourdie par le sommeil, je savoure un sentiment de plénitude rare. Le bonheur me berce délicatement, entrelacé aux souvenirs de la veille passée avec Cassia. Elle repose encore dans les bras de Morphée, sa respiration douce rythmant le silence de la chambre. Je ne résiste pas à l'envie de capturer ce moment de tranquillité, m'emparant d'un baiser furtif qui ne perturbe pas son sommeil. Avec une légèreté dans le cœur, je quitte le confort du lit, me mettant en quête de nos vêtements, témoins éparpillés de notre intimité partagée, disséminés dans l'appartement. Mon esprit déjà s'affaire à concocter pour Cassia un petit-déjeuner qui saurait refléter la tendresse de mes sentiments, une manière de prolonger la magie de notre nuit ensemble.

Pourtant, une ombre vient effleurer mon bonheur naissant à la pensée de son départ imminent. Mon esprit compte déjà les jours avant mon retour à Fall River, où le désir de la revoir m'envahit avec une intensité surprenante. Alors, une idée audacieuse et un brin impulsive germe dans mon esprit.

Avec la discrétion d'un chat, ou plutôt d’un chaton, je m'approche de son sac à main, veillant à ne produire aucun bruit qui pourrait la réveiller. Mon cœur bat la vite et fort alors que je fouille délicatement à la recherche de son billet de retour. Les informations en main, je remets tout en place avec un soin méticuleux, veillant à ne laisser aucune trace de mon passage.
Sans perdre un instant, je m'éclipse dans la pièce voisine, le téléphone à la main, prêt à user de quelques subterfuges pour modifier ses plans de voyage. Dans l'écho de chaque conversation téléphonique, je mets en jeu mon espoir, la possibilité d'une escapade prolongée à ses côtés, avant que le quotidien ne nous rattrape.

Là, dans les bras de Milo je me sentais merveilleusement bien. Les quelques mots échangés ne faisaient que renforcer l’idée que, notre relation était effectivement unique et amenée à évoluer. Telle une destinée.

Épuisée par notre soirée, j’avais rejoins rapidement les bras de Morphée. Comblée et sereine. La nuit fut excellente, très réparatrice comparé à celle de la veille où l’ombre d’Andrew planait encore trop souvent au-dessus de moi. Mes yeux commencent à s’ouvrir doucement. Et à peine éveillée, les souvenirs de la veille me viennent en tête provoquant alors un doux sourire sur mon visage. En me retournant, je constate que Milo n’est plus dans le lit. Les bruits lointain venant d’une autre pièce de l’appartement me conforte dans l’idée que le jeune homme n’est pas loin. Alors doucement, je me lève du lit à mon tour. Je me mets à la recherche d’une tenue pour la journée dans mon sac de voyage avant de quitter la chambre pour rejoindre Milo dans la cuisine. Un sourire se dessine immédiatement en le voyant préparer le petit-déjeuner. « Hey... » dis-je en m’approchant de lui. Je viens me blottir contre lui, venant nicher mon visage au creux de son cou afin d’y déposer un doux baiser. « H’m… je n’aime pas me réveiller seule dans un lit... » dis-je pour plaisanter un peu. Il est vrai que j’aurai bien prolonger notre nuit un peu plus longtemps mais de toute manière cela n’aurait pas été possible. Mon retour pour Fall River approchant à grands pas. « Mais vu ce que tu as préparé… tu es tout pardonné... » dis-je pour le taquiner un peu. Je faisais référence au petit déjeuner que Milo était en train de concocter pour nous.

Jetant un œil à l’heure. Je commence à avoir le cœur un peu lourd à l’approche du départ. « Tu sais, mon vol est pour bientôt… Tu penses que tu pourrais m’emmener à l’aéroport ? » demandai-je à Milo. Peut-être avait-il d’autre obligations à ce jour, nous n’en avions pas encore discuté. Et si tel était le cas, je prendrai un taxi sans aucun problème.

Je ne peux m'empêcher de percevoir sa présence, même enveloppé dans le silence le plus complet. Il y a quelque chose dans l'air, une sorte de chaleur invisible, qui me signale sa proximité. Lorsqu'elle vient se nicher contre moi, mon cœur s'accélère légèrement, une réaction spontanée à sa proximité. Mes bras l'entourent naturellement, comme guidés par un instinct ancestral. Un baiser délicat sur sa tempe scelle ce moment de tendresse. « C'est noté, Mademoiselle Henderson » murmurais-je, l'air espiègle, parfaitement conscient de son aversion pour le sommeil solitaire. « Je vais m'assurer de me faire pardonner au plus vite » ajoutais-je, un sourire dans la voix, avant de la soulever délicatement pour la poser sur le plan de travail de la cuisine. Nos lèvres se retrouvent dans un échange tendre et réconfortant. « Crois-moi, aucun pancake au monde ne pourrait rivaliser avec ton charme. Si tu continues de me regarde comme ça, je vais devoir sauter le petit déjeuner pour passer directement au dessert ! »

« La semaine filera à toute allure, je te le promets. Je serai de retour dès le weekend prochain, peut-être même avant... si tu es sage » je continue, volant un autre baiser, la légèreté dans l'air. « Je demanderai à Erin de me tenir informé de ta sagesse » lançais-je en plaisantant, bien conscient de l'antipathie que Cassia nourrit à l'égard d'Erin.

Face à l'évocation de son départ, je feins l'indifférence, répondant avec désinvolture : « Oh, ne t'imagine pas te débarrasser de moi aussi facilement. » Mon esprit est déjà occupé par les surprises que je lui réserve, un secret que je garde soigneusement.

Pendant qu'elle savoure son petit-déjeuner, je m'affaire à sortir une planche à repasser, préparant ma chemise sous son regard attentif. « La prochaine fois, tu auras carte blanche pour me l'arracher » je lance, feignant l'innocence, tout en laissant transparaître un brin de malice. Ce jeu entre nous, cette danse de mots et de gestes, c'est le tissu de notre relation, un mélange de taquineries, de tendresse, et d'une promesse silencieuse de jours meilleurs, ensemble.

La journée semble filer à la vitesse de la lumière, chaque heure s'effaçant plus vite que la précédente. Dans ce tourbillon de moments partagés, je m'accroche à chacun d'entre eux, essayant de graver dans ma mémoire le son de sa voix, la chaleur de sa peau, l'éclat de son rire. Pourtant, malgré mes efforts, je ne peux m'empêcher de ressentir une sorte de mélancolie, une nostalgie anticipée pour tous ces instants éphémères que nous partageons. Je voudrais pouvoir arrêter le temps, le ralentir au moins, pour m'imprégner un peu plus de sa présence, savourer chaque seconde à ses côtés comme si c'était la dernière. Mais le temps, indifférent à mes désirs, poursuit sa course inexorable.

Le trajet jusqu'à l'aéroport est empreint d'un silence chargé d'émotions. Assis côte à côte, nos mains se trouvent et s'entrelacent, comme pour se rassurer mutuellement de l'inévitabilité de ce moment. Chaque kilomètre parcouru nous rapproche de cet adieu temporaire, amplifiant la lourdeur qui s'est installée dans mon cœur. Je jette de temps en temps un regard vers elle, capturant chaque détail de son visage, comme si je cherchais à le mémoriser avant que la distance ne nous sépare.

Arrivés à l'aéroport, le moment de la séparation devient tangible, presque palpable. Le poids de l'au revoir temporaire s'alourdit, se mêlant à l'espoir et à la promesse de retrouvailles futures. Chaque pas vers le hall des départs est un mélange de résignation et de détermination, une lutte intérieure entre laisser partir et tenir bon. Je l'accompagne jusqu'au point où nos chemins doivent se séparer, chaque seconde qui s'écoule me rappelant que le temps de dire au revoir est proche. C'est dans ces instants, où les mots semblent insuffisants pour exprimer l'ampleur de ce que l'on ressent, que les gestes prennent toute leur importance. Feignant un dernier regard, un dernier baiser, une étreinte qui tente désespérément de combler l'espace qui s'apprête à s'insérer entre nous. Le cœur lourd, je la regarde s'éloigner, emportant avec elle une partie de moi, jusqu'à ce que le prochain weekend nous réunisse à nouveau.

Le matin s’était levé sur la belle et grande ville de New-York. J’avais rejoins Milo dans la cuisine, ce dernier étant en train de préparer le petit déjeuner. J’étais venue l’interrompre, me glissant dans ses bras pour une douce étreinte matinale. Avec un ton malicieux j’avais souligné ne fait que je n’aimais pas me réveiller seule. Une remarque apparemment noté du côté de Milo qui souhaitait se faire pardonner au plus vite. Le pilote de ligne me soulève légèrement pour venir me déposer sur le plan de travail avant que nos lèvres se retrouvent enfin. Sa remarque comparant mon charme avec un pancake me fait rire de bon cœur. « Me voilà rassurée, enfin je crois... » dis-je en riant légèrement avant d’ajouter « H’m… vous me semblez bien gourmand monsieur Davis... » dis-je en faisant référence au fait qu’il voulait sauter le petit déjeuner pour prendre le dessert tout de suite.

Le ton devient un peu plus sérieux quand j’évoque mon vol prochain. Quelques heures à peines nous séparaient de mon départ. Les mots de Milo me réconfortent, mes mains viennent glisser derrière sa nuque « J’espère, mais… tu vas tout de même beaucoup me manquer. J’ai hâte que tu reviennes à Fall River… » Pour un week-end et définitivement également. Je donne une légère tape sur l’épaule de Milo quand ce dernier évoque Erin. « Je vais finir par t’interdire de prononcer ce prénom... » dis-je faussement vexée. Je décide ensuite de m’installer pour prendre le petit-déjeuner Milo quant à lui décide de faire un peu de repassage. Étrange activité, surtout de bon matin. Je me demandais bien ce qui pouvait urger à ce point là. Mais sans doute en avait-il besoin prochainement. Je souris face à sa remarque, « J’en prends bonne note, et je saurai te le rappeler au moment venu... » dis-je d’un ton amusé et malicieux à la fois.

Les quelques heures de répit qui nous restait passe à une vitesse folle. Le temps de quitter l’appartement pour prendre la direction de l’aéroport était venu. Le trajet se fait silencieusement. Nos mains elles, ne se quittent pas et ce jusqu’à la porte d’embarquement. Une dernière étreinte, un dernier regard, un dernier baiser, et un dernier « à bientôt ». Et me voilà marchant, le cœur lourd, pour monter dans l’appareil qui me ramènera à ma ville natale mais qui m’éloignera également de Milo.

L'air vibre d'une énergie particulière alors que je me fraye un chemin à travers les dédales de l'aéroport, chaque pas me rapprochant de l'instant où je pourrais surprendre Cassia d'une manière qu'elle n'aurait jamais imaginée. La transformation de civil à pilote s'effectue dans une sorte de ballet mécanique, répété maintes fois mais jamais avec autant de signification qu'aujourd'hui. L'uniforme, avec ses insignes et sa prestance, me confère une allure de sérieux et d'importance, mais sous cette apparence se cache une palpitation d'excitation, un secret joyeux que je suis sur le point de partager.
Les interactions rapides avec les collègues sont teintées d'un sentiment de complicité, surtout avec Clyde, cet ami et coéquipier qui, à travers ses taquineries habituelles, montre un soutien indéfectible à ces moments qui dépassent la routine de nos vols habituels. Son sourire, mi-amusé, mi-interrogateur, ne fait qu'ajouter à l'anticipation du moment à venir.

Je vérifie une dernière fois mon apparence dans le miroir des vestiaires, ajustant la casquette, l'insigne, et me permettant un dernier instant de réflexion. Cet uniforme, je le porte souvent, mais aujourd'hui, il symbolise bien plus qu'une profession ; il devient le vecteur d'une surprise, d'une déclaration d'amour mobile, traversant le ciel pour rejoindre le cœur de celle que j'aime. En sortant des vestiaires, je sens un mélange d'assurance professionnelle et d'anticipation personnelle. C'est une danse entre deux mondes, celui de mes responsabilités en tant que pilote et celui de mes sentiments pour Cassia.
Le chemin jusqu'au cockpit devient une procession intérieure, chaque pas me rapprochant non seulement de l'avion que je vais piloter mais aussi de l'opportunité de tisser un lien plus profond avec Cassia. En montant à bord, l'accueil de l'équipage, habitué à mes commandes mais ignorant de l'intimité de mon projet, me ramène à la réalité immédiate de la tâche à accomplir. Pourtant, au fond de moi, une voix s'élève, mélange d'appréhension et de joie, consciente que ce vol ne sera pas comme les autres. Aujourd'hui, je ne me contente pas de traverser les cieux ; je forge un souvenir, une expérience que ni Cassia ni moi n'oublierons jamais.

Le cockpit, avec ses multiples écrans et commandes, m'accueille tel un vieil ami. Je m'installe confortablement, ajustant mon casque et vérifiant les paramètres de vol, tout en me laissant envahir par une émotion particulière. L'excitation du secret que je m'apprête à révéler à Cassia ajoute une couche d'intensité à cet instant déjà chargé de responsabilités. Alors que l'équipe de cabine termine sa présentation des mesures de sécurité, une routine familière pour tout vol, je rassemble mes pensées, cherchant les mots justes pour transformer une annonce standard en un message personnel et mémorable.

En activant le micro, un frisson me parcourt. C'est l'heure. Ma voix, habituellement ferme et rassurante lors de ces annonces, trahit une légère vibration, témoignant de l'importance du moment.

« Mesdames et Messieurs, ici votre commandant de bord, Milo Davis. Bienvenue à bord du vol 3759 à destination de Fall River. Alors que nous nous préparons à quitter le tarmac, je tiens à vous assurer que toute notre équipe est ici pour rendre votre voyage aussi agréable et sûr que possible. Nous prévoyons un vol sans encombre, avec une météo clémente tout au long de notre trajet.  Nous décollerons bientôt. D’ici là n'oublions pas d'apprécier les moments partagés avec ceux qui rendent notre voyage à travers la vie si extraordinaire. À tous, je souhaite un vol des plus agréables. »

Je coupe le micro, une bouffée de satisfaction m'envahissant. Le regard fixé sur l'écran de la caméra de sécurité, je cherche la silhouette de Cassia, guettant sa réaction. L'anticipation, mêlée à une joie presque puérile, me fait sourire.
Clyde, avec son habituelle perspicacité, ne manque pas de souligner, avec une pointe de taquinerie, l'intensité de mon regard chaque fois qu'il se pose sur l'écran de surveillance. Son espièglerie, loin de m'irriter, renforce notre amitié ; il est, à sa manière, un acteur dans cette quête de bonheur, bien qu'il ignore les profondeurs réelles de mon intrigue. Alors que le vol atteint sa vitesse de croisière et que les passagers se détendent, s'immergeant dans leurs films, livres, ou sommeils légers, je saisis l'opportunité d'une pause dans le cockpit pour me faufiler avec discrétion dans l'allée, masquant mon impatience sous le masque de la routine professionnelle.

M'approchant de Cassia, j'adopte une expression neutre, presque impersonnelle, propre à mon rôle de commandant de bord effectuant un contrôle habituel. Pourtant, chaque mot, chaque geste est calculé, visant à transformer une simple vérification en un moment mémorable. « Madame, j'ai le plaisir de vous informer qu'un surclassement vous attend. Veuillez me suivre, s'il vous plaît » lui dis-je, ma voix feignant une formalité qui contraste avec les battements affolés de mon cœur.

Notre procession vers la première classe se transforme en un ballet soigneusement orchestré, où chaque pas est chargé d'une tension théâtrale. Pour Cassia, c'est une promenade ponctuée de surprises ; pour moi, c'est l'expression d'un scénario longuement fantasmé, où chaque détail a été méticuleusement planifié. Cette dualité, cette danse entre ce qui est montré et ce qui est ressenti, enveloppe notre avancée d'une aura d'exception, faisant de ce simple déplacement un voyage dans un voyage, où la frontière entre la mise en scène et la sincérité du sentiment s'estompe, laissant place à une réalité où le cœur parle plus fort que les mots.

La suggestion d'une boisson ou d'une douceur se transforme en une ouverture vers une expérience que j'anticipe être mémorable, une chance de tisser notre connivité au-delà des limites ordinaires du temps et du cadre aérien. Ma proposition, délicatement imprégnée d'un sous-entendu tendre, se veut plus qu'une simple interaction passagère ; elle incarne l'espoir d'un partage émotionnel profond, une fenêtre vers des instants éphémères mais intensément riches en affection et en complicité. « Qu'est-ce qui vous ferait plaisir ? Un café, un thé, ou peut-être quelque chose de sucré ? » Chaque mot est choisi avec soin, porteur d'une invitation à plonger ensemble dans une bulle de bien-être et de connexion personnelle, suspendue dans l'azur infini.

Le moment de quitter New-York était venu. Milo m’avait accompagné à l’aéroport et même jusqu’au moment fatidique d’embarquer. C’est le donc le cœur lourd, malgré nos dernières étreintes et embrassades, que j’étais montée à bord de l’avion qui allait me mener tout droit chez moi. Une fois mon sac à main rangé dans le compartiment dédié, je m’étais installée à mon siège. L’avantage c’est que d’avoir été une des dernières passagères à monter à bord l’attente fut relativement courte quand le moment de décoller arriva. Comme toujours, les hôtesses de l’air prirent le temps de montrer les habituelles consignes de sécurité. Puis ce fut au tour du commandant de bord de faire son annonce. La surprise pouvait aisément se lire sur mon visage. Milo. Un large sourire se dessine alors sur mon visage. Et je commençais doucement à comprendre, d’abord son allusion quant au fait que nous nous reverrions plus vite que je ne le pensais puis le fait qu’il repassait la chemise de son uniforme de bon matin. J’écoute attentivement sa voix, et un autre sourire se suspend à mes lèvres en l’entendant dire qu’il ne fallait pas oublier d’apprécier les moments partagés avec ceux qui rendaient notre voyage à travers la vie extraordinaire. Je n’arrivais pas à croire que Milo se trouvait dans cet avion. Et même plus, qu’il allait le piloter. Tant de questions me traversaient l'esprit, quant avait-il préparer une telle surprise ? Il avait bien garder le secret et moi, je n'avais rien vu venir.

Puis je le vois arriver. Dans son bel uniforme. Il s’approche de moi et je ne peux cacher le sourire radieux qui a pris possession de mes lèvres depuis son annonce. Le pilote de ligne m’annonce que j’avais été surclassé et que je devais le suivre. Un léger froncement de sourcils exprime ma perplexité face à ses paroles. Mais, lui faisant une confiance aveugle je finis par me lever « Très bien, alors je vous suis commandant... » dis-je en entrant ans son petit jeu. Je récupère mon sac à main et enchaîne le pas de Milo. Ce dernier m’amène alors à la place que j’allais occupé pendant le vol. Je prends possession de cette dernière, les yeux pétillants de bonheur. Et quand Milo me propose quelque chose à boire, mon regard se plonge dans le sien. A ce moment même je n’avais envie que d’une seule chose : lui sauter dessus afin de lui montrer ô combien cette surprise me faisait plaisir. « Un thé, ce serait parfait. Merci... » je ne m’arrête pas là « Et… un baiser du commandant, si toutefois cela est possible... » dis-je le regard plein de malice. Alors que Milo s’approche, tout de même discrètement, pour me voler un baiser, j’en profite pour le remercier de cette merveilleuse surprise « Tu ne cesseras jamais de me surprendre… C’est une merveilleuse surprise Milo. Vraiment... Je te demanderai bien comment tu as fait pour organiser ça mais… je me doute que tu as tes contacts... » dis-je un sourire amusé aux lèvres.

La lumière de joie qui illumine le visage de Cassia, à la réception de ma petite surprise, déclenche en moi une vague d'euphorie sans précédent. Son sourire se déploie, tel un rayon de soleil percant les nuages, un éclat de bonheur pur qui semble non seulement l'entourer mais aussi emplir l'espace entre nous. Ce moment renforce ma résolution de ponctuer notre quotidien de ces petits éclats de magie, ces gestes simples mais profonds qui tissent les fils invisibles de notre intimité. « Un thé, n'est-ce pas ? » je lance avec un ton de connivence, « Avec, je crois bien, une touche de miel, comme vous l'aimez ? » Mon engagement dans cette petite comédie, bien que joué avec un plaisir non dissimulé, a pour but de préserver la bulle de notre secret, malgré le fait que mes collègues soient déjà au fait de l'espace particulier qu'occupe Cassia dans ma vie. Quant aux passagers, ils restent à l'écart de cette complicité délicate qui nous lie. Je m'applique à soigner chaque détail, chaque nuance de ce moment pour qu'il reste imprégné d'authenticité et de sincérité. L'ajout du miel n'est pas anodin, il est la marque de cette attention particulière. « Et si on ajoutait un baiser du commandant ? » je murmure, insufflant une note de légèreté et d'espièglerie à notre échange. « Ce serait un plaisir, mais il s'agirait d'un extra, mademoiselle » je continue, parvenant à lui dérober un baiser rapide mais chargé d'émotion. Ses mots, son sourire, tout en elle réchauffe mon cœur et m'invite à redoubler de discrétion et de tendresse. « Je t'avais dit... je suis un homme de surprises » lui confiais-je, un clin d'œil à notre conversation de la veille, semant ainsi les graines de futurs instants partagés, de futures surprises. Cette promesse tacite, ce jeu entre nous, ajoute une dimension supplémentaire à notre relation, un fil tissé de moments joyeux et d'attentions délicates, confirmant que chaque journée nous réserve la possibilité d'un enchantement nouveau, un voyage continu au cœur de notre amour.

Revenant vers le cockpit, je marche d'un pas mesuré, affichant une nonchalance étudiée qui ne trompe personne, surtout pas Clyde. Son regard pétillant de malice capte le mien dès que j'entre, un sourire en coin trahissant son amusement. « Cassia semble avoir un effet bénéfique sur toi. Tu es bien moins grincheux en sa présence » lance-t-il avec une pointe de taquinerie. Je feins l'ignorance, répondant d'un ton léger : « Je ne vois pas de qui tu parles. J'étais simplement en train de saluer l'un de nos passagers. » Clyde, loin de se laisser duper, en rajoute une couche, sa voix vibrante d'une fausse innocence : « Ah, évidemment ! Elle est brune, ravissante, et elle semble occuper toutes tes pensées. Mais, bien sûr, elle n'est qu'une passagère parmi tant d'autres, n'est-ce pas ? » Sa remarque, teintée d'un rire complice, me pousse à esquisser un sourire contraint, acceptant la boutade avec une bonne humeur forcée.

Le vol se déroule sans encombre jusqu'à ce qu'une zone de turbulences vienne tester notre sérénité et celle des passagers. Les mouvements de l'avion, bien que modérés, engendrent une atmosphère d'inquiétude palpable. Clyde, concentré sur les instruments, jette un œil au radar avant de me lancer, une assurance tranquille dans la voix : « Va la voir, je m'occupe de tout ici. On sortira de cette zone dans moins de vingt minutes. » Après un court instant d'hésitation, marqué par la conscience de l'inquiétude que Cassia peut ressentir face à ces secousses, je décide de suivre son conseil.

En me dirigeant vers elle, je m'efforce d'incarner la sérénité, bien que mon cœur batte à vive allure à l'idée de la retrouver, même dans ces circonstances. Lorsque nos regards se croisent, je perçois une lueur d'apaisement dans ses yeux. « Ne vous inquiétez pas » lui soufflais-je avec douceur, juste au moment où une secousse plus prononcée projette son livre sur le sol. Je me penche pour le ramasser, et un sourire amusé m'échappe en découvrant le titre du roman - le même que nous avons entamé ensemble lors de nos soirées complices. « Je connais la fin, laissez-moi vous la raconter » je glisse, profitant de cet instant fugace pour lui déposer un baiser rapide mais chargé de promesses. « Tout est sous contrôle, ne t'en fais pas. » Ces mots, prononcés avec conviction, visent à lui transmettre non seulement mon soutien dans l'instant mais aussi ma détermination à être à ses côtés, à braver ensemble les secousses de l'existence, autant que celles de nos voyages aériens.

Retournant à mon poste, je garde en moi l'image de son sourire reconnaissant, une source de chaleur qui me guide à travers les défis du vol. Ce bref échange, bien que simple, scelle davantage notre complicité, affirmant silencieusement que, quelles que soient les turbulences rencontrées, nous les affronterons main dans la main, forts de notre lien inébranlable.

Milo avait toujours été surprenant. Et encore une fois, aujourd’hui, il le démontrait bien. Je ne sais comment il avait pu s’arranger pour être le commandant de bord de ce vol, tout comme je ne sais pas comment il avait eu les informations nécessaires à cette surprise mais une chose est certaine : mon cœur battait d’admiration pour cet homme. Depuis toujours, j’avais l’habitude d’être surprise et choyée par Milo mais là, cette surprise, c’était indéniablement au dessus de tout ce que j’avais pu imaginer. Milo m’invite à changer de siège pour me rendre en première classe et s’affaire à être aux petits soins pour moi. J’accepte volontiers de boire un thé. Et Milo, me connaissant sur le bout des doigts, me propose d’y ajouter une touche de miel. « Avec une touche de miel, ce serait parfait... » dis-je le regard pétillant de bonheur et de reconnaissance. Je ne peux m’empêcher de rire légèrement quand Milo m’annonce qu’un baiser de sa part serait considéré comme un extra « Oh, mais pour un baiser de lui je paierai n’importe quel prix... » dis-je la voix espiègle mais sincère malgré tout. Nous échangeons donc un furtif baiser avant que Milo ne reparte dans le cockpit. Quant à moi je reste à ma place, sur un véritable petit nuage. Sereine et heureuse de savoir Milo dans cet avion. Fière également, de savoir que c’est grâce à lui que tout ses passagers, moi y compris, allions pouvoir atteindre notre destination.

Le vol se déroule parfaitement bien. Après avoir bu mon thé, je me plonge dans le livre que nous avions entamé pendant mon séjour à New-York. Mais un instant plus tard, l’avion est secoué par des perturbations. Au début très légères puis soudainement un peu plus fortes. Les hôtesses de l’air nous conseille de rattacher nos ceintures par précaution. Je vois Milo s’approcher de moi. Il me demande de ne pas m’inquiéter. Mais au même moment une secousse plus forte se fait ressentir, mon livre tombe à terre. Milo se penche pour le ramasser. Je perçois son sourire. Il m’indique connaître la fin et me proposer de me la raconter. « H’m… laissez moi la découvrir, j’ai presque terminé... » dis-je le regard plein de malice alors que ses lèvres viennent me voler furtivement un baiser. Milo en profite pour me rassurer à nouveau quant aux perturbations. « D’accord, je te fais confiance... » dis-je d’une voix sincère. Malheureusement Milo ne peux s’absenter du cockpit trop longtemps, le voilà donc déjà reparti. Quant à moi, je tente de faire abstractions des turbulences afin de me replonger dans ma lecture.

À mesure que les turbulences se dissipent, laissant place à une tranquillité retrouvée, je regagne le cockpit, où Clyde m'attend avec une pointe d'amusement évidente. « Tu sais, Milo, je pense qu'on devrait fixer une photo de Cassia quelque part ici. Tu es tellement plus... agréable et calme quand elle est dans les parages. A croire que tu es un Grimlins ! » Sa suggestion, mi-sérieuse mi-taquine, souligne à quel point la présence de Cassia a un effet apaisant sur moi. Je réponds à sa remarque par un sourire complice et une tape légère sur son épaule, concentré sur la phase finale de notre vol.

L'approche finale vers Fall River est fluide, l'avion se pose avec douceur sur la piste, un témoignage de la routine maîtrisée qui caractérise notre profession. Alors que nous roulons vers le terminal, je saisis à nouveau le micro pour annoncer notre arrivée, ma voix se voulant à la fois professionnelle et chaleureuse. « Mesdames et Messieurs, votre commandant Milo Davis vous parle. Bienvenue à Fall River. Nous touchons terre à 19h30, sous une température de 59 degrés Fahrenheit. Pour ceux d'entre vous qui ont des correspondances, je vous invite à vous diriger vers le hall 3. De la part de tout l'équipage, je vous souhaite un séjour des plus agréables, et une soirée mémorable en compagnie de vos proches. » Dans cette dernière phrase, une nuance subtile, presque imperceptible, était destinée à Cassia, un clin d'œil voilé à notre aventure partagée.

Alors que les passagers se préparent à débarquer, mon esprit est déjà à mille lieues d'ici, anticipant les retrouvailles avec Cassia une fois hors de l'avion. Cette journée, marquée par l'insolite et l'imprévu, souligne la profondeur de notre connexion, un lien que même les contraintes de la distance et du temps ne semblent pas altérer. Clyde me lance un dernier regard entendu, un sourire aux lèvres, conscient que, malgré mes tentatives de neutralité, mon cœur et mes pensées l'acompagnent.

L'aéroport baigne dans la lueur dorée du crépuscule lorsque les derniers passagers franchissent la porte de sortie, laissant derrière eux le bourdonnement caractéristique de la zone d'embarquement. Parmi eux, Cassia, dont la présence a transformé ce vol en une aventure hors du commun. « Mademoiselle ? Il me semble qu'un certain gentleman vous attend... Ah, son nom m'échappe » dis-je, un sourire malicieux ourlant mes lèvres, en prenant délicatement sa valise de ma main libre. « Permettez-moi de vous escorter jusqu'à la sortie. »

Notre marche vers le parking se fait dans une complicité silencieuse, ponctuée seulement par le claquement de nos pas sur le sol. Arrivés à l'extérieur, je me tourne vers elle, adoptant un air de fausse surprise. « Oh ! Cassia, le temps a filé à une vitesse ! La semaine est déjà terminée ? » lançais-je, faisant signe à un taxi d'approcher tout en feignant de consulter mon emploi du temps. « Il semblerait que je ne reprenne mon service que demain matin... Où pourrais-je donc passer la nuit ? Je crois qu'il y a un petit hôtel pas très loin... » La question, posée sur un ton léger, cache à peine l'invitation que je souhaite lui faire, évitant soigneusement de mentionner la possibilité de me retrouver chez Erin, une option que nous savons tous deux peu probable.

La suite du vol se déroule parfaitement bien. Plus aucune zone de turbulences à signaler. C’est en tout début de soirée donc que l’avion atterrit à Fall River. Avant que les passagers puissent commencer à descendre, Milo fait une dernière annonce. Avec, une petite allusion à nous. Encore une fois. J’étais incroyablement heureuse et fière d’avoir partagé ce vol avec Milo. C'était un moment dont je me souviendrait pendant très longtemps.

A la sortie, une voix bien familière m’interpelle. Milo dans un jeu théâtral, me demande la permission de m’escorter jusqu’à la sortie de l’aéroport. « Permission accordée... » dis-je un léger sourire amusé aux lèvres tout en marchant à ses côtés. Notre marche vers le parking est silencieuse. Puis, quand nous arrivons enfin à l’extérieur Milo, décidément très bon comédien, joue une scène de retrouvailles. Je ris de bon cœur face à sa comédie. « Pilote de ligne, cuisinier, et maintenant comédien… Décidément monsieur Davis, vous avez de nombreuses cordes à votre arc... ». Et une autre bonne nouvelle est annoncée, Milo ne repartait pas immédiatement. Nous avions donc la soirée et la nuit pour nous. Le pilote de ligne propose alors de se rendre dans un petit hôtel pas très loin d’ici.  Milo se hâtait pour appeler un taxi. « Attends... » Je voulais profiter de quelques secondes en tête à tête. Loin des autres passagers, ou de toutes autres personnes. « Merci infiniment pour cette surprise… C’était vraiment… incroyable de partager un vol de cette manière avec toi. » avouai-je en toute sincérité. Je me devais de le remercier pour cette surprise qui lui avait pris de son temps, pour le surclassement, pour tout.

Après un énième baiser, nous finissons par monter ensemble dans un taxi afin de rentrer à mon appartement. Tous les deux ravis que ce week-end improvisé puisse se prolonger encore un peu.